Le dimanche précédant Noël 1888, l'auditoire de Chickering Hall, à Boston, écoutait la lecture d'un sermon écrit par Mary Baker Eddy. (voir Écrits divers 1883–1896, pp. 161–168) Le sujet, « Le sauveur corporel et incorporel », était inspiré d'un verset d'Ésaïe: « Car un enfant nous est né, un fils nous est donné... » (9:5) Ce sermon était convaicant, incisif et tout à fait révolutionnaire. Je ne connais aucun écrit, antérieur ou postérieur, qui ait, avec autant d'audace et d'efficacité, ouvert une brèche dans des siècles de scolastique et de confusion à propos de Jésus-Christ.
Le sermon prenait son envol dans l'élan d'une prémisse entièrement nouvelle: Si Jésus-Christ avait pu accomplir une telle œuvre, ce n'était pas parce qu'il était à la fois Dieu et homme, mais parce qu'il était pleinement conscient d'une vérité extraordinaire concernant Dieu et l'homme, que tout être humain doit tôt ou tard finir par connaître. Jésus savait non seulement qu'il était le Fils de Dieu, c'est-à-dire que son intelligence, sa bonté et sa capacité de guérir étaient en réalité l'expression directe de Dieu, mais il savait également que nous devons tous découvrir cela. Mary Baker Eddy explique que c'est la vraie idée de Dieu, ou le Christ, qui conféra ce rayonnement et ce pouvoir uniques au Jésus humain.
C'était là une conception nouvelle et élargie de l'importance de Christ Jésus pour toute l'humanité. Ce sermon avait une assurance et une puissance qui durent stupéfier l'auditoire. Il n'a rien perdu de sa force aujourd'hui. Il montre pourquoi et comment on peut être un vrai disciple de Jésus et marcher dans ses pas: il ne suffit pas simplement d'aimer et d'aider son prochain ou de suivre un credo religieux mais de mener d'abord et avant tout une nouvelle vie en Christ.
« Nous ne sommes Scientistes Chrétiens que lorsque nous quittons tout pour le Christ », écrit Mary Baker Eddy dans Science et Santé (p. 192). Son sermon de Noël énonce clairement l'ensemble des qualités qui lui semblent requises à cet égard. Ainsi déclare-t-elle à propos de Jésus: « Pour mener à bien son dessein sacré, il lui fallait oublier le moi humain. » (Écrits divers 1883-1896, p. 162) Il nous faut, nous aussi, faire de même si nous voulons recevoir le pouvoir de guérir du Christ, changer notre existence et le cours de l'histoire.
Mary Baker Eddy, la découvreuse de la Science du Christ, montre que le rôle du Christ est loin de se limiter à inspirer et réconforter le genre humain. Pourtant, si la Bible intéresse un grand nombre de nos contemporains, elle leur paraît difficilement applicable dans le monde hyper-médicalisé du troisième millénaire. La guérison par la Science Chrétienne n'a cependant pas vu le jour à cause des insuffisances de la médecine d'antan. Le Christ est le message de Dieu qui nous fait connaître, aussi sûrement aujourd'hui qu'au temps de Jésus, la réalité spirituelle dont le Principe universel est Dieu, l'Esprit, et non une cause et un effet matériels aveugles.
Naturellement, chaque guérison est très importante pour tout praticien de la Science Chrétienne, mais dans certaines circonstances la guérison est une illustration puissante et une humble leçon pour la personne à qui l'on a demandé de prier. Il y a quelque temps, une femme que je ne connaissais pas m'a appelé d'un hôpital. Elle ne me connaissait pas davantage, mais cherchait l'aide d'un scientiste chrétien. Elle m'a expliqué qu'elle étudiait et aimait lire la littérature de la Science Chrétienne depuis des années, sans pour autant aller à l'église. Son amour pour Dieu était cependant manifeste. Cette personne s'était fait hospitaliser pour subir une opération qui semblait réussie. Mais du fait de complications postopératoires, elle se retrouvait dans une situation désespérée, et me demandait si j'accepterais de prier pour elle. Ce n'était pas le moment de lui expliquer la distinction importante entre la prière et le traitement par la Science Chrétienne. Aussi je me suis laissé inspirer par Dieu pendant une minute puis j'ai répondu que j'acceptais avec plaisir.
