Son sermon portait sur l'« attitude ». Non pas une attitude du genre maussade ou hostile, mais un certain état d'esprit, une disposition. J'ai toujours considéré les bénédictions promises par Jésus, dans le Sermon sur la montagne, comme des « béattitudes », des instructions concernant une certaine façon de penser et de vivre qui attire inévitablement des bienfaits. De ce point de vue, la quatrième béatitude, « Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car ils seront rassasiés ! » (Matthieu 5:6), semble particulièrement prometteuse. Qui, au cours de sa vie, n'a jamais eu faim et soif de quelque chose ? On peut être en quête de santé, d'une compagne ou d'un compagnon, d'argent pour régler ses factures. Certains aspirent même à croire en Dieu. Quand on considère les défis incessants de la vie, il n'est rien de plus rassurant que ce qui parle d'une faim qui sera rassasiée. Comme j'ai pu le constater moi-même, cette faim ou cette soif apporte effectivement des bienfaits qui dépassent de loin nos attentes initiales. L'important est de savoir quels sont nos vrais besoins.
J'ai connu un temps où j'avais désespérément besoin d'argent pour régler mes factures. J'avais terriblement peur de ne plus pouvoir assurer à ma femme et mes enfants le vivre et le couvert. J'avais exploité toutes les idées qui m'étaient venues pour améliorer la situation. Et, comme j'en avais l'habitude, j'avais longuement prié, avec ferveur, mais apparemment en vain. La situation paraissait désespérée.
En repensant aujourd'hui à cette quatrième béatitude, je me rends compte que j'avais eu « faim » et « soif » durant toutes ces années. A mes yeux, c'était une aide pécuniaire qu'il me fallait. Là était bien le problème: je cherchais de l'argent et non la justice (selon la recommandation de la béatitude), et je n'en trouvais pas. Comme il est dit dans l'épître de jacques: « Vous demandez, et vous ne recevez pas, parce que vous demandez mal. » (Jacques 4:3) Mary Baker Eddy reprend la même idée quand elle écrit: « L'expérience nous apprend que nous ne recevons pas toujours les bénédictions que nous demandons dans nos prières. Nous comprenons mal la source et les dispensations de toute bonté et de toute félicité, autrement nous recevrions certainement ce que nous demandons. » (Science et Santé, p. 10)
Bien que ces deux passages puissent ne pas sembler particulièrement encourageants, leur message m'apporte en fait un grand réconfort: même si nous pensons savoir ce dont nous avons besoin, c'est-à-dire d'argent, d'une relation satisfaisante, d'un nouvel emploi, Dieu sait quel est notre vrai besoin. C'est pourquoi nous recevons des bienfaits beaucoup plus nombreux et plus importants que tout ce que nous pouvions imaginer si nous nous attachons à être justes et bons et à faire le bien, ce pour quoi Dieu nous a créés.
C'est ce que j'ai dû apprendre à cette époque cruciale. Un jour, alors que les choses semblaient aller au plus mal, j'ai entendu venant de je ne sais où — à la fois de très loin, mais en même temps du plus profond de mon être — une voix qui disait explicitement: « Utilise tes talents ! Reconnais les qualités spirituelles que Dieu t'a données et emploie-les de toutes les manières possibles pour faire du bien à tous ceux qui sont dans ton entourage. Agis avec zèle, avec fidélité et avec persistance, et tout ira bien. »
J'ai mieux compris que je n'avais pas tant besoin d'argent que d'une conscience plus nette de la valeur que j'avais pour Dieu, pour moi-même et pour mes semblables. Cela peut sembler irrationnel quand on sait que j'avais tant besoin d'argent pour régler mes factures ! Pourtant, ce qui m'est venu à l'esprit, en y réfléchissant, c'est que l'argent n'était que le symbole d'une valeur et non sa source. Dieu en était la source véritable. Trouver ma valeur signifiait puiser à cette source, exprimer Dieu par l'amour, la bonté, la sagesse, la compréhension, le courage, la force, l'humilité, etc. En adoptant une telle attitude, je sentirais que je ne fais qu'un avec Lui qui est la « fontaine jaillissante » (ibid., p. 2) de toute bonté et de tous bienfaits. Je me suis rendu compte que c'étaient ma faim et ma soif de reconnaître et d'exprimer ces qualités qui permettraient à ma vraie raison d'être de se réaliser dans une existence droite, intègre, conforme au plan de Dieu pour chacun d'entre nous.
J'ai obéi à ce message. Je me suis attaché à voir, à reconnaître et à apprécier les qualités spirituelles que je voyais s'exprimer dans toutes mes activités, qu'il s'agisse des travaux domestiques, de manifestations d'amour envers ma femme et mes enfants ou de l'aide que je pouvais apporter à mon prochain. Voir la bonté de Dieu se refléter dans tous les aspects de ma vie m'a demandé un effort soutenu mais, depuis que je m'y suis attaché, toute ma famille a reçu de multiples bienfaits.
Au fil des ans, j'ai de mieux en mieux compris que cette béatitude est fondée sur une vérité spirituelle: la loi de la réflexion spirituelle, non une loi de consommation matérielle. En d'autres termes, avoir faim et soif de la justice, c'est à mes yeux reconnaître la nécessité absolue de démontrer et d'utiliser ce que Dieu nous a déjà dispensé, à savoir Sa bonté, Son amour, Sa sagesse et Son courage à jamais inépuisables. C'est être Son reflet, ce que nous sommes déjà. A ce titre, nous sommes capables d'exprimer la vraie justice dans une existence, une attitude et des actions empreintes de droiture.
Mais qu'en est-il de la promesse énoncée dans la béatitude ? « ... ils seront rassasiés ! » Nous serons, bien sûr, en mesure de payer nos factures et de subvenir aux besoins de notre famille, comme cela été le cas pour moi, puisque ma famille n'a jamais manqué d'un toit, de nourriture ni d'argent. Mais au-delà de ces contingences, je perçois de mieux en mieux le vrai sens de cette promesse. A mes yeux, elle ne dit pas que nos besoins seront comblés, un jour, mais que nous constaterons que nous avons toujours été pleinement rassasiés grâce à notre capacité de refléter la bonté et l'amour de Dieu. C'est en cela que réside notre valeur, notre véritable grandeur. Quand nous la reconnaîtrons, le monde la reconnaîtra aussi et y attachera également du prix.
