Mardi 3 juin
: Au cours des deux prochaines heures, nous allons découvrir encore davantage la vie de Mary Baker Eddy, l'amour qu'elle nous portait et qu'elle portait à l'humanité. Trois personnes vont nous y aider, dont deux sont membres de la direction de La Bibliothèque Mary Baker Eddy pour le progrès du genre humain. Lesley Pitts dirige les Archives et Chet Manchester est le directeur artistique de la Bibliothèque. Annette Kreutziger-Herr, professeur à l'Université d'Hanovre, va animer le débat.
: L'Europe possède un riche héritage dans ses bibliothèques, et c'est dans l'esprit de cette tradition que nous accueillons avec joie cette nouvelle bibliothèque.
: Il y a juste cent ans, en 1903, il se passait des choses passionnantes.
Il y a un siècle, en effet, Mary Baker Eddy envoya une note aux personnes qui s'étaient réunies pour le service de communion et pour l'Assemblée annuelle. Ce rassemblement fut d'ailleurs le plus international qui ait jamais eu lieu jusque-là dans le mouvement de la Christian Science. Les gens étaient venus à Boston de Melbourne, de Sydney, en Australie, et ils avaient voyagé en bateau pendant des semaines. Ils étaient venus d'Europe, de France, d'Angleterre, d'Irlande, du Canada. Ils avaient pris le train depuis la Californie. En tout, environ 12 000 à 13 000 personnes s'étaient déplacées.
: Mary Baker Eddy avait envoyé un message à tous ceux qui allaient venir assister à cette réunion en leur disant qu'elle ne prononcerait sans doute pas d'allocution ce jour-là. Ils ne s'attendaient donc pas à la voir. Or, tandis que le service de communion touchait à sa fin, elle demanda à quelqu'un d'annoncer qu'elle invitait les participants chez elle, à Pleasant View, à Concord dans le New Hampshire, qui se trouve à une centaine de kilomètres au nord de Boston. Elle les invitait tous à venir le lendemain, ce qui fut une merveilleuse surprise.
C. M.: En préparant le débat d'aujourd'hui, nous avons eu l'impression qu'en un sens, nous rendions tous visite à Mary Baker Eddy. Une fois encore, nous avons ici un rassemblement international exceptionnel. Et nous avons d'ailleurs tous la possibilité de lui rendre visite grâce à ses écrits historiques, ses notes, ses lettres et autres documents.
A. K.-H.: Mary Baker Eddy a écrit un jour qu'elle demeurait « invisible à son poste ». N'aurait-elle pas aimé demeurer tout le temps invisible à son poste ?
L. P.: Je pense que c'est une question très importante, et j'espère que la Bibliothèque Mary Baker Eddy permet d'y répondre. Pour répondre à votre question, il est nécessaire de consulter ses écrits afin de remettre les choses dans leur contexte.
C. M.: Vous vous souvenez sans doute que, pour écrire la 50e édition de Science et Santé, Mary Baker Eddy partit de Boston. Elle cessa d'enseigner, ferma le Massachusetts Metaphysical College. Elle dissout l'organisation de son église. Tout cela pour pouvoir se consacrer à cette révision majeure. Quand nous lisons Science et Santé, nous avons tendance à penser que tout s’y est trouvé en une seule fois. Or, le livre s'est épaissi et a évolué pendant près de quarante ans.
L. P.:Et elle ne se concentrait pas uniquement sur Science et Santé. Elle recueillait aussi des documents pour un autre ouvrage: son autobiographie, Rétrospection et introspection. Il est intéressant de noter que, même isolée du monde, elle pensait à publier un livre sur elle-même à cette époque: elle était consciente du besoin grandissant qu’avait le public d’en savoir davantage sur l’auteur de Science et Santé.
A. K.-H.: Mais écrire une autobiographie au XIXe siècle, c’était très courageux de la part d’une femme, n’est-ce pas?
L. P.: Absolument. Dans l’Amérique du XIXe siècle, il était acceptable qu’une femme écrive de la poésie ou de la fiction, ou peut-être qu’elle rédige un journal de sa vie quotidienne et qu’elle le fasse publier. Mais qu’une femme écrive sur des sujets importants comme la science, la théologie et la médecine, puis qu'elle écrive sur elle-même en qualité de découvreuse d’un nouveau système de guérison, c’était extrêmement inhabituel.
