Quand êtes-vous devenue scientiste chrétienne et dans quelles circonstances ?
J'ai toujours été scientiste chrétienne. La Science Chrétienne est venue dans ma famille par la guérison de ma grand-mère, il y a presque un siècle. Alors qu'elle était sur le point de mourir, son frère, qui avait découvert la Science Chrétienne aux Pays-Bas (ma grand-mère et lui étaient hollandais) est venue la voir en Angleterre. Il lui a fait connaître cette religion, et elle a été guérie. Ma mère est allée à l'école du dimanche, et elle a étudié la Science Chrétienne avec ferveur durant toute sa longue existence. L'un des parents de mon père a également eu une guérison alors qu'il était dans un état critique. C'est ainsi que j'ai grandi dans un environnement qui pratiquait naturellement la Science Chrétienne. Je représente la troisième génération d'une famille qui compte maintenant cinq générations de scientistes chrétiens.
C'est impressionnant ! Mais je pense que chacun doit faire sienne la Science Chrétienne, y compris ceux qui ont grandi dans une famille scientiste chrétienne ou qui ont fréquenté l'école du dimanche de la Science Chrétienne. Qu'est-ce qui vous a incitée à franchir ce pas ?
Plusieurs choses, me semble-t-il. J'ai toujours aimé Dieu, et ma mère a commencé à me lire la Bible quand j'étais toute petite. Elle m'a rappelé, plus tard, que mon passage préféré, celui que je lui demandais toujours de me relire, était l'épisode de Jésus demeurant dans le temple de Jérusalem, à l'âge de douze ans, et disant à ses parents: « Ne saviezvous pas qu'il faut que je m'occupe des affaires de mon Père ? » (Luc 2:49) Ma mère m'encourageait toujours à prier pour moi-même. Un jour, je devais avoir huit ou neuf ans, elle ne s'est pas sentie bien, et elle m'a demandé de prier pour elle. Je ne savais pas trop comment faire, mais je voulais tant l'aider ! Alors je suis allée dans ma chambre et j'ai ouvert Science et Santé. Je suis tombée sur la définition de l'Église. J'ai tout à coup entrevu ce que pouvait signifier l'Église en tant que « structure de la Vérité et de l'Amour... » (p. 583), et j'ai pu voir que ma mère était en sécurité dans cette structure. Elle a été guérie le jour même.
Et puis, quand j'avais treize ans, une camarade d'école m'a demandé de prier pour elle. Récemment, j'ai retrouvé un petit journal dans lequel j'avais écrit des versets bibliques et des notes quand j'aidais cette amie, et elle avait été guérie. C'est à ce moment-là que j'ai décidé de consacrer ma vie à la pratique de la Science Chrétienne. La graine avait été semée, et ce désir ne m'a jamais quittée, même si de nombreuses années ont passé avant qu'il ne s'accomplisse pleinement. D'autres voies se sont ouvertes, mais je ne voulais accepter que ce qui me préparerait à ce ministère.
L'école du dimanche a également exercé une influence formatrice sur ma carrière. J'ai bénéficié de cette éducation spirituelle, au fondement solide comme le roc, jusqu'à l'âge de vingt ans. De ce fait, ma connaissance et mon amour de la Bible et de Science et Santé se sont énormément développés, et j'ai appris à appliquer concrètement ces enseignements. C'est pour cela, je pense, que j'aime toujours autant l'école du dimanche. On m'y trouve chaque semaine, en train d'enseigner ! J'aime être avec des enfants et de jeunes adultes, et je désire leur donner ce que j'ai reçu en grandissant.
Vous avez également étudié la musique très tôt. Vous êtes pianiste et compositrice. Quels liens voyez-vous entre l'étude de la musique et l'étude de la Science Chrétienne ?
De nombreux liens ! L'un d'entre eux étant la capacité d'écoute. La formation musicale développe l'« oreille intérieure » du musicien. Mon professeur de musique, au lycée, était scientiste chrétienne, et j'étais la seule élève dans son cours qui présentait la musique à l'examen de fin d'études [équivalent du Baccalauréat]. La Science Chrétienne était notre premier sujet d'intérêt, à elle comme à moi, aussi passions-nous la moitié du temps à parler de la Science Chrétienne, avant de nous rappeler que nous étions là pour faire de la musique ! Elle me préparait des exercices d'harmonie pour soprano, alto, ténor et basse, dont une partie était écrite, charge à moi de compléter les parties manquantes. Mais nous partions toujours de l'idée que la musique est déjà une idée complète dans l'Entendement, si bien que je n'avais qu'à tendre l'oreille pour entendre les sons. Je me suis exercée ainsi régulièrement, et au moment de l'examen final, j'ai eu l'impression d'écrire sous la dictée tant j'étais habituée à cette écoute.
