Des immeubles bombardés, des visages de civils terrorisés, de courageux soldats venant en aide à des enfants dans des rues remplies de fumée... ces images vues à la télévision me perturbaient, et je me suis mise à prier. Elles contrastaient violemment avec le mouvement paisible du hamac qui se balançait dehors, devant la fenêtre de la cuisine. Je me suis demandé: « Où le ciel bleu et serein finit-t-il exactement et où commencement les nuages noirs de la guerre ? Que puis-je faire pour promouvoir la paix ? Est-ce que je peux changer quelque chose ? Qu'est-ce qu'aurait fait Jésus, et qu'a-t-il fait ?
Après quelques recherches sur la vie de Jésus, je me suis aperçue non sans surprise que son ministère s'est déroulé dans un contexte de guerre: la Palestine se trouvait en effet sous la tutelle de l'Empire romain qui engageait sans cesse des batailles pour conquérir de nouveaux territoires; d'autres peuples se rebellaient pour reprendre le contrôle des terres qu'ils avaient perdues, et il y avait ainsi en permanence une lutte sans merci pour la domination. Un grand nombre de Juifs croyaient que leur pays, qu'on appelle aujourd'hui Israël, ne devait être gouverné que par un roi juif, descendant du roi David. Il n'était donc pas étonnant que le peuple juif aspirât à l'avènement du Messie pour former une armée et chasser les Romains.
Le Messie qu'on attendait depuis si longtemps est effectivement apparu sur la scène tourmentée de ce mondelà, mais Jésus n'est pas arrivé tel un roi guerrier. En fait, il n'a pas affronté directement la guerre, mais il a plutôt enseigné à ses disciples ce que voulait dire être en paix: aimer ses voisins, ses ennemis – un la fois, pas à pas et une pensée après l'autre. Quand il été pris dans une tempête terrible en mer avec ses disciples, quand il a ordonné « Silence ! (Paix dans la version King James de la Bible en anglais) Tais-toi ! Et [qu'] il y eut un grand calme », ces paroles ne s'adressaient pas tant aux vents violents qu'à l'orage épouvantable qui sévissait à l'intérieur de la pensée des disciples. (Marc 4:36-41)
En calmant leurs pensées, il changea le monde plein de turbulences qui les environnait en un univers paisible. Contrairement à un guerrier partant pour la bataille et détruisant des vies pour établir son royaume, Jésus guérissait les gens et ressuscitait même les morts. Au cours de sa vie, il s'est montré à la hauteur de son titre prophétique de Prince de la Paix.
Pendant que je faisais des recherches sur le ministère de Jésus, j'ai également étudié sérieusement cette injonction tirée de Science et Santé avec la Clef des Écritures: « Gardez la porte de la pensée. N'admettez que les conclusions dont vous voudriez voir les effets se réaliser sur le corps, et vous vous gouvernerez harmonieusement. » (p. 392) Je me suis attachée à remplacer les idées négatives qui se glissaient dans ma pensée par la réalité spirituelle suivante: Dieu est Amour, et l'identité spirituelle de chacun, telle qu'elle est décrite dans la Genèse, est l'image ou réflexion divines, pas simplement certains hommes et femmes dans certaines situations, mais chacun de nous, y compris les enfants, et dans toutes les situations.
Au début j'ai trouvé difficile de veiller sur ma pensée, en bonne sentinelle, car les défis qui se présentaient étaient souvent très subtils: un conducteur me coupant la route, un vendeur impoli, ou simplement le sourire équivoque d'une personne... Toutefois, à force de remplacer des pensées négatives par des faits spirituels, j'ai constaté une énorme différence: ce changement de pensée a amené calme et même joie dans mon quotidien. J'ai pris également conscience que de penser aux raisons pour lesquelles quelqu'un a tort, ou ne se comporte pas bien, prend davantage de temps que de reconnaître sa perfection spirituelle.
Le temps gagné de cette manière m'a permis de noter des idées sur la façon d'établir la paix. Je pouvais par exemple m'efforcer de comprendre plus clairement que la paix est déjà là à tout instant, dans l'éternel présent; je pouvais prendre conscience que la paix s'établit entre les personnes lorsque nous pardonnons et comprenos que le fait de s'aimer les uns les autres s'inscrit dans notre amour envers Dieu. Enfin, je pouvais affirmer, en le pensant profondément, que la paix entre les peuples commence dans notre pensée lorsque nous considérons le monde comme une unique communauté gouvernée par l'amour de Dieu.
