Notre voisin hurlait des obscénités en faisant rugir son pick-up d'avant en arrière sur notre moitié de la bande de terrain qui sépare notre allée de la sienne. Mon mari et moi n'avions pas réalisé combien il était opposé à la pelouse que nous y avions plantée. Bien que les deux parties se soient efforcées de parvenir à un accord, maintenant la crise était proche. La guerre était déclarée dans notre petit coin des États-Unis.
Après ce manège, notre voisin a démarré comme une fusée pour partir à son travail. Mon mari et moi disposions heureusement de toute la journée pour réfléchir à ce que nous allions faire ensuite. Face aux dommages causés à notre terrain, aux propos calomnieux et aux accusations publiques que nos voisins avaient entendus, la tentation était grande de réagir sous le coup de l'émotion. Toutefois, nous avons toujours choisi la voie de la paix, sous une forme ou une autre.
Nous avons décidé que la façon d'établir la paix dans cette situation pourrait débuter par un sentiment de compassion pour nos voisins. Nous étions conscients qu'ils étaient tous deux soumis à une grande tension. Mari et femme travaillaient, ainsi que leurs trois enfants adolescents. Il y avait des allées et venues continuelles chez eux, à toute heure du jour et de la nuit. Bien que nous ne pensions pas nécessairement avoir fait quelque chose de mal, mon mari a décidé d'écrire une lettre d'excuses au sujet de cette mésentente. Non seulement a-t-il accepté d'en porter la responsabilité, mais il a également exprimé le désir de trouver une solution satisfaisante pour les deux parties.
En pensant à cet incident, je me suis rappelé l'unique endroit dans la Bible où il est expressément question de « ceux qui procurent la paix ». C'est dans l'une des Béatitudes que Jésus nous a données dans son Sermon sur la Montagne: « Heureux ceux qui procurent la paix, car ils seront appelés fils de Dieu !» (Matthieu 5:9) Pour moi, cette affirmation est libératrice, car l'expression employée suggère que la paix est moins une loi morale qu'une promesse divine. C'est la promesse que quiconque soutient la paix fera partie des enfants précieux de Dieu. Et qu'il suffit de mettre en pratique cette volonté de procurer la paix pour en retirer les bénéfices.
Quel meilleur exemple à suivre que celui de l'homme qui a prononcé ces mots ? Jésus a vécu en paix avec les Samaritains, des étrangers qui étaient considérés par les Juifs comme des proscrits, et il les a même enseignés et guéris. Il s'est montré un pacificateur avec les troupes romaines, lorsqu'il a guéri le serviteur d'un centenier. Quand on l'a mis en face d'une femme prise en flagrant délit d'adultère, Jésus a aidé ses accusateurs à comprendre qu'ils n'avaient aucun droit de la menacer physiquement, et ils se sont retirés sans discuter. Dans tous ces exemples, Jésus a opté pour une solution pacifique et cela a toujours eu pour résultat la guérison.
Il est très utile d'examiner les fondements sur lesquels reposent les démonstrations concrètes que Jésus a accomplies en faveur de la paix. Depuis son enfance, il lisait les Écritures hébraïques. Il est certain que la conception qu'il avait de la paix venait, au moins en partie, de la compréhension du mot sémite shalom que l'on traduit habituellement par « paix » dans l'Ancien Testament. Utilisé à la fois comme formule de bienvenue et d'adieu, shalom implique la demande constante d'apporter bienfaits et harmonie dans toutes les relations, depuis le moment où l'salue jusqu'au moment où l'on se quitte. Il est intéressant de noter à cet égard la façon dont ce verset du Livre des Psaumes donne la paix comme l'équivalent de la force: « L'Éternel donne la force à son peuple; l'Éternel bènit son peuple et le rend heureux [lui donne la paix, d'après la version King James]. » (Psaume 29:11) Il est clair qu'apporter la paix va bien plus loin que répandre joie et bonne volonté. Sherman Johnson, spécialiste de la Bible, dit: « “La paix” dans l'Ancien Testament signifie davantage que la simple absence de conflit; c'est un bien-être personnel et social, au sens le plus large de ce mot. » (The Interpreter's Bible – Nashville, Tennessee: Abingdon Press, 1951-1957, Vol. 7, p. 286)
La Concordance de la Bible de Strong suggère que le mot grec qui signifie la paix vient du verbe « réunir ». Apporter la paix impliquerait alors l'unification. Un seul Parent divin, une seule famille. Ainsi, un pacificateur reconnaît qu'avec ce divin Parent, tous les hommes sont frères et sœurs, et sont par conséquent à même de se voir, et de voir les autres, en tant qu'enfants de l'unique Dieu. Cela rappelle ces mots de Jésus au début de la Prière du Seigneur: « Notre Père ». Nous sommes tous des enfants du même Père. Cela signifie simplement que la récompense que nous recevons lorsque nous apportons la paix est de reconnaître notre identité en tant qu'enfants de Dieu, comme le proclame la deuxième partie de la Béatitude. J'aime aussi beaucoup penser à la façon dont cette Béatitude fait bien comprendre l'appréciation que Jésus avait de l'innocence, de la réceptivité et de la tendresse de chacun en tant qu'enfant de Dieu.
Nous voici maintenant cinq ans après le fâcheux incident avec les voisins. Les voisins sont les mêmes, mais nous sommes devenus très bons amis. La bande de terrain entre nos deux allées est recouverte du style de plantation que notre voisin souhaitait. Notre récompense, toutefois, c'est que c'est lui qui l'entretient entièrement. Mais plus important encore que tout cela, c'est la bonne volonté qui règne entre nos deux familles. Chacun rend service à l'autre, et nous éprouvons du respect les uns pour les autres. Quelle récompense d'avoir refusé la bagarre, et au contraire d'avoir cherché une solution pacifique et tenté de comprendre le point de vue de l'autre partie !
Une des leçons que j'ai apprises de cet incident est que cet autre conseil de Jésus, à savoir tendre l'autre joue, est vraiment basé sur le fait de procurer la paix. Cela suggère qu'il faut faire ce qui est nécessaire pour apporter la paix, même si l'on ne méritait pas l'affront subi. La paix implique la réconciliation, là où régnaient la séparation et la haine. Une réconciliation qui exige de regarder au-delà du passé. Bien sûr, cela ne signifie pas que l'on doive tout accepter lâchement. Mais avoir confiance que Dieu a une réponse qui bénira chacun de nous ouvre toujours la voie à une solution pacifique.
Et qui sait ? Peut-être que quelqu'un vous proposera de tondre une partie de votre pelouse, à vous aussi.