Il y a un parallélisme évident avec la pratique de la Science Chrétienne. Si je devais donner un synonyme au mot prière, je choisirais « écoute ». Lorsqu'une personne me demande de prier pour elle, il me faut bien sûr écouter son cœur parler, écouter ce qu'elle essaye de m'expliquer. Mais en réalité j'écoute l'Entendement divin afin qu'il me révèle ce qui répondra au besoin de cette personne.
Je me souviens qu'un jour, au moment d'ouvrir la bouche pour expliquer quelque chose, je me suis entendue dire tout à fait autre chose, et la personne au bout du fil a éclaté de rire ! Le rire ou les larmes sont des armes formidables pour briser l'hypnotisme. Ce rire merveilleux a jailli, et la personne a été guérie. Je lui avais dit une chose à laquelle je n'avais jamais pensé auparavant. L'amour paternel et maternel toujours présent de Dieu, l'Entendement divin, m'avait donné ce message pour que je le lui communique, et nous en avons reçu toutes deux les bienfaits. Ainsi cette capacité d'écoute intérieure que j'ai développée s'est révélée extrêmement précieuse.
D'autre part, le son et le silence sont deux éléments nécessaires en musique. Parallèlement, nous avons besoin de préserver des espaces, des moments de calme, dans notre vie afin de pouvoir renouveler nos forces, nous reconstituer. Rien ne sert d'attendre le bon moment, il ne viendra jamais ! Il faut donc savoir se ménager de tels moments et les protéger. Mary Baker Eddy insistait beaucoup sur l'importance de préserver du temps pour prier, pour communier avec Dieu. Parfois les gens ont peur du silence, peur d'être simplement, au lieu d'agir sans cesse. Mais le fait d'apprendre à être seul avec Dieu (à n'être plus qu'un avec Lui) est essentiel à la qualité de la vie et à l'accomplissement de guérisons.
Existe-t-il d'autres liens importants à vos yeux entre la musique et la Science Chrétienne ?
Un jour, quelqu'un m'a dit au téléphone: « Ah ! si seulement je n'avais que des pensées justes ! » C'était un tel cri du cœur que l'idée m'est venue de lui parler d'un cours de piano qui m'a particulièrement marquée quand j'étais adolescente. J'apprenais vite, mais de façon inexacte. Aussi ce remarquable professeur de piano m'a demandé, en me regardant droit dans les yeux: « Pourquoi les gens jouent-ils des fausses notes ? » Après une longue pause éloquente, il a répondu lui-même: « Parce que leurs doigts ne sont pas au-dessus des notes justes ! » Il m'a alors donné un cours détaillé sur la pratique lente, sur la façon de sentir chaque note avant de la jouer, sans regarder le clavier. Il m'a affirmé que plus je m'entraînerais lentement, plus vite j'apprendrais à jouer rapidement et sans fausses notes ! Et il avait raison !
Mon interlocuteur au téléphone et moi-même avons vu là un beau parallèle à faire avec la prière scientifique. C'était l'occasion d'apprendre à ne pas penser de manière superficielle, à ne pas se contenter de survoler des dizaines de références ou à ne pas lire la Leçon biblique de la semaine d'un bout à l'autre à toute vitesse ! Au contraire, nous apprenions à penser en profondeur, à reconnaître le fondement spirituel des pensées avant qu'elles se transforment en mots ou en actes. C'est ainsi qu'on aligne ses pensées sur Dieu. La Bible affirme: « L'Esprit sonde tout, même les profondeurs de Dieu. » (I Corinthiens 2:10)
Un exemple me vient à l'esprit. Un jour, j'ai décidé de consacrer une semaine entière à l'étude en profondeur de la « Règle pour les mobiles et les actes », que l'on trouve dans le Manuel de l'Église de Mary Baker Eddy (p. 40). Comme j'étudiais également le Sermon sur la montagne de Jésus (voir Matthieu, chapitres 5-7), je me suis rendu compte que toutes les idées contenues dans le Sermon se retrouvaient d'une certaine façon dans cette Règle. C'était remarquable ! La pensée de Mary Baker Eddy était si imprégnée du Sermon sur la montagne, qu'elle était capable de distiller l'essence de ces enseignements en un seul paragraphe. Cela donnait à la « Règle pour les mobiles et les actes » une nouvelle dimension. On ne s'étonnera donc pas que Mary Baker Eddy l'ait placée en tête de la section consacrée à la « Discipline » et qu'elle ait voulu qu'elle soit lue durant le service religieux une fois par mois.
