« Ne crains point, car je suis avec toi » (Gen. 26:24)
C’était en juillet 1940; j’étais à peine sortie de l’enfance. Mon père m’avait demandé d’aller à vélo voir si des membres de la famille habitant à cinq ou six kilomètres de chez nous étaient de retour de l’évacuation. J’ai obéi.
Mes parents m’élevaient dans l’amour de Dieu et de la Bible. Depuis toute petite, les vérités contenues dans les Écritures m’ont toujours soutenue, protégée, sauvée. Je connaissais bien le passage de la Bible où l’Éternel se présente à Isaac et le bénit avec ces mots: « Ne crains point, car je suis avec toi. »
Alors, seule en vélo sur la route, je chante des cantiques à tue-tête, heureuse que Dieu soit toujours avec moi. A michemin, un car avec deux soldats allemands me dépasse et stoppe. Le conducteur me fait des signes avec les bras. Pensant qu’il demande de l’aide, je m’arrête et descends de bicyclette. Je me dis que même si je ne connais pas sa langue, je pourrai faire quelque chose. Il me conduit au fond du car. Là, je vois l’autre soldat, déshabillé, qui m’attendait. Étant très innocente, je ne comprends pas ses intentions, mais je suis horrifiée. Je crie: « Père, sauve-moi ! » et je parviens à m’échapper. Mais au moment où je reprends mon vélo, poursuivie par le soldat, je sens nettement que je dois faire face, plutôt que fuir.
Je me retourne donc, et je fais face au soldat allemand, stupéfait, qui m’avait rattrapée. Je n’ai plus peur, certaine que Dieu est là. Je prie un instant les yeux fermés. Quand je les rouvre, je vois sur la boucle du ceinturon du soldat l’inscription « Gott mit uns » (Dieu avec nous). Alors, je lui dis, en français, que Dieu est avec nous tous, qu’Il nous aime et qu’ils ne peuvent me faire de mal. Je mime le bercement d’un petit enfant. Des larmes coulent sur ses joues. Dieu l’a touché. Lui, moi, son camarade qui arrive en se rhabillant, nous sommes sauvés: je ne suis pas devenue leur victime et ils n’ont commis aucun crime.
Je reprends ma route. Les soldats m’arrêtent une nouvelle fois, mais cette fois-ci c’est pour me donner des victuailles et même une barre de chocolat, ce qui est très précieux pour l’époque. Quand nous nous quittons, nous sommes trois à être libérés et heureux !
Devenue adulte, j’ai rencontré la Christian Science, et mon amour de la Bible n’a fait que grandir encore.
Saint-Maurice, France
