Sais-tu que le mot « éduquer » vient du latin educere qui veut dire « faire ressortir » ?
Non, je ne le savais pas. Et surtout, je ne m’attendais pas à ce qu'une conversation entre amies tourne à l’étude de la racine des mots !
« Éduquer », a ajouté l’amie en question, ne veut pas dire ajouter un bagage de notions à quelqu'un qui ne sait rien du tout. « Éduquer » signifie plutôt faire monter à la surface ce qui est déjà là.
C’était comme si une lumière venait de s’allumer. J’avais le sentiment de comprendre pour la première fois la notion d’éducation. Et cette « révélation » n’aurait pas pu venir à un meilleur moment. J’attendais mon premier enfant et j’avais besoin d’entendre cela. J’avais passé et repassé bien des questions dans ma tête, et jusque-là je n’avais pas trouvé de réponse satisfaisante à ce sujet. Mais tout à coup j’avais un concept auquel m’accrocher. Un grand fardeau me tombait des épaules.
Je venais de découvrir que je n’avais pas tout à faire, tout à créer. L’enfant allait arriver en portant ce dont il/elle aurait besoin dans la vie. Tout était déjà là. Mon rôle consistait donc à reconnaître le potentiel inné de l’enfant et à le lui faire découvrir, puis à l’aider à le développer.
Il va sans dire que cette vision de l’éducation continue à m’inspirer. Parce qu’elle vient appuyer une vérité spirituelle que je chéris profondément: l’éternité de la vie. Considérer que la naissance d’un enfant c'est le début de sa vie revient à dire qu’il n’y avait rien avant. Que l’enfant ne commence à exister qu’au moment de l’accouchement. Cela revient en somme à penser qu’il n’y a pas d’existence en dehors d’un cycle biologique.
Cette perspective ne m’a jamais satisfaite puisqu’elle implique aussi que la mort met un point final à la vie. Par contre, une perspective spirituelle de la vie, dont Dieu est l’origine, change les données de l’équation. Elle m’a aidée à découvrir que l’enfant qui naît a en réalité toujours vécu (et vivra toujours) en présence de Dieu. Dieu étant la source de toute connaissance et de toute intelligence, les enfants (et chacun de nous en fait) puisent naturellement à cette source. Alors voilà que l’acte d’éduquer, en faisant ressortir ce qui est déjà là, devient logique. Mais comment s’y prendre ? Par où commencer ?
Je dirais que la première chose à faire c’est de commencer par soi-même, en se rendant compte que la nature de chaque enfant est entièrement spirituelle. En reconnaissant d’abord la pureté, la bonté et la beauté inhérentes à chacun, nous pouvons ensuite montrer à l’enfant qu’il a la capacité de les reconnaître aussi en lui-même et chez les autres. Penser qu’un enfant est méchant, lent ou impossible, ce n’est pas l’éduquer. C’est le classer dans des catégories qui vont l’emprisonner peut-être pour le reste de son existence. Par contre, reconnaître sa nature spirituelle c’est une façon de l’encourager et de l’aimer sans réserves.
Cette démarche pourrait sembler utopique lorsqu’on est confronté à un enfant difficile. Toutefois, si vous lisez les pages suivantes dans ce magazine, vous découvrirez que la reconnaissance de la perfection de tout ce qui procède de Dieu apporte des résultats extraordinaires. Même les médias nous montrent parfois l’exemple de professeurs qui ont reconnu le potentiel d’un mauvais élève et qui non seulement l’ont sorti de situations pénibles, mais lui ont ouvert des horizons inespérés. Croire aux capacités illimitées de ceux que l’on éduque leur donne en quelque sorte des ailes.
J’ai aussi constaté l’importance d’apprendre aux enfants à prier et à leur donner envie de comprendre vraiment qui est Dieu. Depuis ma découverte, il y a quelques années, de la signification spirituelle de l’éducation, j’ai eu deux enfants. J’ai su très rapidement que mes filles non seulement n’allaient pas être toujours avec moi, mais aussi qu’elles allaient rencontrer des problèmes que, même avec toute ma bonne volonté, je ne pourrais pas résoudre pour elles. J’ai donc voulu leur donner des outils qui leur permettraient de faire face aux situations de la vie.
