Dès le premier jour du ministère de Jésus-Christ, l’appel à la repentance, premier pas vers la réforme individuelle, a fait partie de l’enseignement chrétien fondamental.
Or, cet enseignement a-t-il quelque chose à proposer à celui qui travaille à réformer une institution — qu’il s’agisse, par exemple, des écoles ou d’une branche quelconque du gouvernement ?
Se repentir‚ c’est avant tout repenser, reconsidérer, et c’est un acte si profond qu’il réforme le cœur.
Envisageons le scénario suivant: Un réformateur construit une véritable cathédrale de nouvelles méthodes pour la voir réduite à un tas de décombres par ceux chargés de mettre en application ces nouvelles méthodes. Cette résistance à la réforme des institutions part peut-être même d’une bonne intention. Pourtant, si la pensée de ceux à qui il incombe de mettre en place un meilleur programme ne change pas, la réforme des institutions sera sans doute lente ou même complètement interrompue.
C’est là qu’il est indispensable d’apprécier la valeur de la repentance. Se repentir, c'est avant tout repenser, reconsidérer, et c'est un acte si profond qu'il réforme le cœur. Les stratèges du changement contemporains vous diraient qu'il marque le début d'une modification fondamentale de la façon de penser.
Les sceptiques rétorqueront peut-être: «Que vous parliez de transformation en termes religieux ou psychologiques, il n'en reste pas moins qu'il est très difficile d'obliger quelqu'un à agir différemment s'il ne le souhaite pas. On peut toujours menacer ou mettre á l'écart ceux qui résistent, mais on ne peut pas les forcer à changer. » Saint Paul, un réformateur réformé, aurait peut-être répondu ainsi à ces sceptiques: « Avez-vous essayé de les aimer ? »
La conversion de Paul montre que notre repentance est réellement le résultat de l'amour que Dieu nous porte. En effet, l'amour de Dieu, par son activité, agite la pensée avec insistance, peut-être tout d'abord sans être remarqué ni admis. Or, cet amour accorde sa grâce de façon implacable en travaillant à transformer chaque existence. L'influence divine finira par être irrésistible, en nous mettant dans la nécessité de nous réformer de manière permanente.
Dans une lettre qu'il adressa aux chrétiens de Rome, Paul parle du sentiment d'impuissance que nous ressentons quand la résistance au changement semble inhérente à notre nature. Dans son combat contre cette réticence, il rend grâce à Jésus-Christ et exprime sa reconnaissance pour la liberté qu'entraîne la compréhension de la vie de Jésus. Cette lettre parle à tous ceux que la réforme effraie ou auxquels elle paraît impossible. En voici un extrait: «De même aussi l'Esprit nous aide dans notre faiblesse, car nous ne savons pas ce qu'il nous convient de demander dans nos prières. Mais l'Esprit lui-même intercède par des soupirs inexprimables. (...) Nous savons, du reste, que toutes choses concourent au bien de ceux qui aiment Dieu, de ceux qui sont appelés selon son dessein.» Rom 8:26, 28.
Or, qu'est-ce que cette expérience individuelle a à voir avec la réforme d'une institution ? Sans cette énergie transformatrice, sans l'amour — l'amour de Dieu — qui encourage la repentance, tout effort de réforme est sans défense contre ce qui voudrait faire revenir à un ancien style de vie.
Dans la même lettre, Paul indique qui est l'ennemi de la réforme. Ce n'est pas une personne — ni nous-mêmes ni un collègue — mais l'entendement charnel, l'«inimitié contre Dieu » Rom. 8:7.. Ce concept donne une nouvelle direction aux efforts de réforme — que nous ayons pour but d'apporter un changement à notre existence ou à une institution humaine estimable. Pour que la réforme soit efficace, il nous faut mettre en question la croyance à l'existence d'un entendement distinct de Dieu qui agirait en opposition au bien. En fait, cette croyance doit être complètement abandonnée.
L'intelligence à la base d'une réforme durable est divine, parce que Dieu est le seul Entendement, la seule véritable origine de toute pensée, de toute volonté, de tout acte. Il n'est pas surprenant que Paul écrive à l'une des nouvelles églises qu'il aidait de ses encouragements: « Ne faites rien par esprit de parti ou par vaine gloire, mais que l'humilité vous fasse regarder les autres comme étant au-dessus de vousmêmes. Que chacun de vous, au lieu de considérer ses propres intérêts, considère aussi ceux des autres. Ayez en vous les sentiments qui étaient en Jésus-Christ. » Phil. 2:3-5. Paul avait appris par expérience que l'intelligence gouvernant la réforme est l'Amour divin. Par conséquent, tout effort de réforme est une expression de l'amour de Dieu.