J'ai donc prié, et mes pensées se sont élevées sous l'inspiration de l'Esprit. J'ai compris que ce qui était le plus important pour cette femme, ce qui avait le plus d'influence sur elle, c'était Dieu Lui-même, et non la situation matérielle complexe dans laquelle elle se trouvait. Je savais qu'elle appartenait à Dieu, et qu'elle était par conséquent spirituelle, et non matérielle. Elle m'a rappelé le lendemain. Les médecins lui disaient que plus elle attendait, plus la seconde opération qu'il lui faudrait subir dans la matinée serait importante.
Après m'avoir expliqué tout cela en détail, elle a marqué une pause avant de reprendre: « Mais la Bible ne ditelle pas que "là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis au milieu d'eux" ? » (Matthieu 18:20) Comme un enfant qui calcule, elle a poursuivi son raisonnement: « Il y a vous et moi, et puis il y a le Christ, c'est suffisant ! D'après ce que vous m'avez dit, nous pouvons résister à tous ces symptômes et problèmes et leur nier tout pouvoir, n'est-ce pas ? Et le Christ va nous aider. Nous pouvons le faire dès maintenant, ensemble, vous et moi. »
Nous nous y sommes employés aussitôt en approfondissant ces points par téléphone. J'ai senti dans sa voix une force et un espoir nouveaux. Après avoir raccroché, j'ai continué de prier jusque tard dans la soirée et de nouveau très tôt le matin suivant. Puis j'ai écrit sur un bout de papier: « Merci Père pour ce qui nous a déjà été donné. Notre travail à présent consiste juste à demeurer dans l'Amour qui veille sur elle. » Comme c'était un dimanche matin, et qu'il me fallait partir tôt pour enseigner à l'école du dimanche, j'ai appelé l'hôpital. Je suis tombé sur le mari de cette femme.
D'une voix forte et claire, il m'a appris que le médecin était venu et qu'il y avait eu un « miracle ». La fièvre était tombée, le taux des cellules sanguines était normal, et le médecin avait dit qu'elle pouvait se lever et marcher un peu. Le mari a passé le téléphone à sa femme, et nous nous sommes réjouis ensemble. Durant tout le trajet jusqu'à l'église, j'étais rempli d'une joie qui n'était pas que de la gratitude: je me réjouissais de la pure réalité du bien. Je comprenais mieux ce que signifie demeurer dans la lumière du Christ, et combien il nous est donné dans cette lumière qui émane de Dieu.
Mary Baker Eddy décrit le Christ comme « la vraie idée énonçant le bien, le message divin de Dieu aux hommes, parlant à la conscience humaine » (Science et Santé, p. 332). Ce Christ vivant fait plus que de fortifier un mortel faible et pécheur. Il transforme le sens humain d'une existence matérielle en mettant en évidence le fait chrétiennement scientifique que Dieu n'a jamais créé un homme et une femme susceptibles d'être faibles et qui ne méritent pas Son immense bonté. En fait, l'identité de l'homme créé par Dieu est celle que Jésus reconnaissait pour sienne, et qui appartient à tous.
Il s'agit bien là d'une conception de l'homme très « nouvelle », mais c'était celle de Jésus – ce qui permet d'expliquer concrètement comment il guérissait la maladie et le péché. « Vous connaîtrez la vérité, et la vérité vous affranchira » (Jean 8:32), déclara-t-il. C'est-à-dire: la vérité vous affranchira de cet état semblable à un rêve dans lequel vous croyez ne mériter de vivre qu'à des années-lumière du Divin.
Le réveil par le Christ requiert souvent de nous davantage d'obéissance, de ferveur et de sincérité. Mais par-dessus tout, grâce à ce réveil nous devenons conscients de la vie et de l'univers qui sont entre les mains de Dieu, l'Esprit, et de la nécessité d'entrer dans cet univers où le bien est naturel et on ne peut plus réel. Alors tout ce que nous avons à faire, à connaître et à entreprendre avec insistance nous impressionne moins quand nous découvrons avec émerveillement la raison d'être de l'homme et de l'univers déjà définie par Dieu. C'est un peu comme s'asseoir à côté de Jésus-Christ et découvrir par ses yeux une nouvelle identité dans la lumière du Christ.
