En 1905, Mary Baker Eddy était devenue une figure nationale. A cette époque, les médias s’intéressaient de plus en plus à elle en sa qualité de fondatrice et de leader du mouvement de la Science Chrétienne — intérêt bien souvent suscité par l’hostilité. Mais quels que soient les obstacles rencontrés, la guérison chrétienne demeurait l’une de ses préoccupations majeures.
Le 25 mai 1905, Mary Baker Eddy écrivit à l’une de ses plus anciennes élèves:
Ce dont j’ai besoin, plus que de toute autre chose au monde, pour m’aider dans l’œuvre de ma vie, c’est d’une personne qui guérisse comme moi-même je le faisais dans ma pratique. (...) Parvenez à ce stade unique, guérissez instantanément toutes sortes de maladies. C’est ce que je faisais, et vous devez en faire autant. Notre grand Maître guérissait ainsi et demandait à ses disciples de faire de même. Vous pouvez le faire et vous le devez pour être une Scientiste Chrétienne. A présent, préparez-vous à cette tâche qui est la vôtre, veillez, priez, travaillez sans relâche et ayez la foi! Sachez que vous pouvez être ce que Dieu vous demande d’être et que vous êtes déjà — Son image et Sa ressemblance — le reflet de Dieu, qui est le seul et unique Guérisseur, le reflet de Dieu, la Vie, la Vérité, l’Amour. Document du Service historique de L’Église Mère: H00094.
Quatre mois plus tôt, Mary Baker Eddy avait donné une parfaite illustration de ce qu’elle voulait dire dans cette lettre. George Kinter, qui travaillait dans la demeure de Mary Baker Eddy à l’époque, raconte dans ses souvenirs ce qui arriva «durant une nuit d’hiver, en janvier ou février de l’année 1905». Mary Baker Eddy avait appelé plusieurs fois en vain son secrétaire personnel, Calvin Frye, depuis longtemps à son service. Elle demanda à George Kinter d’aller voir pourquoi Calvin ne répondait pas. En entrant dans la chambre du secrétaire, Kinter le trouva effondré dans un fauteuil: «Mr. Frye était sans vie, son pouls avait cessé de battre, il était froid comme le marbre et ses membres étaient rigides.» Lorsque Mary Baker Eddy en fut informée, elle alla immédiatement dans la chambre et «se mit aussitôt à le traiter. (...) Pendant une heure entière, [elle] ne cessa de nier l’erreur et de déclarer la Vérité avec une véhémence et une éloquence dont je n’avais jamais vu personne faire preuve jusque-là. (...) Je me souviens bien de presque tout ce qu’elle dit et fit en la circonstance»:
Calvin, réveillez-vous et soyez cet homme que Dieu a créé! Vous n’êtes pas mort et vous le savez! Combien de fois avez-vous prouvé qu’il n’y a pas de mort! Calvin, tout est Vie! Vie!! La Vie éternelle. Répétez, Dieu est ma Vie. (...) Déclarez: Je peux me défendre. (...) Secouezvous. Débarrassez-vous de ce cauchemar propre à la croyance humaine erronée et à la peur. Ne laissez pas l’erreur vous mesmériser au point de croire les mensonges de Satan au sujet de l’homme créé à l’image et à la ressemblance de Dieu! L’œuvre de votre vie n’est pas terminée. J’ai besoin de vous. Notre Cause sublime a besoin de vous.
La Vie est aussi immortelle que Dieu Lui-même car la Vie est Dieu, et vous êtes Son enfant spirituel. Calvin, la mort n’existe pas, car le chrétien Jésus-Christ a aboli la mort, et ce traitement ne peut être renversé par l’erreur.
