Les centaines de tombes d’enfants découvertes récemment au Canada ont laissé le pays pantois. Toutes ces tombes anonymes sont à proximité d’anciens pensionnats religieux subventionnés par l’Etat, dont l’objectif était d’intégrer les enfants des Premières Nations – les peuples autochtones du Canada – à la culture euro-canadienne. Ces découvertes ont choqué la plupart des Canadiens et confirmé ce que de nombreuses personnes parmi les peuples autochtones dénoncent depuis des années.
Comment un pays qui célèbre de tant de façons la diversité peut-il avoir le courage et l’honnêteté de regarder en face une part si sombre de son histoire, une histoire qui laisse encore des traces sur les survivants et les récentes générations aujourd’hui ?
Selon Perry Bellegarde, ancien chef national de l’Assemblée des Premières Nations, le pays progresse dans la voie de la réconciliation. Et bien que les histoires des Premières Nations soient souvent déchirantes, un grand nombre d’entre elles se racontent dans la bonne humeur et même avec humour. Cette attitude nous aide à ressentir notre humanité commune et renouvelle une empathie mutuelle.
Si les récits historiques exacts jouent un rôle important dans la guérison, mon étude et ma pratique de la Science Chrétienne me permettent de voir que certaines vérités transcendent l’histoire humaine et sont précieuses pour la réconciliation. Jésus indiquait une éternité sous-jacente à l’existence quand il déclara : « Avant qu’Abraham fût, je suis. » (Jean 8:58) Cette affirmation indique certainement la nature intemporelle du Christ, la vraie idée de Dieu, mise en lumière par la vie exceptionnelle de Jésus. On peut aussi y voir une déclaration profonde concernant l’identité de chacun en tant qu’enfant de Dieu, comme le prouva Jésus par ses nombreuses guérisons. De ce point de vue, nous commençons à comprendre que nous avons toujours coexisté avec notre Père-Mère Dieu commun et les uns avec les autres – avant la fondation de la ville de Québec par Samuel Champlain en 1608, avant l’arrivée de Jacques Cartier au 16e siècle, lorsque celui-ci donna le nom de Canada à ce territoire, nom qui allait devenir celui du pays tout entier, et même avant que les Vikings débarquent en Amérique du Nord, que plusieurs populations autochtones appellent l’île de la Tortue.
Cet « avant », dont il est question dans la déclaration de Jésus, peut se comprendre non pas d’un point de vue chronologique, mais métaphysique, spirituel. Au-delà de la portée de l’histoire humaine même, chacun de nous existe, a existé et existera toujours en tant qu’enfant spirituel de notre Père-Mère céleste, l’Amour infini, dans une paix et une harmonie mutuelles.
Chacun de nous existe en tant qu’enfant spirituel de notre Père-Mère céleste, l’Amour infini.
C’est cette identité véritable que Mary Baker Eddy, la découvreuse de la Science Chrétienne, a discernée dans les Ecritures. Fondamentalement, chacun est purement spirituel et libre, en tant qu’expression de l’Amour éternel. Mary Baker Eddy écrit : « La Vie divine est complètement séparée de la croyance à une existence matérielle et du songe de cette existence ; elle révèle la compréhension spirituelle et la conscience de la domination qu’a l’homme sur toute la terre. » (Science et Santé avec la Clef des Ecritures, p. 14)
Le fait de reconnaître la vérité concernant notre pure spiritualité, et le fait d’être conscients de la domination que Dieu nous a donnée (domination que la Bible attribue à tous les enfants de Dieu sans exception) n’implique pas d’ignorer l’histoire humaine. Mais cette prise de conscience offre une base solide permettant de ne pas dépendre de cette histoire. En tant qu’enfants de Dieu, l’Amour, nous sommes tous capables d’exprimer l’humilité qui permet d’apprendre de nos expériences individuelles et collectives, le discernement qui permet de chérir ce qui est bon dans cette histoire, la force de nous libérer des erreurs comme des souffrances passées et la capacité d’aimer plus naturellement notre prochain.
Il y a peu, alors que je marchais en ville, un beau matin d’été, je me suis senti poussé vers une Inuit âgée qui semblait avoir besoin d’un peu de soutien (de nombreux Inuits en provenance du nord du Canada viennent à Ottawa, la ville où j’habite, pour avoir accès à des services de santé et d’éducation). Durant ces quelques instants, un sentiment d’amour fraternel m’a empli le cœur. Je me suis senti poussé à dire, en le pensant sincèrement : « Dieu vous aime et vous êtes précieuse. » La femme a saisi mon pouce, l’a tenu fermement et m’a dit : « Merci ! »
Dans ce simple échange j’ai senti que, au-delà des différences liées à notre appartenance ethnique et à notre expérience de vie, nous recevions une bénédiction spirituelle, nous permettant d’entrevoir la réalité plus élevée de notre existence commune en Dieu. Malgré la brièveté de ce moment, l’esprit de cet amour divinement inspiré demeure encore dans ma pensée comme une douce mélodie qui m’inspire. Il me semble que chaque fois que je repasserai à cet endroit, je repenserai à cette belle expérience.
L’amour fraternel est le seul moyen véritable de parvenir à l’égalité et à une réconciliation durables. Seul l’amour nous donne la force de changer, et ce changement se répercute sur nos relations avec les autres et peut même avoir un impact sur la politique et nos institutions. Heureusement, notre véritable nature en tant que frères et sœurs spirituels – chacun d’entre nous étant choyé éternellement au sein de la famille universelle de Dieu – nous donne le pouvoir d’exprimer cet amour avec de plus en plus de constance.