Il m’est arrivé récemment quelque chose qui m’a permis de parler aux gens de la Science Chrétienne et de sa valeur avec une plus grande liberté. Cela s’est produit le jour où un passage de Science et Santé m’a mise en colère.
Dans ce passage, Mary Baker Eddy écrit: « Des millions d’esprits sans préjugés — humbles chercheurs de la Vérité, voyageurs fatigués et altérés dans le désert — attendent et veillent pour obtenir le repos et le boire. » Science et Santé, p. 570.
Le mot millions m’a frappée. « Grand Dieu, ai-je pensé, cela fait bien longtemps que je n’ai pas vu un seul esprit sans préjugés ! » J’avais l’impression que tout le monde autour de moi affichait des opinions humaines et des idées préconçues bien ancrées sur la façon d’élever les enfants, de perdre des kilos et de garder la santé. La religion même ne semblait qu’une excuse de plus pour entretenir une opinion toute faite. Je n’avais plus eu l’occasion d’offrir Science et Santé à quelqu’un depuis une éternité.
Mais, ainsi que cela m’arrive souvent lorsque je suis troublée par un passage de la Bible ou des œuvres de Mary Baker Eddy, je savais qu’il me fallait plus d’humilité. Le trouble ressenti était le signe que j’étais prête à recevoir une nouvelle inspiration. En priant, je promis à Dieu d’ouvrir davantage les yeux pour reconnaître les esprits sans préjugés, même si je n’étais pas certaine de savoir les déceler.
Dans la réponse immédiate qui suivit, il y avait la question: « Es-tu un esprit sans préjugés ? » Voilà qui est bizarre, pensai-je. C’était moi, me semblait-il, qui savais la Vérité éternelle et qui essayais de trouver ceux qui s’y intéresseraient. N’étais-je pas censée prêcher l’Évangile ? Mais l’intuition spirituelle me dit alors que pour voir un esprit sans préjugés, je devais être un esprit sans préjugés.
Le jour où j’avais réfléchi à tout cela, nous sommes allés, mon mari et moi, nous promener à pied après le dîner. Nous n’avons fait que le tour du quartier, mais j’en ai appris beaucoup sur mes préjugés personnels et sur mes idées préconçues ! La première chose que j’ai remarquée, c’est que mes voisins n’avaient pas encore couché leur petit garçon. Un peu plus loin, au coin de la rue, les gens avaient oublié de nettoyer derrière leur chien. Chez d’autres voisins, la pelouse, devant la maison, était un vrai dépotoir. Et, au retour, nous étions pleins d’idées sur la façon de repeindre la maison des autres.
Tout cela peut paraître d’une importance mineure, mais, eu égard à la question relative à mes préjugés éventuels, ces remarques prirent une signification. Je m’aperçus que je jugeais mes voisins sur un tas de bagatelles, alors que c’était manifestement à eux que je pouvais avoir l’occasion de parler. Mon esprit de critique et de supériorité n’allait certes favoriser aucune conversation sur l’amour, le christianisme et la guérison spirituelle.
Le lendemain même, en rentrant à la maison, je fus accueillie par le ramoneur qui me demanda à brûle-pourpoint: « J’ai entendu dire que vous êtes Scientiste Chrétienne. Qu’est-ce que cela veut dire ? » J’étais ahurie. Ici, devant ma porte, se trouvait un esprit sans préjugés ! Mais j’étais pressée; j’avais des coups de téléphone importants à donner. L’intuition me dit, malgré tout, que la hâte qui avait trop souvent caractérisé mes actes m’avait fait négliger des occasions. Je remis donc les coups de téléphone à plus tard.
Ce qui fut le plus important au cours des quarante-cinq minutes qui suivirent, ce n’est pas tant ce que je dis au ramoneur que ce qu’il me permit d’apprendre. Il me montra ce qu’était un esprit sans préjugés et sans égoïsme. Il avait entendu porter de mauvais jugements sur la Science Chrétienne, mais il était tout de même curieux de connaître mon opinion. (Étais-je aussi correcte envers mes voisins, lorsque j’entendais des ragots à leur sujet ? Ou étais-je prompte à prononcer un jugement ?)
Il me montra aussi la nécessité de parler de mon expérience personnelle. Tout au début de notre conversation, il me confia les choses pénibles qui lui étaient arrivées au cours de l’année et mentionna certaines solutions qu’il avait découvertes par lui-même. Il me faisait suffisamment confiance pour m’en parler. Je pouvais sentir la sincérité de sa recherche. (Est-ce que je parlais volontiers de mes guérisons récentes, si modestes soient-elles ? Ou est-ce que je faisais semblant d’avoir compris les idées de ceux qui m’avaient raconté leurs « grandes guérisons » — des idées dont je ne m’étais pas vraiment pénétrée ?)
La troisième chose qui me frappa, ce fut l’attitude sincèrement amicale du ramoneur. Cela peut paraître étrange, mais pendant toute la durée de notre conversation, je sentais qu’il m’aimait bien, d’une façon toute fraternelle et généreuse, sans attendre que je l’aie mérité en disant ce qu’il fallait. Il n’exigeait pas que je réponde à toutes ses questions profondes, et il me laissait le temps de réfléchir à ce que j’allais dire. Il y avait un certain courant qui passait entre nous. (Mon ardent désir de parler de la Science Chrétienne provenait-il du souhait sincère de réconforter et de bénir mes frères, ou étais-je si pressée de faire de la réclame pour ma religion que je négligeais d’écouter avec compassion pour répondre au besoin d’autrui ?)