Cette semaine-là, j'ai traité à la lumière de cette Règle tous les cas pour lesquels on m'a demandé de l'aide. Au cœur de cette Règle se trouve une déclaration absolue, radicale, de la vérité: « Dans la Science, l'Amour divin seul gouverne l'homme... » Non pas « devrait gouverner » ou « doit gouverner », mais « gouverne », ce qui est l'affirmation d'un fait spirituel irréductible: le lien unissant Dieu à toute Sa création. De plus, la première phrase de la Règle, qui demande en quelque sorte de « démagnétiser » la pensée, pouvait s'appliquer à chaque appel pour un traitement: « Ni l'animosité, ni un attachement purement personnel ne doivent déterminer les mobiles ou les actes des membres de L'Église Mère. » La Règle fournit ensuite des directives pour développer les qualités mentales et chrétiennes qui caractérisent la guérison par la Science Chrétienne, et elle se termine par un appel à la vigilance face à six embûches de la pensée erronée. C'est là un traitement complet ! Les guérisons accomplies cette semaine-là ont confirmé ces propos de Mary Baker Eddy: « S'il est une chose dont je suis sûre, c'est que chacune des règles et statuts de ce Manuel accroîtra la spiritualité de celui qui lui obéit, fortifiera son aptitude à guérir les malades, à consoler ceux qui pleurent et à réveiller les pécheurs. » (La Première Église du Christ, Scientiste, et Miscellanées, p. 230)
Qu'est-ce qui vous a incitée à devenir non seulement praticienne mais professeur de la Science Chrétienne?
Mon mari et moi avons toujours eu le sentiment de vivre dans une famille élargie. L'association des élèves d'un professeur représente également une forme de famille élargie. J'aime cet engagement continu des professeurs de Science Chrétienne à l'égard de leurs élèves, cette relation qui se poursuit toute la vie durant. Comme des parents, nous ne sommes pas présents à court terme seulement, mais à long terme! J'aime avant tout voir des existences transformées, rachetées, restaurées, renouvelées et guéries, des existences inondées par l'amour et le dessein de Dieu. Comme lorsqu'on éduque des enfants, cheminer ensemble dans une relation professeur-élèves implique de la patience, de la persévérance, du courage et une confiance totale dans les directives de Dieu, de la part de chacun ! Mais Jésus a tracé la route pour nous tous: « Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force, et de toute ta pensée; et ton prochain comme toi-même. » (Luc 10:27) Voilà qui traduit bien ce qu'est la pratique de la guérison par la Science Chrétienne et ce que l'enseignement est censé approfondir.
L'enseignement consiste également à développer la conscience de ce que l'on pourrait appeler les « grands rythmes » de la vie. Je me souviens avoir lu que Mary Baker Eddy pensait en fonction des décennies là où d'autres pensaient en fonction des années. Il y a plusieurs années, j'ai noté dans un carnet une citation tirée du Christian Science Monitor. Ce sont des propos tenus par Violette Verdy, une Française danseuse et directrice de ballet. Elle expliquait que pour développer son propre style, on doit d'abord apprendre les principes fondamentaux de l'art que l'on pratique. Puis elle poursuivait: « Vous devez acquérir les grands rythmes. Ce sont les petits rythmes qui font que nous nous apitoyons sur nousmêmes. »
Je vois dans cette métaphore une leçon de vie qui nous rappelle qu'il ne faut pas perdre de vue les grandes perspectives de l'existence. Mary Baker Eddy est un bel exemple en ce sens. Si elle s'était contentée de sa seule guérison, nous n'aurions pas cette Église aujourd'hui, l'Église du Christ, Scientiste, avec son ministère de guérison dans le monde entier. On peut voir comment ses pensées se sont développées à partir d'une expression personnelle du christianisme, de portée locale, jusqu'à la structure mondiale et universelle de l'Église qu'elle a établie des années plus tard. Chacun de nous doit se développer de la même façon, au-delà de ce que l'on trouve « bon pour soi », et se poser la question: « Que puis-je faire pour aider mes frères et sœurs dans le monde ? » C'est pourquoi le Monitor est si précieux en orientant nos prières vers le monde.