A. K.-H.: Il existe d’autres autobiographies écrites par des auteures européennes. Par exemple, Meine Lebengeschichte [L’histoire de me vie] de Fanny Lewald (1861), l’autobiographie de George Sand (1854) qui fut l’amie de Frédéric Chopin et ma préférée, l'autobiographie de Regula Engel écrite en 1821 et intitulée A Swiss Amazon [Une amazone suisse.] Tous ces textes traitent de la vie, des comportements et des pensées propres aux femmes, mais ils n’abordent pas les questions que Mary Baker Eddy a traitées.
C. M.: Mary Baker Eddy, femme du XIXe siècle, occupait des fonctions traditionnellement réservées aux hommes. La société désapprouvait le comportement de cette femme et se perdait en conjectures sur l'existence qu'elle menait, car voilà une femme qui avait été mariée trois fois, divorcée une fois... Les gens se posaient beaucoup de questions sur le rôle qu’elle jouait et sur son système d’enseignement. Le clergé, par exemple, examinait ses idées et déclarait qu’elles étaient anti-chrétiennes, qu’elles ne correspondaient pas à ce que disait la Bible. Les médecins et les scientifiques considéraient son système de guérison et le jugeaient sans valeur scientifique, le comparant à du charlatanisme.
Il est intéressant de savoir, cependant, qu’au cours des années 1880, décennie pendant laquelle elle se consacra beaucoup à l'enseignement de la Christian Science et au Massachusetts Metaphysical College, elle aida un grand nombre d'hommes et de femmes à comprendre la pratique de la guérison spirituelle et à s'établir comme praticiens de la Christian Science. Ainsi, à mesure que ces pratiques se développaient et qu'augmentait le nombre de guérisons, les gens ne pouvaient plus nier qu'il y avait là quelque chose à explorer. Or, c'est à ce moment-là qu'il se présenta un nouveau défi.
L. P.: En effet, Julius Dresser, un patient de Phineas Quimby, guérisseur magnétique de Portland, dans le Maine, se mit à affirmer publiquement que ce n'était pas Mary Baker Eddy qui avait découvert la Christian Science, mais qu'elle avait volé les idées de Quimby. Ce dernier était décédé, mais Julius Dresser continuait de déclarer que Mary Baker Eddy n'avait pas découvert les idées qu'elle exposait. Celle-ci sentit très fortement qu'elle devait répondre à ces allégations, et elle écrivit un article dans le Christian Science Journal intitulé « Mind-Healing History » The Christian Science Journal, juin 1887, p. 109. [L'histoire de la guérison par l'Entendement] qui réfutait les affirmations de Dresser.
C. M.: Cet article illustre à nouveau le fait que Mary Baker Eddy voyait la nécessité de présenter des données exactes sur l'histoire de la Christian Science et sur sa propre histoire. Des expériences pénibles commençaient à lui apprendre qu'affermir la Cause de la Christian Science impliquait aussi d'établir l'exactitude des faits concernant la Découvreuse et Fondatrice de la Christian Science. Mary Baker Eddy était une femme naturellement modeste, mais elle voyait alors qu'il était nécessaire d'exposer son rôle et les faits relatifs à l'histoire de sa vie.
Dans Science et Santé, elle écrit: « Les persécutions contre tous ceux qui ont énoncé quelque chose de nouveau et de meilleur concernant Dieu ont non seulement obscurci la lumière des âges, mais elles ont été funestes aux persécuteurs. Pourquoi ? Parce qu'elles leur ont cachée l'idée vraie qui a été présentée. » (p. 560)
A. K.-H.: Ce qui m'intéresse particulièrement dans ce passage, c'est le thème de la lumière et de la vie.
L. P.: On a un aperçu dans ses lettres et ses écrits de la portée de ce thème. On s'aperçoit qu'elle ne parle pas d'une Américaine préoccupée par la façon dont le monde la voit personnellement, elle y parle de la lumière de la Christian Science qui ne doit pas être obscurcie par l'ombre jetée sur la Découvreuse et Fondatrice de ce système de guérison.