Au bout d’une heure, Calvin remua légèrement puis parla d’une voix aux accents très faibles: «Ne me rappelez pas. Laissez-moi partir, je suis si fatigué.» Ce à quoi Mary Baker Eddy répliqua: «Oh, si! Nous tenons à vous rappeler, car vous n’êtes pas parti. Vous avez seulement rêvé, et à présent que vous êtes réveillé de cet état de rêve, vous n’êtes pas fatigué. (...) Grâce à notre Dieu bien-aimé, l’Entendement, le bien omniprésent, vous ne reconnaissez aucune prétention des sens matériels.» Une demi-heure plus tard, Calvin avait repris tous ses esprits. Le reste de la nuit fut paisible, et Calvin Frye était à son poste le lendemain matin, accomplissant ses tâches habituelles pour Mary Baker Eddy. Souvenirs de George Kinter, Service historique.
Un mois plus tard, Mary Baker Eddy reçut une lettre de Mary Crane Gray à qui on venait de faire connaître la Science Chrétienne. Ayant perdu une fortune considérable à la suite de mauvais placements financiers, son mari était devenu fou. Le déclarant incurable, les médecins avaient conseillé de l’enfermer dans un asile. Mais Mrs. Gray écrivit à Mary Baker Eddy pour la supplier de guérir son mari: «J’ai déversé toute l’angoisse de mon cœur dans une lettre de dix pages adressée à Mrs. Eddy. J’ignorais qu’elle n’acceptait pas de cas à l’époque. [Quelques jours] après l’envoi de cette lettre, mon mari s’est réveillé guéri.» Il ne se souvenait plus qu’il avait été malade. Sa femme lui raconta qu’elle avait écrit à Mary Baker Eddy. Il déclara: «Je m’en vais tout de suite chercher du travail.» Souvenirs de Mary Crane Gray, Service historique.
Si Mary Baker Eddy avait renoncé à la pratique publique de la guérison, c’est parce qu’elle se consacrait entièrement au service de l’humanité à travers ses activités de leader de la Cause de la Science Chrétienne. Elle ne cessait d’exhorter les Scientistes Chrétiens à tout quitter pour le Christ. Dans un message intitulé «Choisissez», adressé à La Première Église du Christ, Scientiste, à Boston (à l’occasion du service de dédicace de la magnifique annexe de l’Édifice original construit plus de dix ans auparavant), Mary Baker Eddy rappela aux Scientistes Chrétiens ce passage des Écritures: «Celui qui ne prend pas sa croix, et ne me suit pas, n’est pas digne de moi.» Matth. 10:38. Elle poursuivit: «Sur cette base, combien suivent le Guide? Nous suivons la Vérité uniquement dans la mesure où nous obéissons avec fidélité, humilité, patience et de façon spirituelle, bénissant les saints et les pécheurs avec le levain de l’Amour divin que la femme a introduit dans la chrétienté et la médecine.» The First Church of Christ, Scientist, and Miscellany, p. 4. Mary Baker Eddy voyait dans ce «levain de l’Amour divin» la guérison chrétienne. Comme elle l’avait écrit au Premier Lecteur de L’Église Mère: «La guérison des malades n’est-elle pas la meilleure des choses et la plus élevée qui soit accomplie dans le champ? Certainement! Notre grand Maître en a voulu ainsi.» Document du Service historique: L10930. Et à un conférencier de la Science Chrétienne elle écrivit ceci:
Aujourd’hui, je définis un besoin qui, plus que tout autre, assurera la pérennité du succès actuel de la Science Chrétienne et ses progrès continuels, à savoir des guérisons plus élevées et plus tangibles. Une guérison immédiate, incontestable, démontre ce que vous avancez en théorie, et, en matière de religion ou de philosophie, la théorie sans pratique est pire que tout, car elle désappointe le chercheur et détruit la preuve de sa vérité, rendant la situation plus désespérée que ne saurait le faire l’ignorance. Document du Service historique: L08548.