Vous m'avez dit avant le début de cet entretien que votre nom figurait sur une puce électronique déposée à la surface de Mars. Pourriez-vous en dire plus à ce sujet? Je suppose qu'il faut y voir un lien avec ces grandes perspectives et ces grands rythmes de la vie dont vous parlez ?
Je m'intéresse à l'astronomie depuis toute petite. L'exploration de l'espace est l'une des entreprises humaines de pointe. Je suis devenue membre de la Planetary Society à ses débuts pour suivre cette exploration. La puce électronique comportait les noms de tous les membres de cette société à l'époque, et elle a été embarquée dans le Rover destiné à l'exploration de Mars, qui a atterri avec succès en 1983. C'est amusant de penser à la présence de cette puce tout là-haut !
Mais au-delà de cette anecdote, j'ai toujours aimé regarder vers le ciel. Cela m'attriste de savoir que des gens n'ont jamais contemplé la beauté d'une nuit étoilée, ou qu'ils ne savent rien du cosmos. J'aime cette impression d'immensité et les questions que cela amène à se poser. J'ai souvent pensé que lorsqu'on regarde juste à ses pieds, l'angle de vision est très étroit. Mais quand on regarde par la fenêtre, cet angle s'élargit considérablement, et plus encore la nuit. Il faut adopter un état de pensée tourné vers l'extérieur, qui repousse les limites de la compréhension. Mary Baker Eddy parle de « l'immensité de la Science Chrétienne » (Science et Santé, p. 330), et c'est là qu'il faut aller.
Une des qualités de Dieu est d'être infini. Combien de fois nous arrêtons-nous pour méditer ce fait, pour prolonger véritablement la réflexion à ce sujet, pour prendre pleinement conscience de la bonté, de la sagesse et de l'amour infinis de Dieu ? Et nous demandons-nous ensuite ce qu'implique l'infinité de Dieu dans notre existence ? Vaste idée qui nous fait sortir d'un sens limité de soi et de l'existence, et qui nous amène à mieux comprendre le dessein et les dons illimités de Dieu à notre égard. La compréhension de l'infinité de Dieu fait de nous des penseurs spirituellement proactifs.
Les penseurs spirituellement proactifs sont indispensables aujourd'hui car, de tous côtés, nous entendons dire que nous sommes pris dans le carcan du manque et des restrictions. Les ressources globales, l'énergie, l'eau, la nourriture, la santé, les finances, les emprunts immobiliers, tout n'est, semble-t-il, qu'une succession de croyances à la pénurie, aux restrictions, à la finitude. Or que faire face aux limites ? La réponse réside toujours dans une plus grande compréhension de Dieu, du fait qu'Il est infini et que, par conséquent, le bien est illimité ! Cette vérité force l'ouverture des prisons mentales. Ce ne sont pas là des paroles en l'air de ma part, car à trois reprises ma famille a connu une situation financière critique.
La première fois, c'était à cause d'une perte d'emploi liée à une période de récession. Mon mari n'avait du travail que pour quelques semaines encore. Il était architecte, et le gouvernement avait interrompu tous les chantiers dans le secteur du bâtiment. De grands cabinets d'architecture faisaient faillite. Nous avions deux enfants en bas âge et devions payer les intérêts d'un énorme emprunt immobilier. Qu'allions-nous faire ? Nous nous sommes réunis avec l'associé de mon mari et sa femme pour prier ensemble. En toute sincérité, même si les perspectives étaient sombres, nous n'avions pas peur. Nous avions tous les quatre une totale confiance dans les bienfaits ininterrompus de Dieu à notre égard. Chacun de nous a suivi les idées qui lui venaient en priant, acceptant un travail qu'il n'aurait sans doute jamais fait n'était la gravité de la situation. Mon mari a accepté un emploi à mi-temps consistant à enseigner l'architecture. Cette activité n'a cessé de prendre de l'ampleur au point de devenir la source de revenus principale de la famille durant les trente années qui ont suivi ! Ainsi n'avons-nous retiré que de bonnes choses de cette situation.
