Traditionnellement, c'est au mois de janvier qu'on jette un regard critique sur son existence et qu'on se promet de faire mieux. Parmi les bonnes résolutions qu'on prend en début d'année, on trouve celles de maigrir un peu, faire de l'exercice physique de manière plus régulière, économiser, donner des nouvelles aux membres de la famille et aux amis ou progresser spirituellement.
Or, j'ai constaté qu'il est beaucoup plus facile de désirer changer que de changer vraiment. En ce qui me concerne, les bonnes intentions s'évanouissent rapidement si je ne prends pas conscience de la nécessité de m'engager mentalement avant que le changement puisse s'opérer.
On estime qu'un individu moyen a environ 60 000 idées par jour, mais que 95% de ces idées sont les mêmes que le jour précédent. Et encore la plupart d'entre elles ont-elles trait à des choses survenues dans le passé. Or, le passé, tel que je le conçois, est un récit onirique personnel souvent rempli d'idées et de souvenirs rebattus qui empêchent de vivre pleinement le présent.
A priori, la seule chose qui empêche quelqu'un de voir l'irréalité de ce rêve personnel, avec ses bons et ses mauvais côtés, c'est la réticence à s'affranchir du concept erroné de la réalité du rêve. Il paraît peut-être plus simple de s'accrocher au rêve que de s'efforcer de s'en libérer. Un raisonnement routinier nous prive trop facilement des idées neuves et libératrices auxquelles nous avons tous droit.
Alors comment peut-on se libérer et provoquer le changement désiré ? Je me réfère souvent au récit biblique de l'enfant prodigue, qui montre que Dieu ne nous abandonne jamais. Isolé, victime de circonstances terribles dont il porte la responsabilité, le jeune homme ne trouve l'inspiration et la libération qu'au moment où il prend conscience du fait qu'il sera toujours le fils bien-aimé d'un père miséricordieux. Une fois « rentré en lui-même », il abandonne sa « traversée du désert » pour être accueilli dans la demeure de son père et en retrouver la magnificence. La prise de conscience de son identité véritable est essentielle dans cette transformation (voir Luc 15:11-32). Ainsi que l'affirme Science et Santé: « Connais-toi toi-même, et Dieu te donnera la sagesse qu'il te faudra pour remporter une victoire sur le mal et Il t'en fournira l'occasion.» (p. 571)
De temps à autre, nous devons regarder en face des défauts de caractère admis depuis longtemps. Or, plus on repousse le moment de cette prise de conscience, plus il est difficile de corriger ces défauts, parce qu'ils s'arrogent un passé et une place dans la conscience.
Pourtant, d'un point de vue spirituel, croire qu'un comportement a un passé ne le rend pas plus réel ni plus difficile à changer. Peu importe si un concept erroné est admis depuis longtemps. Il s'efface immédiatement lorsque la vérité de la situation apparaît; tout comme le rêve prend fin lorsqu'on se réveille, même si on rêvait depuis longtemps. En physique, un principe semblable énonce que deux choses ne peuvent occuper le même espace, au même moment. En d'autres termes, quand la pensée est remplie d'idées nouvelles qui favorisent un changement de comportement, il ne reste pas beaucoup de place pour des souvenirs dépassés.
La simple volonté ne suffit pas à briser l'apathie qui enferme un individu dans des schémas de raisonnement rigides et des attitudes enracinées. Mary Baker Eddy a bien expliqué dans ses écrits que ressasser le passé entrave les pensées tournées vers l'avenir: « L'histoire humaine a besoin d'être révisée, et le souvenir matériel effacé. » (Rétrospection et introspection, p. 22) Pour moi, effacer ne veut pas simplement dire gommer. Cela veut dire faire table rase de tout souvenir qui empêche d'accepter ce qui est nouveau.
Par exemple, quand un professeur efface un tableau, il reste de la poussière de craie. Mais si le tableau est nettoyé à l'aide d'un chiffon humide, le professeur a tout de suite une surface vraiment propre sur laquelle écrire.
Alors quelles pensées effacer ? Et comment ? À l'instar des disciples de Jésus, qui étaient pêcheurs, il faut être prêt à abandonner les filets de la pensée et des activités humaines pour suivre le Christ. Il faut donner la priorité aux activités qui permettent de faire de la place à l'apparition de la Vérité dans la conscience et d'être à l'écoute.
Je me souviens d'un moment dans ma carrière professionnelle, où, au terme d'un projet, il m'a fallu trouver un nouvel emploi. Je priais chaque jour afin de mieux écouter et de rester vigilant pour ne pas manquer les messages que Dieu nous dispense constamment.
... Croire qu'un comportement a un passé ne le rend pas plus réel ni plus difficile à changer.
... Quand la pensée est remplie d'idées nouvelles qui favorisent un changement de comportement, il ne reste pas beaucoup de place pour des souvenirs dépassés.
