Cette série d’articles illustrés, intitulée « Le pouvoir réformateur des Écritures », évoque la façon spectaculaire dont les « écritures » ont pris forme dans le monde sur plusieurs milliers d’années. Elle parle des grands réformateurs qui ont écrit et traduit la Bible. Ils furent nombreux à sacrifier leur vie pour rendre accessibles à tous la Bible et son influence réformatrice.
Les Juifs à la foi profonde attendaient depuis des siècles. Leurs prophètes — des hommes comme Ésaïe, Zacharie et Daniel — avaient promis la venue d’un Messie, qui apporterait la paix, poserait les fondements de la justice en Palestine et instaurerait le royaume de Dieu sur toute la terre.
Certains Juifs n’étaient pas pressés de voir s’accomplir cette promesse. Les prêtres sadducéens, par exemple, étaient satisfaits de la coopération qui s’était établie entre les Juifs et les conquérants romains. Ils officiaient, comme ils le faisaient depuis des siècles, lors des cérémonies qui avaient lieu au Temple, et ils conservaient une place prééminente au sanhédrin, le conseil religieux le plus important chez les Juifs.
Les pharisiens, en revanche, avaient plus de mal à accepter la domination romaine. Ils formaient un mouvement composé uniquement de laïques et attendaient avec impatience l’arrivée du Messie.
Les membres d’une secte monastique, les Esséniens, étaient si convaincus de l’imminence de l’arrivée du Messie qu’ils quittèrent Jérusalem en signe de protestation, écœurés par la sécularisation de la pensée juive. Ils formèrent une communauté religieuse à Qumran, sur une colline qui surplombait la mer Morte. Ils considéraient la vie comme un combat sans merci entre le bien et le mal. Seul le Messie serait à même de mettre un terme à cette bataille et d’amener le triomphe final du bien. La collection de textes bibliques et autres qu’ils possédaient, maintenant connue sous le nom de « manuscrits de la mer Morte », a été découverte, entre 1947 et 1960, dans onze cavernes différentes, au bord de la mer.
Vers l’an 30 de notre ère, un certain nombre de Juifs, en Palestine, furent convaincus que le Messie était arrivé. Ils écoutèrent avec attention un jeune homme du nom de Jésus, qui les exhortait à se repentir de leurs péchés et à laisser le royaume de Dieu pénétrer dans leur existence. Ses paroles étaient puissantes, elles guérissaient les gens de toutes sortes de maladies — dont la lèpre, ainsi que l’appelait la Bible — et transformaient leur vie de façon si radicale qu’ils se sentaient renaître, régénérés.
Quelques-uns de ceux qui virent et entendirent Jésus perçurent en lui le Christ, le Fils de Dieu. Certains qu’il était le Messie annoncé et transportés par l’amour qu’ils lui portèrent d’emblée, ils abandonnèrent tout pour le suivre.
Mais le message de Jésus ne plaisait pas à tout le monde. Certains de ses disciples allèrent même jusqu’à le quitter quand ils se rendirent compte de la réforme et de la régénération spirituelles qu’il exigeait d’eux.
Son message finit par tant heurter les autorités juives que Jésus fut livré aux Romains pour être crucifié. Mais la mort même ne put mettre un terme à sa mission. Trois jours après avoir été déposé dans un sépulcre de pierre, il réapparut à ses disciples stupéfaits. Pendant un certain nombre de jours, il s’entretint avec eux et les chargea d’aller porter la bonne nouvelle, ou l’ « Évangile », du royaume de Dieu et de sa résurrection jusqu’aux extrémités de la terre.
Obéissant au dernier ordre que leur Maître leur avait donné, les disciples ne cessèrent de répéter l’Évangile, dans toute la Palestine et au-delà, à tous ceux qui les écoutaient. Ceux qui crurent à la bonne nouvelle portèrent désormais le nom de « chrétiens ».
LA TRADITION ORALE
Pendant au moins vingt ans après la résurrection de Jésus-Christ, son histoire fut racontée de bouche à oreille, mais probablement sans tenir compte ni de l’enchaînement ni de la chronologie des événements.
Ces traditions orales revêtirent des formes variées. Certaines sont maintenant appelées exhortations. Ce sont de brèves conversations qui eurent lieu entre Jésus et d’autres personnes. Elles se terminent souvent par une exhortation que prononce Jésus. Certaines traditions relatent des « miracles » — les guérisons accomplies par Jésus. Il y eut aussi les paraboles (souvent décrites comme des histoires terrestres pourvues d’une signification céleste), les maximes et les similitudes. Dans certains cas, ces traditions relataient les événements de la vie de Jésus, comme sa naissance et son crucifiement.