Nous avons connu une autre période critique juste au moment où je m'engageais dans la pratique publique de la guérison par la Science Chrétienne. Je savais qu'il me fallait comprendre comme jamais auparavant ce que signifiait l'infinité de Dieu. À mesure que cette compréhension s'approfondissait, lentement mais sûrement, toute ma façon de penser a changé. Notre situation s'est stabilisée, et chaque membre de la famille a accédé à «une sphère de pensée et d'action plus étendue », comme il est écrit dans Science et Santé (p. 265).
Votre vie en est certainement le reflet. Membre du Conseil des conférences pendant onze ans, vous avez donné des conférences dans vingt-deux pays. Impressionnant ! Quelles sont les nouvelles perspectives que vous avez acquises durant toutes ces années ?
Pour n'en citer qu'une, je dirais: la compréhension que nous sommes tous « un » en tant qu'enfants de Dieu. Si l'on cesse de considérer les hommes comme des mortels avec une histoire personnelle, on commence à discerner les fils et les filles de Dieu. Il devient alors facile de s'envoler vers un nouveau pays, une nouvelle culture, de rencontrer des gens qu'on ne connaissait pas, et de se parler cœur à cœur, où que l'on aille. C'est merveilleux de renoncer aux a priori culturels et nationaux, pour voir tout simplement ses frères et sœurs dans la famille universelle de Dieu. C'est un sentiment d'unité immédiat.
Avez-vous connu un moment particulièrement marquant lors de vos tournées de conférences ?
J'en ai connu beaucoup. Je me souviens notamment du jour où je devais m'adresser à un groupe de femmes dans une grande prison, aux États-Unis. Je n'avais aucune idée de ce que j'allais leur dire, c'était une situation nouvelle pour moi. Je me suis donc préparée en priant sincèrement pour voir clairement que chacune était l'enfant bien-aimée de Dieu. Arrivée sur place, après avoir passé toutes ces portes, qui se refermaient avec un bruit métallique derrière moi, j'ai ressenti un amour absolu pour chacune de ces femmes sans exception. Je me sentais vraiment à l'aise dans ce lieu, contrairement à tout ce que l'on pourrait imaginer. C'était si facile d'être avec elles, de leur parler, d'exprimer cet amour spirituel.
J'ai moi-même été surprise de voir comment agissait l'amour de Dieu. Par la suite, je me suis rendu compte qu'il m'aurait été parfaitement impossible de considérer ces femmes comme des criminelles ou comme des personnes ayant elles-mêmes été victimes d'actes criminels. Elles étaient à mes yeux tout autant les enfants de Dieu que les centaines de personnes que j'avais rencontrées auparavant dans le monde entier. À la fin, contre toute attente et de façon très touchante, un grand nombre d'entre elles sont venues me serrer dans leurs bras avant de quitter la salle.
Cette précieuse expérience m'a appris combien il est important de garder pure cette vision spirituelle de l'homme en toutes circonstances. Si nous y parvenions dans nos églises, dans notre famille, dans nos relations professionnelles, en politique, entre pays différents, imaginez quelles seraient les conséquences ! Nous avons en réalité le droit et la capacité qui nous vient de Dieu de voir la face des fils et des filles de Dieu, et de retirer silencieusement, mentalement et spirituellement tout masque recouvrant cette réalité. Le fait de maintenir ce point de vue transformerait littéralement notre famille, nos églises, notre gouvernement et le monde. Cette précieuse leçon m'a donné envie de me consacrer encore plus à ce but.
Vous parlez là de l'amour inconditionnel, n'est-ce pas ?
Absolument, et ce mot « inconditionnel » est vraiment remarquable. Il semble aller de soi quand on le prononce, mais son sens est vraiment profond.
Mary Baker Eddy écrit: « Le grand miracle, pour le sens humain, c'est l'Amour divin, et la grande nécessité de l'existence est d'acquérir la vraie idée de ce qui constitue le royaume des cieux dans l'homme. » (Science et Santé, p. 560) L'amour de Dieu est miraculeux en ce sens qu'il est inconditionnel. Jésus déclare: « Car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et il fait pleuvoir sur les justes et sur les injustes. » (Matthieu 5:45) Nous n'avons pas à mériter cet amour, il est déjà acquis. Nous pouvons tous le recevoir, nous identifier à lui, le laisser imprégner notre cœur et notre existence, savoir que nous sommes les bien-aimés de l'Amour. Et par extension, cela concerne tous ceux sur qui reposent nos pensées. C'est ce qui a inspiré Mary Baker Eddy dans sa propre œuvre de guérison.
