Dans le Parc floral de Paris, il y a un petit rhododendron rose qui marque l'arrivée du printemps, ainsi que deux blancs et un rouge noirâtre, les derniers qui résistent à l'arrivée des fortes chaleurs. Je m'y rends souvent. Un jour, par une journée de fine brume, j'ai pensé à mes rhododendrons. C'était le temps idéal pour les photographier et je suis donc parti avec mon appareil photo.
Je me trouvais devant un grand arbuste aux fleurs pourpres. Des gouttes de brume brillaient sur chaque fleur et sur chaque feuille; l'arbuste avait l'air de danser dans les rayons de soleil. J'ai pensé tout de suite au mot grec doxa, qui rend dans le Nouveau Testament l'idée de la gloire de Dieu, de Son rayonnement. Je me trouvais, j'en étais certain, devant un symbole de la doxa divine, et la photo que j'avais prise serait la meilleure dans l'histoire des rhododendrons !
Mais, quand j'ai regardé les photos, plus tard, je n'ai pas retrouvé la « meilleure ». Aucun rhododendron en particulier ne dansait dans les rayons de soleil, mais tous étaient d'une égale beauté. En fait, je n'avais pas besoin d'attendre un rayon de soleil pour apprécier ces fleurs que j'aime. Elles sont belles sous toutes les lumières. Elles m'ont donné à penser que le rayonnement de Dieu m'enveloppe et enveloppe chacun, aussi bien dans la brume et dans l'ombre que dans le soleil.
Il est d'usage de traduire le grec doxa par « gloire », mais à l'époque du Nouveau Testament, le mot veut dire tout ce que les humains peuvent saisir en matière d'idées, de vérité, du bien, de beauté, de perfection, autrement dit leur perception des idées spirituelles, des manifestations divines.
Souvent, nous avons l'habitude de juger les autres en considérant les aspects matériels, extérieurs et transitoires — richesse, hérédité, réussite — et d'admirer des champions olympiques ou des stars du petit écran. Par contre, lorsqu'il s'agit d'un ami, ce sont plutôt les qualités intérieures que nous apprécions. Dans Science et Santé avec la Clef des Écritures, Mary Baker Eddy écrit: « L'Amour ne perd jamais de vue la beauté. Son auréole repose sur son objet. On s'étonne qu'un ami puisse jamais paraître autrement que beau. » (p. 248)
Je me suis demandé tout de suite: et moi, ai-je besoin du soleil, de la réussite ou d'acclamations pour rayonner dans la doxa de Dieu ? Ne suis-je pas toujours l'homme bien-aimé de Dieu ? J'ai appris dans la Science Chrétienne que l'Amour éternel, qui est Dieu, se manifeste à travers moi, comme en tous, montant des profondeurs du royaume de Dieu.
Jésus, parlant à ceux qui étaient venus l'écouter, notamment des Pharisiens, déclara en effet: « Le royaume de Dieu est au-dedans de vous. » (Luc 17:21, d'après la bible King James) Mary Baker Eddy cite cette expression ou y fait allusion au moins vingt fois dans ses écrits et donne la définition suivante du « royaume des cieux »: « Le règne de l'harmonie en Science divine; le royaume de l'Entendement infaillible, éternel et omnipotent; l'atmosphère de l'Esprit, où l'Ame est suprême. » (Science et Santé, p. 590)
Jésus voyait la présence du royaume de Dieu dans la nature véritable de chaque homme, qu'il s'agisse des Pharisiens, ou des personnes qu'il a guéries ou ressuscitées. Il a perçu la glorieuse doxa de l'Amour, de l'Esprit, et de la Vie exactement là où les sens matériels voyaient tout autre chose. Quand il a appelè les Pharisiens des « hypocrites », ou acteurs dans un drame (sens originel du mot grec), il les a sommés d'abandonner leur duplicité, leur personnalité « supérieure » fictive, et de revêtir ce que l'apôtre Paul appellera « la simplicité qui est en Christ » (II Cor. 11:3, d'après la version King James) — en laissant transparaître leur vraie doxa.
Mary Baker Eddy décrit ainsi cette révélation de la vraie nature spirituelle et parfaite de l'homme: « La manifestation de Dieu à travers les mortels est comme la lumière passant à travers la vitre. La lumière et la vitre ne se confondent jamais, mais en tant que matière, la vitre est moins opaque que les murs. L'entendement mortel à travers lequel la Vérité paraît avec le plus d'éclat est celui qui a perdu beaucoup de matérialité — beaucoup d'erreur — afin de mieux laisser transparaître la Vérité. Alors, tel un nuage se fondant en une vapeur légère, il ne cache plus le soleil.» (Science et Santé, p. 295)
Tout ceci m'a conduit à revoir ma façon de considérer les autres: est-ce que je vois par exemple des personnes pauvres, laides ou ensevelies sous le poids de toutes sortes de problèmes ? Ou est-ce que je m'applique à suivre le Christ en m'efforçant, comme Jésus l'a montré, de percevoir toutes les qualités spirituelles que les autres, comme moi-même, possédons en réalité et qui constituent le royaume de Dieu, même si elles semblent parfois cachées par « la vitre opaque » de l'entendement mortel ? En fait, je dois laisser rayonner la doxa parfaite de Dieu: sa joie, son amour, son harmonie, sa reconnaissance, sa santé, sa beauté.
Alors ? Avons-nous besoin d'un soleil éclatant, d'une grande victoire personnelle, d'une belle réussite extérieure pour rayonner de joie ? Non, car nous rayonnons déjà. Mary Baker Eddy écrit dans Unité du Bien: « Cette Science de Dieu et de l'homme est le Saint-Esprit, qui révèle et soutient l'harmonie ininterrompue et éternelle de Dieu et de l'univers. C'est le royaume des cieux, le règne toujours présent de l'harmonie dès maintenant avec nous.» (p. 52)
Laissons rayonner en toute simplicité et humilité les glorieux dons du Christ, car le vaste royaume de Dieu, de l'Amour divin, est pur, parfait, indéfectible, tout autour ... et au-dedans !