Science et Santé avec la Clef des Écritures de Mary Baker Eddy analyse également la nature de la réforme et l'énergie divine qui la soutient. Dans l'un de ses chapitres, cet ouvrage montre que l'abolition de l'esclavage aux États-Unis avait des racines spirituelles et prédit qu'il se produira une réforme encore plus profonde, une réforme qui libérera de toutes les formes du matérialisme, de la croyance à une intelligence opposée à Dieu. « L'histoire de notre pays, comme toute l'histoire, illustre la force de l'Entendement et montre que le pouvoir humain est proportionnel à ce qu'il représente de pensées justes. Quelques phrases immortelles, ayant le souffle de l'omnipotence de la justice divine, ont été assez puissantes pour rompre les chaînes du despotisme et abolir le fouet et le marché aux esclaves; mais l'oppression ne disparut pas dans le sang, et le souffle de la liberté ne sortit pas de la bouche du canon. L'Amour est le libérateur.
« Abolir légalement la servitude non rétribuée aux États-Unis fut chose difficile; mais l'abolition de l'esclavage mental est une tâche encore plus rude. Les tendances despotiques, inhérentes à l'entendement mortel et d'oú germent sans cesse de nouvelles formes de tyrannie, doivent être déracinées par l'action de l'Entendement divin. » Science et Santé, p. 225.
Il y a là matière à réflexion pour le réformateur ! La réforme d'une institution exige la repentance de ceux qui s'opposent à un changement constructif tout comme de ceux qui l'approuvent. Un réformateur pourrait poser la question suivante: « En quoi mon travail représente-t-il une pensée juste, la volonté de l'Entendement divin, Dieu ? Dans quelle mesure suis-je en train de lutter pour cesser de croire à une intelligence opposée à Dieu ? Dans quelle mesure suis-je en train de progresser, guidé par l'Amour divin ? Quelle est la façon dont j'aborde ceux qui, à mon avis, ont besoin de changer ? »
L'effort de réforme a peutêtre lui aussi besoin d'être réformé. Cherche-t-on surtout à réformer les structures, les systèmes, les comportements ? Ou a-t-on pour but de libérer du matérialisme le concept qu'on a de soi-même et des autres?
Lorsque Paul parle de devenir « une nouvelle créature », il met l'accent sur ce qui fit du ministère de Jésus un mouvement réformateur radical. Par ses œuvres de guérison et par sa résurrection, ce dernier nous montra comment exprimer, dans notre existence actuelle, ce que nous sommes en réalité — les enfants de Dieu, déjà créés à Sa ressemblance spirituelle. La réforme, vue sous cet angle, ne consiste pas à créer ou à recréer quelque chose. Elle consiste à faire apparaître les qualités dont Dieu, l'Amour divin, nous a doués: la spiritualité, la perfection, l'amour, l'équité.
Ce que Dieu crée est lumineux, parce que cela reflète la lumière de l'Amour; cela n'a pas besoin de changer. Comprendre ce fait, même un tout petit peu, nous fait passer de la matérialité à l'Esprit, de l'obstination à l'obéissance, de l'habitude de juger à l'amour. Cela ne veut pas dire qu'on parvient à se repentir et à se réformer du jour au lendemain ni qu'on ne retourne pas en arrière avant de repartir en avant. Pourtant, réfléchir avec humilité à ce qu'est la véritable réforme unit nos efforts à ce pouvoir qui est vraiment en train de transformer l'humanité.
« Vous êtes la lumière du monde » Matth. 5:14., affirma Jésus à ses disciples. En exprimant la lumière de l'Amour, nous sommes transformés — dans nos pensées et dans nos actes. Nous devenons de nouvelles créatures qui se débarrassent de méthodes dépassées, limitatives qui engendrent la crainte. Et, avec générosité, nous aidons nos semblables à ouvrir la porte de leur conscience aux progrès véritables que l'Amour favorise. Qu'est-ce que cela apportera de bon ? Science et Santé déclare: « Un seul Dieu infini, le bien, unifie les hommes et les nations, constitue la fraternité des hommes, met fin aux guerres, accomplit ces paroles de l'Écriture: "Tu aimeras ton prochain comme toi-même", annihile l'idolâtrie païenne et chrétienne — tout ce qui est injuste dans les codes sociaux, civils, criminels, politiques et religieux — établit l'égalité des sexes, annule la malédiction qui pèse sur l'homme, et ne laisse rien subsister qui puisse pécher, souffrir, être puni ou détruit. » Science et Santé, p. 340.