Il Y A peu, je suis retournée voir l’endroit où j’avais été élevée. La maison que mon père avait construite au bord d’une route de campagne avait disparu, bien que certains des jeunes arbres qu’il avait plantés mesurent maintenant plus de quinze mètres. Je dois avouer que j’ai pleuré en repensant à tout ce que cette maison avait représenté pour notre petite famille: un abri contre les tempêtes hivernales et les pluies estivales, le centre de la vie familiale, des travaux et des apprentissages, des affections, des joies et des peines. J’ai revu l’emplacement où ma mère avait planté un massif d’iris, celui où mon père avait entretenu le jardin, à présent envahi par les mauvaises herbes. J’ai repensé aux espoirs et aux rêves que mes parents avaient partagés, aux efforts qu’ils faisaient pour parvenir à joindre les deux bouts, à la prière de gratitude que nous récitions avant chaque repas.
Je suppose qu’il est fréquent d’évoquer le « bon vieux temps » en se demandant si les années qui se sont écoulées ont apporté des progrès ou n’ont fait que tout compliquer. Cependant, même si l’on espère toujours que les choses vont s’améliorer, ce que mes parents ont certainement fait, apprécions-nous toujours à sa juste valeur le bien déjà présent, y voyons-nous la manifestation de la perfection que Dieu fait régner ici et maintenant ?
Que nous en soyons conscients ou pas, nous aspirons tous à trouver notre foyer. Mais le véritable foyer n’est pas un lieu matériel. C’est un état de conscience céleste, ce que le Psalmiste a appelé la « maison de l’Éternel » Ps. 23:6.. Mary Baker Eddy interprète ainsi la fin du Psaume 23 pour y faire ressortir le sens spirituel de la Divinité: « ... j’habiterai dans la maison [la conscience] de [L’AMOUR] pour toujours. » Science et Santé, p. 578.
Dans l’existence humaine, le progrès semble parfois nous éloigner du foyer. Les jeunes le quittent pour faire leur vie. Notre activité professionnelle nous oblige à déménager. Il arrive aussi que de grandes difficultés ou une calamité nous forcent à abandonner un cadre que nous aimions. Mais l’important n’est pas de rester ou de partir. Que la démolition d’un bâtiment, un emploi, les aléas de la vie nous entraînent en d’autres lieux, ou que nous restions là où nous sommes, nous ne progressons que dans la mesure où nous comprenons mieux ce qu’est la demeure dans laquelle nous vivons vraiment, c’est-à-dire la « conscience de l’Amour », la conscience divine.
Abraham quitta Ur, sa ville natale, et « partit sans savoir où il allait » Hébr. 11:8. afin d’obéir à Dieu. Il ne lui fut sans doute pas facile de quitter l’environnement humain qui lui était familier, d’autant plus qu’il ignorait où il se rendait. Mais il connaissait son Dieu et Lui faisait confiance. Nous devrions avoir la même attitude lorsque nous abandonnons l’ancien pour le nouveau. Alors, nous ne pourrons que nous sentir chez nous où que nous soyons.
Demandons-nous: « Mon foyer est-il un endroit matériel ? Dans quelle mesure est-ce que je démontre, maintenant même, la “maison” de mon Père-Mère dans ce que j’appelle mon foyer ? Ma conscience se rapproche-t-elle tant soit peu de la “conscience de l’Amour” ? Est-ce que je me laisse guider par Dieu aujourd’hui, est-ce que je progresse spirituellement en abandonnant la conception matérielle de la vie et en discernant mieux la réalité divine ? »
Il nous semble parfois avoir quitté notre foyer — avoir perdu le sentiment d’être purs, bons et parfaits — afin de partir « pour un pays éloigné ». Dans la parabole de Christ Jésus, le fils qui quitta la maison et « dissipa son bien » avant d’être ramené à la raison par la misère, symbolise l’illusion du foyer et du bonheur perdus. Voir Luc 15:11–24.
Nous pouvons chercher le bonheur de bien des façons. Mais nous le trouvons seulement lorsque nous nous rendons compte que nous ne sommes pas, en réalité, des mortels perdus, séparés du bien, mais l’image et la ressemblance spirituelle de Dieu. Le bonheur fait donc déjà partie de nous, et il nous faut simplement prendre conscience de notre filialité spirituelle pour nous sentir heureux. La Science Chrétienne nous fait comprendre que nous n'avons jamais quitté notre foyer spirituel, l'innocence et la plénitude qui nous viennent de Dieu, de même que l'enfant prodigue n'avait jamais perdu sa qualité de fils.
Le foyer n'est pas un régime politique, un pays, un coin de terre, une demeure particulière. C'est la douce conscience de Dieu, qui fait que nous nous sentons en sécurité, aimés, réconfortés. Nous trouvons une certaine paix et une certaine harmonie dans une maison bien précise, mais une maison n'est pas notre foyer véritable, malgré toute la beauté et la grâce qu'elle exprime. C'est dans la conscience de l'Amour que nous habitons.
Où que nous soyons aujourd'hui, nous pouvons progresser et exprimer davantage d'amour. Nous pouvons rejeter tout ce qui n'exprime pas la Vérité et l'Amour. Et alors, que nous demeurions dans une belle maison, sur un terrain de camping ou dans une chambre d'étudiant, nous sommes dans notre foyer. Notre Maître a déclaré: « Le Fils de l'homme n'a pas où reposer sa tête. » Matth. 8:20. Et pourtant, il ne fut jamais indigent, mais connut les joies du foyer dans des endroits magnifiques comme dans d'humbles logis, et il fit découvrir à ceux qui l'entouraient notre foyer permanent en Dieu.
Notre maison de famille a disparu. Ses principaux occupants ont disparu, eux aussi, et poursuivent leur chemin sur la route du progrès. Mais les bienfaits que nous avons reçus dans le foyer de mon enfance ne se sont jamais limités à une structure de bois et de pierre. Les leçons que nous y avons apprises, les bons moments que nous y avons vécus ne disparaîront jamais. Le progrès ne nous enlève jamais les bonnes choses du passé, il ne le peut pas; il n'élimine que ce qui voudrait les ternir. Les regrets, les déceptions, les souvenirs douloureux, les événements pénibles devront finalement être perçus comme des éléments pénibles devront finalement être perçus comme des éléments du rêve mortel, éléments irréels et indignes d'être entretenus dans notre conscience. Nous apprenons à abandonner le concept matériel de l'existence et à approfondir notre amour pour Dieu et pour l'homme. C'est là le vrai progrès grâce auquel nous ne sommes jamais sans abri ni malheureux loin de notre foyer.
Le progrès, c'est donc bien trouver son foyer, rechercher la conscience de l'Amour infini en sachant que ce foyer est intact et que nous y demeurons à jamais. C'est là le ciel, le foyer auquel l'humanité aspire et dont nous ne pouvons jamais être séparés.
Que tes demeures sont aimables,
Éternel des armées !
Heureux ceux qui habitent ta maison !
Ils peuvent te célébrer encore.
Ps. 84:2, 5
    