« Est-ce que vous vendez des pots plus petits ? », demandai-je à la femme assise derrière la table. Vases miniatures décorés de gravures et de peintures représentant des scènes champêtres, pots de fleurs et autres objets en céramique noire s’entassaient sur son étalage installé le long de la route.
« Comment ? », demanda la femme.
« Est-ce que vous avez des ports plus petits ? », redemandai-je. J’étais en compagnie d’un groupe d'amis étudiants, et nous nous étions arrêtés dans ce village isolé, sur le flanc de la Sierra Grande, dans la province de Córdoba, en Argentine. Le sommet de cette Sierra s’appelle Pampade Achala (la plaine d’Achala). On peut souvent y observer des condors.
« Est-ce que vous avez une autre figurine, un peu plus grande, comme celle-ci avec une mère et sa fille ? », demanda à la femme l’une de mes amies.
La femme attendit quelques instants puis elle demanda: « Excusezmoi, qu’est-ce que vous avez dit ? »
Chaque fois que nous posions une question, elle nous demandait de la répéter. Nous comprîmes bientôt qu’elle gagnait ainsi quelques secondes avant de nous répondre. Nous venions de la ville et nous vivions à toute vitesse. Nous marchions et parlions vite, nous déjeunions debout.
Or, ici, dans ce marché rural, c’était différent. Les gens prenaient le temps d’écouter et de réfléchir. Peu de choses les incitaient à accélérer leur rythme. Le rythme de la vie semblait en harmonie avec le paysage paisible qui les entourait. Les gens passaient des heures à écouter les oiseaux chanter dans le lointain, le vent se faufiler dans les arbres et les maisons, le craquement du bois qui brûle lentement dans le poële de la cuisine. Environnés de ces bruits apaisants, ils prenaient le temps de s’émerveiller. Ils s’inspiraient constamment de leur cadre de vie pour créer de merveilleux objets d’art en céramique noire.
En repensant aux artistes de ce marché, je me suis aperçu qu’ils avaient un point commun avec les artistes et les inventeurs célèbres de l’histoire. Eux aussi ont pris le temps d’écouter et de réfléchir, de cultiver l’attente et de rechercher l’inspiration afin de développer de nouvelles idées. Le grand artiste de la Renaissance, Léonard de Vinci, faisait de longues promenades en emportant toujours avec lui un petit carnet qu’il glissait dans sa ceinture. Les idées affluaient et il ne voulait pas en laisser passer une. Alors il était toujours prêt à les noter. Ses découvertes dans le domaine de l’art et des sciences naquirent du regard inspiré qu’il posait sur la nature. Quand il enseignait, il soulignait l’importance de saper vedere, de savoir regarder.
Un autre grand penseur du XVIIe siècle, Johannes Kepler, a certainement aussi passé du temps à écouter et à réfléchir. Kepler découvrit les lois régissant le mouvement des planètes et fit des recherches dans le domaine de l’optique et des mathématiques. Il a également été prouvé qu’il était bien conscient de la présence de Dieu quand il travaillait. Dans l’un de ses livres, il écrivit: « ... sans aucun doute le type authentique de ces figures existe dans l’esprit de Dieu le Créateur et en partage l’éternité. » The Six-Cornered Snowflake, trad. de l’allemand en anglais: Colin Hardie (Oxford: Clarendon Press, 1966), p. 37.
Aujourd’hui, certaines personnes prennent le temps d’écouter spirituellement afin de mieux discerner le bien que Dieu a en réserve pour elles. Et ce faisant, elles trouvent l’inspiration et découvrent des possibilités qu’elles n’avaient pas imaginées. Elles sont de plus en plus conscientes des bonnes idées à mettre en pratique dans leur existence.
Étre à l’écoute des idées créatives implique d’être réceptif aux nouvelles idées qui nous permettent de progresser spirituellement et d’apporter une meilleure aide au monde. Mary Baker Eddy, un important penseur américain du XIXe siècle écrivit ceci à propos de l’observation spirituelle: « La métaphysique, non la physique, nous permet de nous tenir debout sur les hauteurs sublimes, contemplant l’univers incommensurable de l’Entendement, scrutant la cause qui gouverne tous les effets, cependant que nous sommes forts dans l’unité de Dieu et de l’homme. » (Écrits divers, p. 369)
Être spirituellement inspiré — se sentir très proche de Dieu et désirer entendre ce que l’Éternel a à nous dire – c’est comme marcher au bord d’un horizon où de nouvelles idées émergent constamment. Cette inspiration nous fait espérer des choses merveilleuses, comme un enfant qui marche pour la première fois sur la plage et s’émerveille devant les coquillages, est fasciné par les bulles dans le sable, s’étonne de l’écume que les vagues laissent derrière elles.
Être spirituellement inspiré c'est comme marcher au bord d’un horizon où de nouvelles idées émergent constamment.
Dans une certaine mesure, je suis parvenu à saisir le niveau pratique des « hauteurs sublimes » auxquelles Mary Baker Eddy fit allusion. Il y a quelques années, dans un autre pays, j’ai été embauché par une compagnie comme directeur de la production dans l’une de ses usines qui fabriquait des jeans d'une marque célèbre. J’étais chargé, entre autres, de réexaminer et d’améliorer le contrôle du processus de fabrication. Or, cette tâche concernait un certain nombre de gens qui me connaissaient à peine. Et ils m’ont donné le sentiment d’être comme un poisson qui se serait introduit dans le bocal du voisin sans y avoir été invité.
Puis, j’ai compris que s’il était essentiel de trouver une solution technique au problème, il était encore plus essentiel que je considère les choses d’un point de vue aimant et compatissant par rapport aux personnes qui travaillaient avec moi. J’ai pris le temps d’écouter ces pensées qui nous viennent de Dieu – le flux constant de pensées rassurantes comme le mouvement continuel des vagues sur le sable. Tandis que j’écoutais, l’amour de Dieu m’a montré que ces collègues étaient dignes d’être respectés, aimés, et que la solution que je recherchais pouvait refléter le respect que je leur portais et mon affection.
Dieu gouverne Sa création avec des lois d’amour. Et il est impossible de ne pas être dans l’orbite de Son influence puisque l’Amour divin est omniprésent. Donc, l’accomplissement de ma tâche n’était pas soumis à une influence personnelle limitée. Il était sous l’influence du gouvernement divin. J’ai vu que chaque personne qui travaillait dans la compagnie, pas seulement moi, était gouvernée par les lois de Dieu et chacun de nous était capable de discerner les merveilleuses idées de Dieu et de leur obéir.
Tout cela m’a rempli d’inspiration et j’étais préparé, je m’attendais à ce que tout se passe pour le mieux. J’avais un peu l’impression d'être au bord d’une falaise et d’attendre que le soleil se lève.
Au bout de quelques jours, j’ai eu l’idée de créer un code en me servant des chiffres qui identifient chaque lot de jeans. Ces chiffres fournissaient des renseignements sur l’histoire de chaque partie qui composait un lot. Cette idée a fini par être mise en application. Le contrôle du processus de fabrication s’est nettement amélioré et mes relations avec le personnel sont restées harmonieuses.
Combien de belles idées utiles attendent ceux qui prennent le temps d’écouter ce que Dieu a à leur dire ! Certains ont perçu, à l’horizon des possibilités, des idées pour mouler des céramiques. D’autres ont énoncé les lois du mouvement des planètes. Il est certain que chacun de nous est capable d’écouter Dieu, le magnifique Créateur et le grand Donneur d’idées spirituelles, quand Il parle à notre cœur.