Puis un jour, alors que j'étais attablée dans un restaurant, j'ai entendu des bribes de conversation: « Je lui en veux terriblement, et c'est sûr que je ne vais pas l'appeler de toute la semaine ! », ou « Ma tante a été si désagréable avec moi que c'est fini, je ne veux plus la voir », ou encore « On ne se parle déjà plus, et personnellement, cela ne me dérangerait pas que ça continue ! ». J'ai vu soudain à quel point il est vrai que la paix commence chez soi.
Mais que se passerait-il dans nos rencontres de chaque jour, nos divergences familiales, nos frustrations par rapport aux collègues ou dans la rue, si nous suivions avec persistance l'exemple de Jésus, lui qui ne négligeait aucune occasion, même supposée mineure, de prendre soin de son prochain ? Que se passerait-il si nous les voyions comme autant d'occasions d'amener la paix dans le monde ? Et par la paix, je ne veux pas dire de façon superficielle, mais en exprimant réellement ce que les premiers chrétiens appelaient agapè, terme grec signifiant l'amour pensé et exprimé à l'égard de chacun, l'amour fraternel à l'image de celui qu'a Dieu pour l'humanité.
Jésus nous a dit très clairement ce que nous devons tous faire pour trouver la paix: « Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent, faites du bien à ceux qui vous haïssent, et priez pour ceux qui vous maltraitent et qui vous persécutent.» (Matth. 5:44) Et cela s'applique tout autant à une tante désagréable qu'à des pays en guerre ! Par la spiritualisation et l'élévation de notre pensée, ne ferons-nous pas ainsi comme Jésus, qui a fait avancer le monde vers la paix ?
Voici une autre résolution que j'ai prise, réaliste et à ma portée. J'ai présenté à ma classe d'école du dimanche toutes ces idées que j'avais apprises et mises en pratique au quotidien. Après avoir parlé longuement de la paix, ces adolescents ont décidé d'un commun accord de guérir au moins un problème relationnel chaque semaine. En l'espace de quelques semaines, nous avions une bonne liste de guérisons: les élèves ont identifié le comportement qu'ils avaient adopté et qui avait amené la guérison, tel qu'écouter, éviter de juger, exprimer l'amour et l'empathie, ou encore donner des preuves de gratitude, et apprécier l'action des autres. Ils ont constaté avec surprise la fréquence avec laquelle ils avaient jugé autrui à mauvais escient, et à quel point ils se sentaient bien lorsqu'ils cessaient de le faire et qu'à la place, ils aimaient.
Nous étions tous d'accord que cette transformation de la pensée, cette concentration sur l'amour pour autrui, constituaient le chemim de la paix pour le monde entier. Nous avons également appris qu'il était nécessaire de pratiquer de façon persistante l'amour fondé sur la spiritualité, qu'il requérait de l'humilité, de la patience et un profond désir de parvenir à la paix. Lorsque nous nous sentons fatigués, frustrés et abattus, il est tentant de dire que nous allons tout laisser tomber et que nous ne voulons plus entendre parler de telle ou telle personne. Mais Dieu, notre Berger plein d'amour, prend soin de chacune de Ses brebis: Il n'en laisse tomber aucune. Et nous pouvons faire de même.
En fin de compte, à mesure que nous continuons à amener la guérison dans nos rapports quotidiens, jusqu'à ce « type » qui vous coupe la route quand vous rentrez du travail !, il ne restera plus de raisons pour faire la guerre. Bien que la fin de tous conflits représente un objectif idéal à très long terme, mes élèves et moi avons été heureux de trouver le moyen d'avancer au moins un peu dans cette direction.
Cela semble si simple et si aisé que j'ai failli passer à côté de cette solution sans la voir. La paix n'est pas un lieu où nous rendre. La paix est un chemin, un parcours, et nous pouvons bien la vivre chaque jour, à chaque instant, par chacune de nos pensées remplies de bien et d'amour.