Mary Baker Eddy ne limitait pas la guérison à la prière pour les hommes et les femmes souffrant de maladies. En mai 1906, une Scientiste Chrétienne des Philippines, qui lui avait écrit au sujet des traitements donnés aux animaux, reçut la réponse suivante:
... guérissez les animaux de même que les êtres humains. Je les guérissais lorsque je faisais de la pratique, et je me suis aperçue qu’ils étaient réceptifs à la Vérité dans tous les cas. Dieu a donné à l’homme « la domination sur les animaux » et nous n’avons aucune autorité pour supposer qu’Il lui ait un jour retiré ce don ou qu’Il lui ait repris son héritage spirituel légitime. Document du Service historique: L14627.
Quelques jours après avoir envoyé cette lettre, Mary Baker Eddy écrivit au Conseil des directeurs de L’Église Mère pour lui dire qu’il était nécessaire de prier au sujet des phénomènes météorologiques destructeurs:
... voici ce que je vous propose: demandez à quelques-uns des meilleurs Scientistes C [hrétiens] de Boston et des environs de prier une fois par jour pour savoir qu’aucune pensée de tremblement de terre, de tornade ou de foudre destructrice n’entre dans la pensée pour y nuire, mais que Celui qui règne dans les cieux et veille sur la terre protège de tous les maux. Document du Service historique: V00698. Voir aussi Lyman P. Powell, Mary Baker Eddy: A Life Size Portrait (Boston: The Christian Science Publishing Society, 1991), p. 234; et Irving C. Tomlinson, Twelve Years with Mary Baker Eddy (Boston: The Christian Science Board of Directors, 1966), p. 203.
Un an et demi plus tard, le 24 septembre 1907, Mary Baker Eddy écrivit dans son carnet qu’après avoir prié, «d’énormes nuages qui remplissaient le ciel ont changé instantanément d’aspect (...) faisant place à une petite pluie fine accompagnée d’un arc-en-ciel.» Document du Service historique: L15400.
Au début des années 1870, Mary Baker Eddy avait écrit Science et Santé avec la Clef des Écritures, le livre d’étude traitant de la guérison. Depuis lors, elle n’avait cessé d’en rendre le sens plus clair à ses lecteurs. Elle avait déjà procédé à six révisions majeures. En octobre 1906, elle écrivit à l’un de ceux qui l’aidaient dans ses activités: «Il devient nécessaire de publier une nouvelle édition de S&S parce que les plaques [d’impression] sont archiusées. J’ai consacré beaucoup de temps, jour et nuit, à la révision de ce livre afin que le sens en devienne plus clair au lecteur qui ne connaît pas la Science Chrétienne.» Document du Service historique: V03226. Elle se consacra à cette tâche durant les huit mois suivants, et lorsqu’elle eut terminé, elle ajouta dans la préface: «Avant le 10 juin 1907, [l’auteur] n’avait jamais lu ce livre d’un bout à l’autre afin de rendre clair son idéalisme.» Science et Santé, p. xii.
Dieu avait révélé Sa nature et Ses lois à Mary Baker Eddy en lui inspirant Science et Santé. Au cours des années, ce livre a apporté la preuve de son origine divine par sa capacité à guérir les lecteurs «qui, en toute honnêteté, cherchent la Vérité» lbid.. En novembre 1907, Mary Baker Eddy lut dans un journal une interview du fondateur de l’Armée du Salut, le général William Booth. L’article précisait que sa santé déclinait. Cela incita Mary Baker Eddy à écrire à un Scientiste Chrétien en Angleterre pour lui demander de trouver le moyen de «présenter son livre au général». Elle ajouta que «le moment [était] venu de guérir cet homme de foi» Document du Service historique: L13998. Le général Booth est décédé en 1912, à l’âge de quatre-vingt-cinq ans..
Alors qu’elle était en pleine révision de Science et Santé, elle eut à faire face à l’un des plus grands défis de son existence. Ce qui n’était, au départ, qu’une surenchère journalistique entre deux journaux concurrents en quête de sensationnel — McClure’s Magazine et un grand quotidien, le New York World — se termina devant les tribunaux par une plainte déposée au nom de Mary Baker Eddy par ses « plus proches amis» à l’encontre de plusieurs membres de sa demeure et de certains officiers de son Église.