Alors que les témoins oculaires étaient de plus en plus rares au milieu du premier siècle de l’ère chrétienne, et en particulier après que les Romains eurent écrasé la révolte des Juifs à Jérusalem en 70 apr. J.-C., certains chrétiens craignirent que l’histoire de Jésus ne se perdît faute d’être consignée par écrit. Ils entreprirent donc d’enregistrer les enseignements de Jésus et les faits de son existence. Parmi tous ces écrits, seuls demeurèrent les quatre Évangiles de Matthieu, de Marc, de Luc et de Jean. Ces livres constituent la pierre angulaire du Nouveau Testament.
LA COLLECTION Q
La plupart des exégètes conviennent que certaines des premières transcriptions de la vie de Jésus se trouvent dans un recueil anonyme, connu maintenant sous le nom de Q (première lettre du mot allemand Quelle qui signifie source). Cette source contient très peu de récits sur la vie de Jésus, mais elle rapporte, sans doute d’après les remarques provenant de témoins oculaires, des paroles prononcées par Jésus, certains faits de la vie de Jean-Baptiste, le récit de la tentation de Jésus, ainsi que quelques paraboles et quelques miracles. La source Q a certainement été rédigée en araméen, la langue que parlaient les Juifs.
Les transcriptions originales de la collection Q n’ont jamais été retrouvées, mais les exégètes pensent en avoir reconnu d’importants fragments dans les Évangiles selon Matthieu et selon Luc, notamment dans le Sermon sur la montagne et dans les enseignements de Jésus concernant le royaume des cieux et la nécessité d’aimer ses ennemis.
Première transcription des enseignements de Jésus, la collection Q doit posséder un caractère certain d’exactitude et d’authenticité.
L’ÉVANGILE SELON MARC
Le premier chrétien à transcrire les événements de la vie de Jésus dans un ordre tant soit peu chronologique fut l’évangéliste qu’on désigne sous le nom de Marc, bien que son identité demeure incertaine. Il l’écrivit aux environs de 70 apr. J.-C., à l’époque où les armées romaines détruisirent Jérusalem, et il s’adressait avec insistance aux chrétiens juifs de sa localité. Il les exhortait à affermir leur foi.
L’Évangile selon Marc était sans doute destiné à ceux qui vivaient à l’extérieur de la Palestine et visait à prouver que Jésus était le Messie, le Fils de Dieu.
L’un des principaux thèmes de Marc est l’autorité exceptionnelle qu’exerçait Jésus sur les forces terrestres: les démons, le péché, la maladie et même les rites de la loi mosaïque. Marc souligne que, même si Jésus exerce la domination sur les forces matérielles, il lui faudra passer par de grandes souffrances. Aussi l’évangéliste prédit-il, à maintes reprises, la condamnation injuste et le crucifiement de Jésus.
La façon dont Marc rend compte du ministère de Christ Jésus vise à rassurer la communauté chrétienne. Il utilise les termes aussitôt et à l’instant pour bien montrer que le pouvoir de Dieu est à la disposition immédiate de Son Fils bien-aimé. Ce pouvoir, semble dire Marc, est encore là, même si les chrétiens sont en train de vivre une période difficile.
Marc veut faire comprendre à ses lecteurs que Jésus était bien le Christ. Il insiste donc sur le pouvoir qu’avait le Maître de calmer la tempête sur la mer de Galilée et d’accomplir de nombreux miracles. Il décrit ces miracles avec encore plus de détails que les autres évangélistes. Pour insister sur l’identité de Jésus, en sa qualité de Fils de Dieu, l’Évangile selon Marc relate l’épisode de la transfiguration. Les disciples voient Jésus, ses vêtements resplendissants de lumière spirituelle, parler avec Moïse et Élie. Puis ils entendent la voix de Dieu prononcer ces paroles: « Celui-ci est mon Fils bien-aimé: écoutez-le ! »
Dans l’un des passages-clés, Jésus prédit la destruction du magnifique Temple de Jérusalem ainsi qu’une série d’autres désastres: guerres, catastrophes naturelles et cataclysmes. Mais, promet Jésus, après ces événements viendra le Fils de l’homme, « avec une grande puissance et avec gloire », pour sauver le genre humain.
Dans le récit du dernier repas que Jésus prit avec ses disciples, avant le crucifiement, Marc dit, d'une façon simple mais éloquente, que Jésus doit donner sa vie pour sauver les autres. Son Évangile se termine peu après par la relation des derniers événements de la vie de Jésus, dont sa résurrection et son ascension. Il a déjà été fait allusion au reste de l’histoire de Jésus: Jésus-Christ est le Fils de l’homme annoncé dans l’Ancien Testament; le Christ régnera à jamais, et ce règne est imminent dès maintenant.
(A suivre)
