Ce que j’aime beaucoup chez Joseph, tel qu’il est présenté dans les évangiles, c’est son intuition spirituelle. Apprenant que sa fiancée, Marie, n’était pas enceinte de lui, il avait envisagé de rompre discrètement son engagement. Mais quand un ange, ou message de Dieu, lui a annoncé la nature particulière de cette naissance, c’est-à-dire que l’enfant avait été conçu par l’Esprit-Saint et qu’il serait le Messie qui « sauverait son peuple de ses péchés » (Matthieu 1:21), Joseph a accepté son rôle de protecteur pour l’enfant.
Il est possible que cela ne semble pas extraordinaire, mais si l’on considère que le roi Hérode et ses gens cherchaient à tuer l’enfant Jésus, les actions de Joseph, comme par exemple emmener la mère et son enfant en Égypte pendant quelque temps, demandaient un courage évident. Au fond de lui, Joseph avait conscience qu’un dessein divin était à l’oeuvre dans leur vie.
On a traditionnellement décrit Joseph comme un charpentier, transmettant son métier à Jésus. Toutefois, pendant bien des années, je me suis demandé pourquoi les paraboles de Jésus n’incluaient pas de métaphores liées au travail du bois. Ayant moi-même manié (plutôt mal) la scie et le marteau, il me semblait que ce genre d’activité aurait pu fournir de riches comparaisons. Mais les évangiles se taisent sur ce sujet.
Dans son livre Naissance du Messie, Raymond E. Brown avance une explication plausible à cette énigme. À l’évidence, tekton, le mot grec employé pour décrire Jésus dans le livre de Marc, et, en général, traduit par « charpentier », peut être employé pour décrire toutes sortes de travailleurs de la pierre, du bois ou même du métal. Mais ce mot implique aussi qu’il s’agit d’un ouvrier qualifié, non d’un tâcheron. M. Brown note d’ailleurs que quelques érudits au moins pensent que Jésus et Joseph ont pu être d’un niveau professionnel élevé, équivalent à celui d’un constructeur de navires ou d’un architecte. Raymond E. Brown, The Birth of the Messiah (Garden City, New York: Doubleday & Company, Inc, 1977), p. 539-540.
En partant de ce point de vue, les paraboles de Jésus et les images qu’il emploie pour parler de la construction (les fondations, par exemple), prennent une signification toute nouvelle. L’évangile de Luc rapporte que Jésus a posé cette question: « Lequel de vous, s’il veut bâtir une tour, ne s’assied d’abord pour calculer la dépense et voir s’il a de quoi la terminer, de peur qu’après avoir posé les fondements, il ne puisse l’achever, et que tous ceux qui le verront ne se mettent à le railler, en disant: Cet homme a commencé à bâtir, et il n’a pu achever ! » (Luc 14:28-30)
Est-il possible que ceci soit basé sur une expérience réelle avec un vrai client? Ou bien Joseph l’a-t-il enseigné à Jésus pendant son apprentissage de charpentier ? Jésus a bien pu tirer cet exemple de sa propre vie de manière à fournir une leçon spirituelle puissante.
Les érudits remarquent aussi que, plus tard, Joseph est absent de la vie de Jésus, et ils supposent qu’il a pu mourir avant le début de son ministère. Cela pourrait expliquer cette question que des gens ont posée: « N’est-ce pas le fils du charpentier ? N’est-ce pas Marie qui est sa mère ? » (Matthieu 13:55) Non pas une, mais deux questions semblent nécessaires pour identifier l’homme qui, dans ce contexte précis, n’était pas vraiment le bienvenu.
Quelle que soit la durée de la vie de Joseph aux côtés de Jésus, il est clair qu’il possédait la volonté de s’occuper de l’enfant qui est devenu un homme formidablement courageux et profondément spirituel. Je me demande si Joseph était conscient qu’il élevait un enfant dont la vie est devenue le fondement pour le salut du monde.