« Des limites... des incapacités... un manque de compétences... » C'est par ces termes assez peu encourageants que mes différents instituteurs d'abord, et mes professeurs par la suite, ont défini mon aptitude pour les mathématiques. Je dois avouer que durant les premiers temps, ce verdict ne m'a pas trop dérangé. Je m'étais fait une raison, jusqu'à ce que, vers 12 ou 13 ans, je commence à me passionner pour les sciences et décide de poursuivre plus tard une carrière dans cette voie. Un tel choix nécessitait un bon niveau en mathématiques.
Il est difficile de résumer en quelques mots les heures de prière et les heures de travail passées pour arriver à renverser ce verdict concernant mes aptitudes en mathématiques. Mon moniteur de l'école du dimanche, praticien de la Science Chrétienne, m'a beaucoup aidé, notamment en me disant régulièrement que l'enfant de Dieu hérite de toutes les qualités de son divin Père-Mère et en me rappelant que Mary Baker Eddy définit l'intelligence comme « la qualité primordiale et éternelle de l'Entendement infini, du trine Principe Vie, Vérité et Amour nommé Dieu » (Science et Santé, p. 469). Chacun possède donc pleinement cette qualité primordiale et éternelle.
Il y a eu des obstacles qui ne cédaient pas malgré tous mes efforts, mais il y a eu également de belles victoires. Peu à peu, année après année, victoire après victoire, je me suis pris d'affection pour cette discipline, dont on m'avait dit qu'elle n'était pas faite pour moi. J'ai franchi les étapes une à une, jusqu'à être admis en première année de master de mathématiques. Mes parents, assez fiers de cette réussite, estimaient qu'avoir atteint ce niveau était déjà la preuve que les limites qui m'avaient été imposées durant toutes ces années étaient fausses. Leur soutien, leurs encouragements, leurs prières, leur volonté de me voir réussir m'ont d'ailleurs beaucoup aidé à vaincre ces limites.
Je convenais volontiers que j'avais beaucoup progressé, mais je sentais que ce verdict limitatif (sous forme d'incompréhension, d'incapacité) ne m'avait pas encore quitté entièrement à cette époque. Et lorsque je me retrouvais face à des concepts nouveaux, lorsque des idées encore plus abstraites que les précédentes étaient enseignées par mes professeurs, l'incompréhension à laquelle je faisais face était la même que lorsque j'avais 9 ans et que je peinais à comprendre la méthode de la division à deux chiffres. Me dire que j'étais en master, que le niveau était malgré tout élevé, que les concepts que l'on m'enseignait étaient trés abstraits, n'aidait pas à me consoler. En effet, on a beau évoquer les meilleures raisons du monde pour justifier une incapacité intellectuelle, ces raisons ne permettent pas pour autant de faire jaillir la lumière de la compréhension. Et ce dont j'avais besoin à cette époque pour réussir mes examens, c'était justement de cette compréhension.
Les premiers examens partiels, ceux du mois de novembre, avaient été un échec. Les seconds, qui avaient lieu au mois de février et qui clôturaient le premier semestre, avaient été encore plus décevants, et ce, malgré la somme colossale de travail que j'avais accomplie. Le second semestre s'ouvrait donc sous de bien sombres auspices, et les travaux pratiques qui débutaient allaient encore compliquer les choses. J'étais face à un mur. Mais, la bonne nouvelle, malgré tout, était que ce mur ne me semblait plus aussi insurmontable ni aussi vrai qu'auparavant, car les victoires obtenues par la prière m'avaient laissé penser que toute difficulté n'était pas aussi imposante que ce que l'on pourrait croire. La prière, qui m'avait peu à peu délivré du verdict limitatif de mes anciens professeurs, m'avait également appris à ne pas baser mon travail sur un sens personnel d'aptitude, mais plutôt sur des capacités divines que Dieu confère à tous Ses enfants. La Bible enseigne que Dieu a fait l'homme à Son image, selon Sa ressemblance, et que celui-ci domine sur la création. Cette domination de l'intelligence divine reflétée par l'homme devait se manifester dans ma vie. Je devais m'attendre à la voir s'exprimer pleinement dans mon activité journalière.
Il y a une chose, en revanche, à laquelle je ne m'attendais pas: c'était à la révolution de pensée qui allait se produire au mois d'avril suivant, trois jours seulement avant le début de la troisième série d'examens. J'ai pris l'avion pour me rendre à Paris afin d'assister à l'allocution donnée par le professeur de Science Chrétienne avec lequel j'avais suivi le cours PrimaireNote de la rédaction: voir à la page suivante une interview au sujet du cours Primaire de Science Chrétienne.. Ces allocutions sont prévues par le Manuel de L'Église Mère; elles sont données chaque année et sont une source très précieuse de progrès spirituels et de réconfort. Durant cette allocution, j'ai perçu mieux que jamais auparavant l'importance de donner la première place à Dieu en toutes choses; j'ai compris plus clairement ce que signifiait louer Dieu, rendre gloire à Dieu, reconnaître que Dieu est suprême sur la terre comme au ciel. C'était comme si, tout d'un coup, je regardais le monde avec des yeux différents. Depuis, je me suis rendu compte de la nécessité d'approfondir encore plus cette idée de la totalité de Dieu, mais cette première étincelle qui a jailli dans ma pensée en ce jour d'avril a été suffisante pour renverser toutes les limites qui s'étaient imposées à moi jusque-là. Le soir même, après l'allocution, j'ai pris l'avion pour rentrer chez moi, et, le lendemain, au lieu de me mettre à ma table de travail pour étudier les mathématiques en prévision des examens de lundi, j'ai préféré continuer de prier et de méditer les vérités spirituelles que j'avais mieux comprises.
Tout au long de la semaine d'examen, j'ai conservé avec moi cette perception nouvelle, qui prenait de plus en plus de place dans ma conscience, et qui revêtait également un aspect de plus en plus pratique. Une fois les partiels achevés, j'ai, pour la première fois de mes études, été confiant quant aux résultats. Ils ont été positifs, très positifs même, car en plus des excellentes notes obtenues, j'ai été reçumajor de promotion dans la plupart des disciplines, ce qui m'a permis de rattraper un peu mon retard dans le classement. Les examens finaux du mois de juin se sont déroulés de la même façon.
À la fin de mes études, j'ai eu le plaisir d'enseigner les mathématiques pendant de nombreuses années. En repensant à cette expérience avec un peu de recul, je me rends compte que la première étape, qui a consisté à affirmer ce qui est vrai au sujet de Dieu et de l'homme, et à s'attendre fermement à voir se manifester l'intelligence dans ma vie de tous les jours était une étape importante; mais elle n'était pas suffisante. En effet, tout ce travail de prière était peut-être accompli davantage pour surmonter un obstacle que pour rendre gloire à Dieu. Mary Baker Eddy écrit dans Science et Santé cette phrase que j'aime beaucoup, au sujet de l'œuvre de guérison de Jésus: « Son intention en guérissant était de démontrer son Principe divin, et non pas uniquement de restaurer la santé. » (p. 51) Je me rends compte que si nous prions chaque jour pour comprendre que Dieu est Tout, nous devons donc, de façon concrète, lui donner la première place dans nos pensées, nos affections et notre vie tout entière. Et donner la première place à Dieu est le meilleur moyen de s'affranchir des limites.
