Comme mon mari est peintre, il arrive souvent que de nouvelles connaissances me demandent si je suis moi-même une artiste mais, bien que ne correspondant pas à la définition traditionnelle de l'artiste, je ne me sens jamais complètement honnête en répondant par la négative. Je pense en effet qu'à tous les niveaux l'art est lié à l'inspiration: l'inspiration qu'il communique au public, l'inspiration qui au départ pousse l'artiste à créer, et la source de cette inspiration, que j'identifie à Dieu. Si donc je suis ouverte à cette inspiration, que je l'apprécie à sa juste valeur et m'adapte à ses exigences, je peux dans cette mesure me considérer comme une artiste, et il en va de même pour chacun de nous.
Au cours des années, mon goût pour l'art, allié à sa pratique sous diverses formes, m'a amenée à considérer qu'il est fondamentalement spirituel. Il doit en être ainsi au fond, dès lors que l'Àme, l'un des noms donné à Dieu par Mary Baker Eddy dans son ouvrage, Science et Santé, exprime l'idée que l'art, la beauté et l'inspiration sont inhérents à la nature même du Divin.
En fait, dans ce paysage de l'Àme, nous trouvons l'art partout où porte le regard: dans l'ordre des constellations, l'embellissement de notre environnement, l'harmonisation des rapports humains. La Bible nous offre une vue merveilleuse sur une création toute animée par la créativité divine. Le Livre de Job, par exemple, décrit « les étoiles du matin » chantant à l'unisson tandis que « tous les fils de Dieu poussaient des cris de joie... ». (Job 38:7) Cette musique qui semble être inhérente à l'univers même communique le sentiment extraordinaire que Dieu se réjouit de Sa création, joie qui se manifeste par la couleur, la créativité et la beauté. Cette joie de Dieu ne se manifeste pas à sens unique, car la Bible évoque l'image d'une création qui s'émerveille d'elle même et de Dieu en particulier. Et là encore, il s'agit d'art.
L'art est tissé dans la fibre même de notre être: cette dêcouverte est parmi celles qui m'ont apporté le plus de liberté, car pour participer à l'expression artistique, il n'est nul besoin d'avoir ce qu'on appelle le « profil créatif ». Pour être un artiste dans toute l'acception du mot, il n'est pas nécessaire d'être engagé dans une forme d'art traditionnelle. C'est pourquoi, lorsque de nouvelles relations me demandent si je suis une artiste, je pense que dans un certain sens je devrais répondre par l'affirmative. Dans mes meilleurs moments de prière, j'ai l'impression de faire partie d'une chorégraphie, d'être une avec l'inspiration divine qui se communique à moi, comme à nous tous.
Il y a de nombreuses années, mes frères m'ont demandé où j'en étais dans mon étude de la guitare. Pendant un certain temps en effet, je m'y étais consacrée et j'aimais beaucoup cette activité, mais ce jour-là, quand ils m'ont demandé si j'avais fait des progrès, j'ai dû reconnaître que je n'avais pas vraiment touché à ma guitare récemment. J'aimais toujours cet instrument, mais en jouer ne correspondait pas à mon état d'esprit du moment, à ce stade de ma vie. Je perçus leur déception, voire leur perplexité, mais ils comprirent lorsque je leur expliquai que cela ne me manquait pas, car ma vie était pleine de musique: « Je suis émerveillée, ai-je ajouté, d'entendre cette musique dans le silence de mes prières en compagnie de Dieu; je ne ressens pas du tout le besoin de jouer de la guitare en ce moment. » J'ai eu l'impression ce jour-là que nous étions tous reliés à la conception de l'artiste telle qu'elle est exprimée dans les Proverbes: « ...je faisais tous les jours [les] délices [de Dieu], jouant sans cesse en sa présence... » (Proverbes 8:30)
Sous cet angle, le fait d'être un artiste me semble faire partie intégrante de l'aventure qu'est notre existence, car l'art est au cœur de notre vie. Tout au long de l'histoire, l'un des rôles importants joué par l'art a été d'exprimer la révolte: on l'a utilisé pour mettre en lumière ce qui avait besoin d'être dévoilé; il a été une protestation pour réclamer davantage, pour revendiquer une guérison et, dans sa forme la plus belle et la plus pure, il a offert une vision de progrès et de transcendance. Dans ce cas la prière n'est-elle pas également une forme d'art ? Et lorsque nous prions, ne sommes-nous pas reliés au niveau le plus profond de l'Âme ?
Dans Science et Santé, Mary Baker Eddy évoque Jésus « dont les humbles prières étaient des affirmations profondes et consciencieuses de la Vérité — de la ressemblance de l'homme avec Dieu et de l'unité de l'homme avec la Vérité et l'Amour ». (p. 12:13) Cette description, me semble-t-il, exprime l'idée qu'il existe une exigence divine, un élan vital, qui nous incite à ne pas prendre part à toutes ces notions négatives sur ce qui semble se produire dans notre vie et dans le monde, et contre lesquelles il existe un moyen pour nous de protester ou de réagir: cette action fait non seulement naître l'espoir, mais elle amène aussi la transformation.
J'en ai eu un exemple mémorable: j'habitais alors à Chicago et je m'étais aperçue que les médias traitaient fréquemment du cancer du sein. C'est pourquoi, ce mois-là, j'ai pris un peu de temps chaque jour pour comprendre qu'aucune forme de maladie n'a de fondement en Dieu, ni dans la vie de qui que ce soit. J'ai prié pour comprendre que personne ne pouvait avoir peur de la maladie ou en être la proie. J'ai affirmé notamment que Dieu enveloppe Ses enfants de paix et de réconfort et que chacun peut en ressentir l'étreinte.
Par ailleurs, ce même mois, je suis allée voir, dans le centre local d'art contemporain, l'exposition d'une femme peintre qui s'était inspirée du combat de sa famille contre le cancer. Son œuvre exprimait le chagrin et la révolte, une lutte sincère afin de trouver la guérison et la paix; les couleurs étaient merveilleuses et les tableaux remarquables. J'en ai été très émue, remplie d'un sentiment vraiment tangible que le Divin entoure l'humanité. Ces peintures en effet communiquaient un amour intense pour l'humanité, un amour qui n'est pas lointain mais au contraire tout proche. C'était ce que j'avais ressenti de façon palpable dans mes prières, mais là, cela semblait prendre davantage de relief encore, cela embrassait tout et élevait l'esprit.
Près de la sortie de l'exposition, je suis passée à côté d'une femme qui pleurait; comme je m'étais arrêtée pour lui parler, elle me dit qu'on venait de lui diagnostiquer un cancer du sein. A cet instant, toutes mes prières antérieures jaillirent comme une source et je l'entourai de mes bras en affirmant l'intégrité de sa vie. Ce même mois encore, une personne qui avait aussi une tumeur au sein me demanda de prier pour elle: en l'espace de deux semaines, cet état était complètement guéri, ainsi que d'autres problèmes dans sa vie.
Tout cela résume bien la nature de l'œuvre de l'unique source créative infinie qui est Dieu Lui-même. En réalité, cette guérison, ainsi que toute transformation que nous voyons comme résultat de nos prières, prouve que l'inspiration sacrée de l'Amour protège, choie et fête ses enfants. Voilà l'art dont chacun de nous est un élément.