Ces « proches » étaient son fils George, une des filles de celuici, un neveu et un cousin de Mary Baker Eddy, ainsi que son fils adoptif qu’elle ne voyait plus. En tant que « proches » de Mary Baker Eddy, ils prétendirent qu’elle n’avait plus toutes ses facultés mentales et qu’elle était sous l’emprise de son entourage.
Les directives que donna Mary Baker Eddy à un Scientiste Chrétien chargé de prier au sujet de cette affaire révèlent l’approche métaphysique qu’elle adopta en la circonstance: «Elle voulait que la croyance au “procès” soit traitée par la métaphysique absolue. Je ne devais pas chercher à voir ce que serait le verdict, mais savoir que la Vérité l’emporterait et que l’Entendement divin dicterait ce verdict — ce qui fut incontestablement le cas.» Nous avons connu Mary Baker Eddy (Boston: The Christian Science Publishing Society, 1986), p. 116. Mary Baker Eddy dut répondre à une série de questions posées par un groupe d’ «experts éminents» désignés par la cour Le groupe des «experts» comprenait un juge, un psychiatre (connu en tant qu’aliéniste) et un avocat d’une grande probité. Ils devaient déterminer si Mary Baker Eddy était capable d’administrer ses propres affaires financières., et à la suite de cet entretien, la plainte fut rejetée.
Cette affaire eut un effet annexe particulièrement intéressant: Mary Baker Eddy guérit un reporter qui avait un cancer de la gorge et ne pouvait plus parler. Ce reporter était venu en quête de scandale et repartit complètement guéri. Vers la fin de sa vie, il se tourna vers la Science Chrétienne et déclara «qu’il était redevable à Mrs. Eddy de l’avoir guéri...» Tomlinson, p. 65.
Le mois même où fut rejetée la pétition des «proches», Mary Baker Eddy pria une Scientiste Chrétienne anglaise, la comtesse De Dunmore, de venir lui rendre visite. La comtesse De Dunmore séjournait à l’époque en Amérique en compagnie de ses deux filles. L’une d’entre elles, Lady Victoria Murray, raconta plus tard:
C’est en [octobre] 1907 que je me rendis pour la dernière fois à Pleasant View avec ma mère et ma sœur, peu après le décès de mon père. (...) Rien ne saurait se comparer à la gentillesse et à la compassion qui nous furent témoignées à cette occasion, et particulièrement envers ma mère qui était extrêmement affectée par le sentiment d’avoir perdu un être cher. «Émue de compassion», Mary Baker Eddy apaisa le chagrin de ma mère, en l’amenant doucement à élever sa pensée jusqu’à un concept plus élevé de la Vie. Puis, se tournant vers moi, elle me demanda si je désirais lui poser des questions. «Oui, répondis-je, j’aimerais savoir comment vous guérissez les malades. » « Je vais vous expliquer », dit-elle avec un sourire, en se renversant en arrière sur son siège. «Je guéris aujourd’hui de la même façon que lorsque j’ai commencé. Dès le début, je guérissais instantanément. Les élèves ne comprenaient pas plus qu’un écolier anglais entendant une langue étrangère qu’il n’aurait pas apprise. Ils ont donc interprété avec leurs propres mots. L’argument utilisé dans la guérison sert simplement à accorder son instrument. Si votre violon est accordé, il n’est pas nécessaire de le réaccorder. Veillez à ce que votre violon demeure accordé.» Elle répéta cette dernière phrase de manière impérieuse, en appuyant sur les mots. Souvenirs de Victoria Murray, Service historique.
Quels que soient les obstacles que dressait devant elle le monde matériel — la maladie, les tempêtes, la démence, la mort ou une action en justice qui menaçait toute l’œuvre qu’elle avait accomplie — Mary Baker Eddy les considérait comme autant d’occasions d’effectuer une guérison. C’était à ses yeux l’occasion de prouver au monde que Dieu est un Père-Mère toujours présent, un Médecin infaillible et un Juge parfait.
