Un jour, accompagnée d'une amie, je faisais des courses dans de jolies boutiques d'une ville du sud des États-Unis. A la sortie de l'une d'elles, sur un espace dégagé, nous avons découvert une femme entourée d'une multitude de branchages délicats, couverts de baies blanches. Elle s'employait à les tresser pour en faire des décorations de fête. Avec son chemisier rouge vif et sa jupe bleu foncé, elle était vraiment ravissante à voir; aussi mon amie ne put-elle s'empêcher de s'exclamer: « Quel joli tableau ! Vous êtes belle comme un cœur !» Lentement, la femme releva la tête et, d'un ton stupéfait, répondit: « C'est bien la première fois qu'on me dit que je suis belle !» Mon amie ajouta alors: « C'est dommage que je n'aie pas mes peintures, j'aurais fait votre portrait !»
Des deux côtés de cette place, les rues bourdonnaient de circulation, en cette période de fête, et les gens se bousculaient sur les trottoirs. En dépit de la presse, cependant, quelqu'un avait entendu les remarques de mon amie. Derrière moi, une voix masculine vigoureuse s'adressa à la femme: « Puisqu'on ne peut vous peindre, souffrez que je chante en votre honneur !» Me retournant, je découvris non pas un jeune guitariste itinérant, mais un gentleman de très bonne apparence. Sans plus tarder, il entonna un chant éclatant en hommage à la dame qui, ayant lâché son ouvrage, restait là assise, muette de surprise.
Pendant ce temps, je m'étais écartée de quelques pas, priant sincèrement afin d'apaiser mon émotion et d'écouter Dieu. Car il faut vous dire que les personnages de cette scène appartenaient à des races différentes et que ce spectacle se déroulait dans un port qui fut jadis l'un des plus grands marchés d'esclaves des États-Unis.
C'est dans cette même ville que Mary Baker Eddy, alors jeune mariée, arriva de Nouvelle-Angleterre, en 1843, pour y vivre avec son mari. Par la suite, en tant que Découvreur et Fondateur de la Science ChrétienneChristian Science ('kristienn 'saïennce), elle a montré, dans ses écrits, combien elle déplorait l'esclavage.
Tout en priant, l'idée me vint que, plus de cent ans auparavant, bien des gens avaient dû prier avec ardeur, de tout leur cœur, pour faire disparaître le joug de l'esclavage et les souffrances dont il était la cause.
Je songeai à ce qu'on avait dû éprouver en voyant les prières de tant de personnes rester si longtemps sans réponse. Cependant, je pensai aussi à la constance de ceux qui, privés de leur liberté, avaient persisté dans la prière et avaient eu confiance — comme nous pouvons le savoir par les negro spirituals — que Dieu avait le pouvoir suprême de les sauver. Je me souvins alors de la promesse que donne Mary Baker Eddy dans le livre d'étude de la Science Chrétienne, Science et Santé avec la Clef des Écritures: « Les siècles s'écoulent, mais ce levain de la Vérité est toujours à l'œuvre. Il devra détruire la masse entière de l'erreur et être ainsi éternellement glorifié dans la liberté spirituelle de l'homme. » Science et Santé, p. 118. Je pensai aussi à tous ceux d'entre nous qui prient chaque jour pour le monde et qui, ensuite, après avoir entendu les informations, sont tentés de se demander si la prière a vraiment un effet à l'échelle du globe. Parfois, nous finissons par nous laisser tellement obséder par la recherche d'une preuve extérieure de guérison, que nous oublions que le « levain de la Vérité est toujours à l'œuvre » et que c'est le pouvoir de Dieu — le Christ toujours présent, la Vérité, agissant dans le cœur et l'esprit des hommes — qui apporte la guérison.
Combien, parmi les individus qui s'occupaient d'acheter et de vendre ceux qu'ils appelaient des esclaves, auraient pu croire qu'un jour la fraternité serait possible dans cette même ville, une fraternité fondée sur la reconnaissance et l'amour de la bonté de Dieu ? Et pourtant, les personnes qui réagissaient si spontanément devant cette allée marchande n'étaient-elles pas en train de démontrer cet amour que Dieu crée en nous pour tous Ses enfants que nous sommes ?
Christ Jésus savait parfaitement que la Vérité qu'il vivait aurait force de loi dans toutes les circonstances humaines, parce que la vérité de l'être est la loi de Dieu, une loi juste qui gouverne toujours. Jésus affirmait sans équivoque son unité avec Dieu, avec l'Entendement divin. Il savait que la conscience qu'il avait de ce qui est immortel et divin était créée par Dieu.
Impossible d'imaginer Jésus disant: « Je me demande si j'ai assez de compréhension pour cette épreuve. Serai-je capable de trouver la vérité qui rendra libre ? » Lorsque les sens matériels offraient l'apparence du mal, Jésus parlait et agissait avec une autorité absolue parce qu'il était conscient de son unité avec Dieu et qu'il savait ne pouvoir exprimer que ce qui venait de Dieu, le bien. Il attestait sans cesse l'existence de son héritage de spiritualité: le sens spirituel, la connaissance spirituelle, les qualités spirituelles, tout cela était la manifestation de son Père-Mère Dieu. Il ne se contentait pas de dire qu'il était le Fils de Dieu; il démontrait sa ressemblance avec Dieu.