Ce fut tout naturellement que je lui offris Science et Santé et un Christian Science Sentinel récent, mais le plus beau, c’est que je ne m’inquiétais pas du tout de savoir s’il les lirait ou non. Tout simplement, le livre lui en apprendrait bien davantage que moi, et cet homme posait des questions si profondes au sujet de Dieu et de la guérison qu’il méritait la meilleure source d’information possible.
Quel sentiment de liberté je ressentis à son départ ! Je retournai malgré moi à Science et Santé, pour relire le passage qui m’avait tant tracassée. Cette fois, mon attention s’arrêta sur la phrase qui suivait: « Donnez-leur un verre d’eau froide au nom du Christ, et ne craignez nullement les conséquences de votre bonne action. » Ibid. Une des raisons pour lesquelles j’avais hésité à proposer le verre d’eau, c’est que je voulais savoir ce qu’on allait en boire ! Cette fois, je comprenais que cela ne me regardait pas. Je pouvais faire confiance au pouvoir que possède le Christ de se communiquer lui-même.
Depuis lors, les occasions se sont multipliées: j’ai parlé aux voisins, à la coiffeuse, aux gens que je rencontrais en avion. Je commence à admettre plus facilement ce que dit Science et Santé: « Il faut que tôt ou tard tous se basent sur le Christ, la vraie idée de Dieu. » Ibid. p. 54. Lorsque nous attribuons des qualificatifs aux gens (ils sont trop axés sur la médecine, trop sensuels, trop paresseux, trop occupés, trop vieux, trop jeunes), l’entendement humain s’en sert de bon prétexte pour négliger de prendre en considération la façon merveilleuse dont le Christ touche chaque vie, même quand la personne concernée ne semble pas le reconnaître. L’amour chrétien nous montre que nous avons le droit de rendre hommage à l’éclat divin que nous percevons chez les autres, sans tenir compte des apparences extérieures, des paroles, des actes ou des partis pris professionnels.
Un passage, dans Science et Santé, souligne avec réalisme les obstacles qu’il faut surmonter quand on veut promouvoir la reconnaissance des vérités de la Science Chrétienne: « Le prix terrestre de la spiritualité dans un âge matériel et la grande distance morale qui sépare le christianisme du sensualisme empêchent la Science Chrétienne d’être appréciée de ceux qui s’attachent aux choses de ce monde. » Ibid., p. 36. Il est arrivé à beaucoup d’entre nous d’offrir de l’aide et de la voir refusée. Il est important de comprendre pourquoi: le sensualisme et l’attachement aux choses de ce monde tendent à empêcher l’humanité d’apprécier la spiritualité. La première chose à faire pour prouver l’impuissance de ces tendances charnelles n’est-elle pas de les déraciner de notre cœur et de notre vie personnelle ? Rien ne devrait être autorisé à pénétrer dans nos pensées qui soit susceptible d’entraver, en nous et chez les autres, le développement de la spiritualité naissante.
Nous éprouvons parfois une certaine fierté d’être Scientistes Chrétiens. Avec toute la liberté que nous démontrons, il peut nous arriver de nous attribuer le mérite personnel de ce qui s’est réalisé dans notre vie. Ce qui est, de toute évidence, le plus nécessaire avant de prêcher l’Évangile, c’est de ne jamais oublier comment il est venu à nous. Si nous sommes honnêtes avec nous-mêmes, ne devons-nous pas admettre que c’est Dieu, à travers Son Christ, qui nous l’a communiqué ? Que c’est Lui qui renverse et détruit en chacun, encore et toujours, les craintes, le manque de confiance en soi et les petites faiblesses ? Ézéchiel nous donne l’assurance de cette promesse divine: « Les choses vont changer. Ce qui est abaissé sera élevé, et ce qui est élevé sera abaissé. J’en ferai une ruine, une ruine, une ruine. Mais cela n’aura lieu qu’à la venue de celui à qui appartient le jugement et à qui je le remettrai. » Ézéch. 21:31, 32. En dépit de tous nos doutes au sujet de la guérison, de tout ce qui nous distrait de la prière et d’une étude fervente de la Bible, et de tout ce qui peut nous inciter à ne pas assister aux services, le Christ nous touche, et l’entendement humain se rend.
Plus nous acceptons que ceci est une loi universelle active, plus nous observons cette loi à l’œuvre chez les autres. Mary Baker Eddy écrit: « Un christianisme plus élevé et plus pratique, qui démontre la justice et subvient aux besoins des mortels dans la maladie comme dans la santé, se tient à la porte de cet âge et frappe pour qu'on lui ouvre. Ouvrirez-vous la porte ou la fermerez-vous à cet ange visiteur qui vient dans la quiétude de l’humilité, comme il vint jadis au patriarche en plein midi ? » Science et Santé, p. 224. Dans cet esprit d’humilité, nous sommes tous libres d’abandonner les préjugés susceptibles de fermer la porte.
Heureux les débonnaires,
car ils hériteront la terre !
Matthieu 5:5