L'évangile selon saint Matthieu rapporte un épisode remarquable dans la carrière terrestre de notre grand Conducteur, Jésus le Christ. Contribuant au succès de son ministère, la chose était importante; elle l'est encore aujourd'hui pour quiconque se qualifie chrétien, car elle met en lumière une vérité fondamentale du christianisme.
Aux disciples, Jésus fit cette question (Matth. 16:13): « Qui est le Fils de l'homme, au dire des gens? » Les réponses furent diverses: « Les uns disent: Jean-Baptiste; les autres, Élie; d'autres, Jérémie ou l'un des prophètes. »
Évidemment, elles ne contentèrent point le Maître, qui demanda: « Mais vous, qui ditesvous que je suis? » Simon répondit alors: « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant! »
Nous pouvons bien nous représenter la joie, la gratitude avec lesquelles Jésus accepta cette mémorable réponse. L'un des disciples au moins avait saisi la portée des labeurs, des sacrifices, du généreux amour dont il avait été témoin. Il avait appris la leçon que le grand Maître s'était efforcé de faire comprendre — leçon si importante qu'elle allait devenir la pierre fondamentale de l'église chrétienne.
Jésus approuva cette encourageante réponse en donnant à Simon sa bénédiction. Mais il fit plus encore. Il lui donna un nouveau nom: « Et moi, je te déclare: Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église, et les portes des enfers ne prévaudront point contre elle. » Comme le disciple avait reconnu la véritable identité spirituelle du Maître, celui-ci en retour fit réaliser plus clairement à Simon quelle était la vraie nature du disciple lui-même.
A la page 137 de Science et Santé avec la Clef des Écritures, Mary Baker Eddy paraphrase en ces termes la réponse de Simon: « Le Messie est ce que tu as déclaré, — le Christ, l'esprit de Dieu, de Vérité, de Vie et d'Amour, qui guérit mentalement. » Un peu plus loin elle ajoute (p. 138): « Dès lors il était évident pour Pierre que la Vie, la Vérité et l'Amour divins, non une personnalité humaine, était le guérisseur des malades, un roc, une fondation solide dans le royaume de l'harmonie. » Simon avait partagé jour après jour la vie du Maître et l'avait vu accomplir bien des choses qui passaient pour miraculeuses; il avait certes beaucoup progressé spirituellement, car il pouvait saisir le Principe guérisseur qui en était la source. Dans son propre foyer, il avait vu la guérison instantanée de sa bellemère. Il avait remarqué que les foules se pressaient autour du Maître afin de toucher le bord de son vêtement. En sa présence, Jésus avait rendu la vue aux aveugles, chassé les démons, ressuscité les morts. Finalement le disciple pouvait regarder plus loin que la personnalité de Jésus et reconnaître dans sa grande mission curative l'activité du Christ.
Plus tard, ce même Simon Pierre protesta lorsque le Maître voulut laver les pieds des disciples; mais quand le sens spirituel de cet acte lui devint clair, il dit en toute humilité (Jean 13:9): « Seigneur! non seulement les pieds, mais aussi les mains et la tête. » Lorsqu'une troupe de gens conduits par Judas vint pour saisir Jésus, Simon Pierre tira son épée, frappa le serviteur du grand-prêtre et lui emporta l'oreille. Tout cela prouvait la profonde affection humaine que le disciple avait pour Jésus.
D'aucuns diront: « Comment ce disciple qui avait entrevu la vraie nature spirituelle de l'homme put-il être infidèle à sa vision au point de renier Jésus par trois fois? » Il est vrai qu'en certaines occasions l'impétuosité de Pierre l'égarait; elle l'engagea même à reprendre son métier de pêcheur, en l'absence du Maître. C'est alors que Jésus, près de la mer de Tibériade, apparut encore une fois aux disciples et par un tendre reproche fit voir qu'il leur fallait quitter les occupations matérielles pour devenir pêcheurs d'hommes. Pendant cet entretien, à trois reprises, Jésus, s'adressant à Pierre, l'appela « Simon, fils de Jona. » Où donc était Pierre qui avait vu le Christ? Nous avons lieu de croire que le reproche fut efficace; temporairement obscurcie par le découragement et l'angoisse, la perception du Christ, de la Vérité, qu'avait eue Simon, s'épanouit ensuite et rendit possible une admirable carrière de guérison; comme le disent les Actes des Apôtres (5:15): « On apportait les malades dans les rues, et on les mettait sur des lits et sur des couchettes, afin que quand Pierre viendrait à passer, son ombre du moins en couvrît quelques-uns. »
Il importe au plus haut point que chacun de nous apprenne à reconnaître clairement le Christ guérisseur et s'attache à cette vision, puisque Jésus déclara qu'il en ferait la base même de son église. Les Scientistes Chrétiens suivent le Christ; ils doivent donc maintenir à son égard une vision bien nette et ne point se laisser mesmériser par le sens corporel d'eux-mêmes ou d'autrui; alors ils auront leur récompense — la vraie perception spirituelle. Les tentations se présenteront peut-être à nous sous forme d'ambition personnelle ou de fausse humilité, de succès ou d'échecs mondains. Elles chercheront parfois à nous faire en quelque sorte adorer une autre personne qui semble comprendre mieux que nous la vérité. Mais nous ne tomberons pas dans ces embûches si nous nous souvenons que la Vie, la Vérité et l'Amour divin, plutôt qu'une personnalité humaine, guérit les malades à notre époque comme au temps de Jésus. Non qu'il ne nous faille pas apprécier sincèrement l'aide d'un ami ou d'une praticienne dont la pure compréhension de la vérité hâta notre guérison; mais si au lieu de nous arrêter au sens humain des choses, nous voyons que Dieu est le Dispensateur de tous les biens, cela libérera notre prochain et nous-mêmes.
Qu'en est-il de l'Église fondée sur le Roc, le Christ? Dans l'Aperçu historique qui sert de préface au Manuel de L'Église Mère, il est dit que « le 12 avril 1879, la motion suivante, présentée par Mrs. Eddy, fut votée: — Organiser une église destinée à commémorer la parole et les œuvres de notre Maître, et ayant pour but de rétablir le christianisme primitif et son élément perdu, la guérison. » Cela étant, tout ce qui s'appliquait à la primitive église conçue par le Maître devrait aussi caractériser de nos jours l'Église du Christ, Scientiste. Il importait que les disciples immédiats de Jésus comprissent le divin Principe du Christ guérisseur sur lequel était fondée son église; il importe également que nous ne perdions jamais de vue la solide pierre sur laquelle repose notre église.
« Sur cette pierre je bâtirai mon Église. » Il faut savoir et reconnaître que toute activité de l'Église est une activité du Christ guérisseur. Dans nos contacts avec les autres membres, nous pouvons avec bonheur renoncer aux considérations purement personnelles pour laisser humblement se manifester le pouvoir de Dieu. Si nous faisons cela d'une manière conséquente et ferme, nous démontrerons toujours davantage, dans le travail accompli pour l'église, la nature et la substance spirituelle de l'Église véritable, l'idée divine contre laquelle « les portes des enfers ne prévaudront point. »