Jésus apprécia et loua la foi qu'un certain centurion de Capernaüm manifesta envers l'autorité du Christ, ou Vérité. Lorsque cet homme était venu demander la guérison de son serviteur et que Jésus lui avait proposé de se rendre au chevet du malade, le centurion avait assuré à Jésus qu'il lui suffisait de dire « seulement un mot » et que le serviteur serait guéri. Dans une certaine mesure, le centurion se rendait compte que c'était le pouvoir de Dieu qui donnait son autorité à la parole — les vérités de la Vérité divine. Et comme il fallait s'y attendre, « à l'heure même le serviteur fut guéri » Voir Matth. 8:5—13..
Dans Science et Santé, Mary Baker Eddy écrit: « Le Principe et la preuve du christianisme sont discernés par le sens spirituel. Ils sont mis en évidence dans les démonstrations de Jésus, démonstrations qui prouvent — du fait qu'il guérit les malades, chassa les maux et détruisit la mort, “le dernier ennemi qui sera détruit” — son mépris de la matière et de ses prétendues lois.
« Sachant que l'Ame et ses attributs sont pour toujours manifestés par l'homme, le Maître guérit les malades, donna la vue aux aveugles, l'ouïe aux sourds, la marche aux boiteux, mettant ainsi en lumière l'action scientifique de l'Entendement divin sur les entendements et les corps humains, et donnant une meilleure compréhension de l'Ame et du salut. » Science et Santé, p. 210.
Ce que les autres voyaient comme un changement de qualité et de quantité dans la matière — comme le déclin ou le développement de la matière, comme une matière malade ou en bonne santé — ne constituait pas la préoccupation fondamentale de Jésus. Une transformation de la matière frappe les esprits matérialistes, mais Jésus se consacrait à comprendre et à démontrer l'infinitude de l'Esprit et du spirituel. Il obéissait parfaitement à ce qu'il nommait « le premier et le plus grand commandement » Voir Matth. 22:35—38.: aimer Dieu et Lui obéir de tout son être; aussi était-il conscient de tout ce qui démontrait l'omnipotence et l'omniprésence de Dieu, et il en était reconnaissant. Il rejetait et niait tout ce qui prétendait discréditer la totalité de l'Esprit. Lorsque Jésus déclarait que son Père et lui étaient un, n'affirmait-il pas au fond que Dieu est la Vérité divine et que l'homme est le reflet de la Vérité? En revendiquant et en exprimant sa propre filialité, le Christ, il obtenait le pouvoir d'aider les autres à renoncer à la mortalité et à revendiquer leur filialité en Christ. D'où sa performance humaine idéale en matière de guérison !
Quiconque s'appuie sur la prière pour guérir peut commencer à démontrer, comme Jésus le fit suprêmement, le pouvoir que possède la Vérité divine de dissiper les illusions qui semblent être des conditions matérielles; or, toute condition matérielle n'est rien d'autre qu'une illusion des sens. Nous avons le pouvoir de dire à tout mal: « Entendement mortel, tu peux te laisser impressionner par ta conception erronée de la substance, la matière, et tu peux haïr ou craindre tes faux dieux ou tes images taillées; mais cet Entendement pur que Jésus revendiquait pour sien est aussi le mien et je n'accepterai pas tes suggestions hypnotiques. L'Entendement divin, mon Entendement véritable, ne peut être tenté ni hypnotisé. » Notre origine, notre seule éducation, en fait, notre histoire et notre destinée, nous pouvons les trouver dans les vérités de la Vérité.
Nous lisons dans Science et Santé: « Le Christ est la vraie idée énonçant le bien, le message divin de Dieu aux hommes, parlant à la conscience humaine. Le Christ est incorporel, spirituel — voire l'image et la ressemblance divines, dissipant les illusions des sens; le Chemin, la Vérité et la Vie, guérissant les malades et chassant les maux, détruisant le péché, la maladie et la mort. » Science et Santé, p. 332.
Avec humilité et bonne volonté, abandonnons tout pour le Christ. Avec joie et reconnaissance, acceptons ce que le Christ nous révèle: notre individualité, notre identité, notre immortalité viennent de Dieu. Le Christ n'est jamais assujetti à l'humain ou au mortel, il n'en est jamais la victime. Jésus subit l'épreuve du crucifiement pour montrer à toute l'humanité l'éternité du Christ, le pouvoir de la Vérité, de l'Amour divin triomphant. Nous devrions prouver chaque jour que le Christ est la vraie idée de filialité et ainsi remporter des succès dans la guérison morale, physique et spirituelle de nos maux et de ceux des autres.
Lorsque Jésus demanda à ses disciples: « Qui dites-vous que je suis ? », Pierre répondit en identifiant correctement le Maître: « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant. » Et Jésus de répliquer: « Sur cette pierre je bâtirai mon Église. » Matth. 16:15, 16, 18. C'est sur ce roc, cette fondation spirituelle, que nous devons bâtir chaque jour. Nous devons nous y tenir, face aux bons et aux mauvais témoignages des sens. Même si, apparemment, il ne se produit pas de changement aussi rapide que nous le souhaiterions, nous pouvons laisser les qualités de Dieu soutenir notre prise de position et nous pouvons persévérer, car certainement notre constance trouvera un jour sa récompense divine. Ne sous-estimons jamais le pouvoir de la Vérité !