Deux possibilités se sont bientôt présentées. L'une consistait à reprendre un poste très intéressant d'un point de vue financier, dans une compagnie où j'avais déjà travaillé pendant treize ans, où je connaissais presque tous les employés et avais bénéficié de généreuses compensations. L'autre me donnait l'occasion de rejoindre une société à but non lucratif où je ne connaissais personne, n'avais aucune expérience et où tout en était au stade de la conception, sans directives ni objectifs bien définis. Toutefois, cet autre emploi promettait de me donner la possibilité d'enrichir la vie de nombreuses personnes.
Je ne savais quelle option choisir, et je priais pour être guidé. J'étais taraudé par le souci de subvenir aux besoins de ma famille et d'assurer notre sécurité matérielle, mais mes prières m'ont vite dirigé vers la société à but non lucratif. Peu à peu, il est devenu évident que la sécurité, au meilleur sens du terme, c'est d'être où Dieu veut que nous soyons. Et la prière nous conduit souvent à abandonner les schémas familiers et dépassés de notre vie pour que nous exprimions notre individualité la plus élevée, au lieu d'aller dans la direction qui paraît la plus confortable et vers laquelle le raisonnement humain nous entraîne.
J'ai pensé à Abram dans la Bible et à son désir d'obéir aux directives données par Dieu, quand il lui fut commandé: « Va-t-en de ton pays, de ta patrie, et de la maison de ton père, dans le pays que je te montrerai. » Il est clair qu'il s'agissait là de quitter tout ce qui était familier et sécurisant dans l'existence d'Abram. Il lui était demandé d'aller s'installer sur un territoire nouveau et inconnu. Et le récit continue ainsi: « Abram partit, comme l'Éternel le lui avait dit... » (Genèse 12:1,4)
La confiance totale d'Abram dans les directives divines m'a beaucoup inspiré et aidé. Afin de choisir la voie à suivre, je me suis servi de « questions corollaires » qui s'étaient avérées extrêmement précieuses lorsque j'avais eu des décisions similaires à prendre au cours de mon existence. Je me suis demandé quelle activité allait favoriser le plus mes progrès spirituels et quelle activité allait bénir le plus grand nombre de gens.
La réponse était évidente. J'ai accepté le poste offert par l'association à but non lucratif et j'ai prié à chaque pas en entrant dans ce territoire inconnu. Armé de la ferme conviction que Dieu me dirigeait et me protégeait constamment, j'ai vu des portes s'ouvrir, des besoins et leurs solutions se révéler, et des gens nécessaires à l'exécution de missions diverses se présenter presque comme à mon signal.
J'ai eu la possibilité de participer à des activités nouvelles et passionnantes auxquelles mon expérience passée ne m'avait pas préparé, et qui ont élargi ma façon de penser. Il est vrai que je ne me sentais guère prêt à affronter les difficultés de mon nouvel emploi. Pourtant, à la fin de chaque projet, j'ai constaté combien Dieu m'avait surpris en apportant à mes prières de merveilleuses réponses, et en me guidant infailliblement vers la direction à suivre. Et à l'instar du bouchon de liège qui flotte sur l'eau, en raison de ses caractéristiques naturelles, j'ai compris que j'avais des qualités données par Dieu qui me maintiendraient la tête hors de l'eau, où que je sois et quoi que je fasse.
Mon existence s'est même améliorée au cours des années qui ont suivi, et je suis à présent reconnaissant pour l'époque passionnante dans laquelle nous vivons aujourd'hui, notamment pour l'expansion et l'accessibilité dynamiques de l'information dans le monde entier. Le futurologue Juan Enriquez pense que nous sommes « aux premières loges d'un mouvement de renaissance ». Voici ce qu'il écrit: « Au cours des cinq prochaines années, nous allons doubler le volume des données jamais générées par les hommes au cours de l'histoire. » (Worth magazine, octobre 2005) Chaque jour, de plus en plus, je prends pleinement conscience du fait que nous vivons dans un monde d'idées, dont un grand nombre peut inspirer, aider et guérir le genre humain. Je comprends combien il est important d'être vigilant et spirituellement actif. Et je suis plus convaincu que jamais qu'il est impératif de faire de la place aux nouvelles idées en se débarrassant de celles qui sont obsolètes et qui nous empêchent de progresser spirituellement.
À un moment donné, j'habitais dans une région rurale, dans une vallée avec beaucoup de vignes. Chaque automne, les vignes étaient taillées. Chaque printemps, de nouveaux sarments poussaient, et c'est seulement sur ceux-là que les fruits apparaissaient. De la même manière, comme les grappes de raisin sur les nouveaux sarments, l'inspiration que nous apportent la prière et l'étude entraîne avec elle une croissance nouvelle, un changement essentiel et une vision qui guérit, cette année comme toutes les années.