On rapporte qu'elle aurait dit: « Je voyais l'amour de Dieu encercler l'univers et l'homme, remplir tout l'espace, et je voyais que l'Amour divin pénétrait tellement ma propre conscience que j'aimais tout ce que je voyais avec une compassion semblable à celle du Christ. » Nous avons connu Mary Baker Eddy, p. 43.
Il semble normal de se demander comment l'amour inconditionnel de Dieu à notre égard s'exprime concrètement, comment l'amour divin inconditionnel aménage et améliore de façon tangible notre expérience humaine.
C'est une réflexion tout à fait logique. Je crois que le secret, pour s'aimer et aimer les autres, consiste à trouver la voie du pardon. Les blessures qui se logent dans le cœur des gens font si souvent obstacle à cette lumière particulière. Mais posons-nous cette question: le pardon dépend-il juste d'une personne qui s'efforce de pardonner à une autre ? C'est bien là le nœud du problème, car cela paraît tout à fait impossible ! Mais à bien y réfléchir, on se rend compte que le pardon est autre chose. J'en ai eu la preuve un jour, et même si cela m'a pris un an et demi pour le comprendre, j'ai fini par recueillir « l'or dans le creuset ».
Après cette expérience, je me suis rendu compte, les larmes aux yeux, qu'il me fallait prier pour me pardonner à moi-même ! J'ai prié ainsi: « Père, pardonne-moi si je me suis considérée ou si j'ai considéré l'un de Tes enfants, quel qu'il soit, comme dissemblable à Toi. » C'était une prière profondément sincère, et un message lumineux est venu à ma pensée: « Il n'y a rien à pardonner. » Lorsque j'ai rouvert les yeux et essuyé mes larmes, j'ai su que ma pensée ne contenait plus aucun élément négatif. Tout avait été effacé, j'étais libérée ! Cette purification de mes propres pensées a remédié à la situation particulièrement pénible et délicate qui m'avait perturbée.
Si je comprends bien, vous avez dû étudier et prier avec ferveur durant toute une année et demie, tel le pianiste qui pratique son art avec lenteur, pour remédier à cette situation. Et votre persévérance vous a unie à cet autre grand rythme qui est celui de l'amour inconditionnel de Dieu, ce qui vous a libérée de la souffrance liée à l'absence de pardon.
Vous avez très bien résumé, c'est exactement cela. Durant cette rude épreuve, la douleur de sentiments blessés, la déception, tout un scénario complexe, revenaient sans prévenir, comme une tempête soudaine, dans mes pensées. J'approfondissais sans cesse cette idée de l'amour inconditionnel de Dieu de façon à pouvoir me défaire de tout sens personnel de blessure ou d'angoisse. J'ai fini par me dire que cette situation qui durait depuis si longtemps était certainement porteuse d'une merveilleuse leçon de vie. Bien entendu, c'était une leçon sur le pardon: arriver à me pardonner à moi-même ! Cette leçon figure dans les premières pages du chapitre « Pratique de la Science Chrétienne » dans Science et Santé: « Si le Scientiste a assez d'affection chrétienne pour gagner son propre pardon [...] alors il est assez chrétien pour traiter ses patients scientifiquement et user de compassion envers eux; et le résultat correspondra à l'intention spirituelle. » (p. 365)
Souhaiteriez-vous ajouter quelque chose pour conclure ?
Oui, juste une chose. Il y a toutes sortes de façons de découvrir l'amour du Christ, de trouver le chemin qui mène à la Science Chrétienne, de connaître la guérison. Nos cheminements peuvent être extrêmement différents, mais chacun possède une valeur et une beauté égales du point de vue de Dieu, notre Père-Mère céleste. Je pense souvent à cet homme qui était assis à la porte du temple surnommée la Belle (voir Actes 3). Il se croyait inutile, à regarder ainsi la vie de l'extérieur, exclu pour toujours du bien. Mais Pierre et Jean savaient que du point de vue divin, il était lui aussi le fils de Dieu. Après avoir été guéri, il se mit à sauter et à marcher avec eux dans le temple, en se réjouissant ! Cette histoire vit toujours dans notre cœur aujourd'hui; c'est la preuve que nous avons tous notre place dans le beau temple de la Vie, non pas à cause de notre histoire humaine, mais parce que nous sommes tous sans exception les bien-aimés de l'Amour, et héritiers à part égale dans le royaume des cieux.