Je leur ai parlé de leur capacité à se tourner vers Dieu pour être protégées du danger, guidées dans leurs décisions, guéries physiquement et émotionnellement. Je les ai encouragées à aimer la Bible et à y trouver des récits qui offrent des idées pratiques pour notre vie quotidienne. Je leur ai aussi demandé d’apprendre à reconnaître et à suivre cette voix intérieure (que j’appelle le sens spirituel) qui nous dit ce qui est bien ou ce qui ne l’est pas, qui nous met en garde s’il le faut ou nous fait faire la bonne chose. Cette voix intérieure vient directement de notre vrai Père-Mère, notre origine, Dieu.
Mary Baker Eddy, qui a fondé ce magazine, parle du sens spirituel en ces termes: « Le sens spirituel est la faculté consciente et constante de comprendre Dieu. » (Science et Santé, p. 209) Cette faculté est inhérente à tout enfant. J’ai souvent été surprise de voir à quel point les enfants comprennent tout naturellement l’amour de Dieu et se tournent vers cet amour sans réserves.
J’entends encore la question de ma cadette, à cinq ans, s’inquiétant de savoir ce qu’elle devrait faire si elle était kidnappée par un inconnu. Je me souviens avoir ressenti une grande paix en lui répondant que ce serait une situation très grave mais qu’elle pourrait immédiatement se tourner vers Dieu de tout son cœur et savoir quoi faire. Parce que Dieu serait avec elle, même dans cette situation.
Et il y a quelques jours, j’ai été touchée par une remarque de mon aînée lorsqu’elle est rentrée de son premier week-end de ski avec un groupe d’amis. Elle m’a remerciée de lui avoir fait comprendre l’importance de prier dès le réveil et d’étudier la Leçon bibilique hebdomadaire, qui contient des passages de la Bible et de Science et Santé de Mary Baker Eddy. Elle m’a dit que la prière l’a aidée à se sentir en sécurité, lorsqu’elle a entendu dire que 50 personnes par jour étaient victimes d’accidents sur les pistes de ski où elle se trouvait. Elle s’est souvenue qur nous avions parlé du fait qu’elle vivait constamment comme dans une grande bulle, où l’amour de Dieu l’entourait de toutes parts. Elle a senti que cela la réconfortait et la protégeait.
Ce que je constate c’est qu’en cultivant la spiritualité des enfants, on leur donne une éducation pratique grâce à laquelle ils acquièrent de l’indépendance, de l’assurance et surtout l’estime de soi et le respect des autres. Ces éléments, lorsqu’ils ne sont pas développés, sont reconnus comme étant à la racine des problèmes auxquels fait face la jeunesse.
On pourrait encore se demander quel est le but ultime de l’éducation. L’idée d’élever le caractère me vient tout de suite à l’esprit.
Mais je crois qu’il y a plus. L’éducation, en fin de compte, ne peut être limitée à quelques années de l’enfance et de la jeunesse. Ni être entièrement entre les mains des parents et des enseignants. Découvrir qui on est réellement et le porter à la surface est un processus continu. Et nous pouvons compter sur Dieu pour nous enseigner ce qu’il nous faut apprendre. Je pense que l’apôtre Paul dans son épître aux Éphésiens, dans la Bible, exprime bien jusqu’où on peut aller: jusqu’à « l’état d’homme fait, à la mesure de la stature parfaite de Christ » (4:13).
En réalité, nous sommes déjà cet « homme fait ». Nous avons déjà la « stature parfaite du Christ », l’idée spirituelle de l’Amour divin. Toutefois, s’éveiller à ce fait c’est le privilège de tous (bien entendu, chacun à son rythme et à sa manière) et le résultat ultime de l’éducation.