C. M.: Vous reconnaissez probablement tous ce thème de la lumière et de la vie. C'était en effet le thème de l'Assemblée annuelle l'année dernière lequel avait été tiré d'une lettre que Mary Baker Eddy adressa à son élève, Edward Kimball, en 1893. Voici ce qu'elle dit: « Si le monde me comprenait sous mon vrai jour et dans ma vraie vie, cela ferait avancer notre Cause plus que toute autre chose. J'ai appris cela en observant que l'ennemi essaie bien plus de cacher ces deux choses au monde que de l'emporter sur tout autre point. La vie et le caractère de Jésus, quand ils apparurent pour la première fois, furent traités de la même manière. Et j'ai le regret de constater que des élèves fidèles ne sont pas plus conscients de cette grande exigence dans les méthodes qu'ils utilisent pour faire face aux tactiques de l'ennemi. » L07433, lettre à Edward A. Kimball, 15 octobre 1893, Collection Mary Baker Eddy, La Bibliothèque Mary Baker Eddy pour le progrès du genre humain.
A. K.-H.: Elle parle d'un ennemi. Il ne s'agit pas d'une personne, n'est-ce pas ?
L. P.: Non, elle ne fait pas allusion à une personne. Quand elle emploie le mot « ennemi » dans ses écrits, elle parle en général de l'opposition mentale, en l'occurence celle qui tenterait d'obscurcir le rôle que remplit Mary Baker Eddy ou d'empêcher le monde de comprendre ce rôle.
Je pense qu'il est utile d'en savoir un peu plus sur le contexte de cette lettre adressée à Edward Kimball. Elle l'écrivit après l'Exposition internationale de Chicago en 1893, où s'était réuni un Parlement des religions. Mary Baker Eddy n'y assista pas, mais elle écrivit une allocution pour l'occasion, et c'est l'un de ses élèves, le juge Septimus Hanna, qui devait la lire. Or, elle lui avait donné des instructions très précises: il ne devait pas remettre de copie de l'allocution à la presse. Cependant, à la fin de l'allocution, dans la confusion ambiante, c'est exactement ce que fit le juge. Cette allocution fut imprimée sous son nom, au lieu de celui de Mary Baker Eddy. C'est pourquoi elle fut extrêmement déçue, à la fin de l'Exposition internationale, de voir une fois de plus que ses idées ne lui étaient pas attribuées.
A. K.-H.: Mais vous voyez, cet exemple est symptomatique dans l'histoire, parce qu'il existe de nombreux cas où les idées d'une femme ont été attribuées à un homme. Nous en avons même un dans l'Hymnaire de la Christian Science: le cantique 174 que nous aimons et que nous connaissons tous bien, « Dieu réconforte comme une mère aimante... » La mélodie en est attribuée à Felix Mendelssohn, alors qu'en réalité elle a été composée par sa sœur, Fanny.
C. M.: Nous espérons que lors d'une prochaine réimpression de l'Hymnaire, nous pourrons effectuer cette correction. Nous aimerions attribuer à Fanny la mélodie qu'elle a composée.
L. P.: Nous allons à présent examiner des lettres de Mary Baker Eddy adressées à des conférenciers de la Christian Science en 1899, juste un an après la création du Conseil des conférences. La première lettre fut envoyée à William McKenzie. Voici ce qu'elle lui écrivit: « Tout ce dont les gens ont besoin, afin d'aimer et d'adopter [la Christian Science], c'est de connaître sa fondatrice telle qu'elle est vraiment. Notre Cause avancera dans la mesure où ils auront cette connaissance. » L13046, lettre à William P. McKenzie, 13 janvier 1899, idem.
C. M.: Et voici ce qu'elle dit, la même année, à Carol Norton, un autre conférencier de la Christian Science: « Je vous remercie constamment de ce solide concept que vous avez de moi. De cela dépend bien plus que les élèves, tout en dépend, voyez-vous. Sans un concept exact de qui je suis, les ténèbres se forment, s'épaississent jusqu'à ce que la nuit (séparation) vienne et qu'il semble que nous nous séparions. Tandis que la véritable idée de ce qu'est leur leader fait entrer la lumière, même quand ils ne savent pas d'où elle vient. » L02407, Mary Baker Eddy à Carol Norton, 20 septembre 1899, idem.
A. K.-H.: « La véritable idée de ce qu'est leur leader », qu'est-ce que cela veut dire ? Doit-on y chercher un sens spirituel ?
C. M.: Pendant un instant, j'aimerais vous renvoyer la question, Annette, parce que vous êtes historienne. J'aimerais vous demander: En quoi est-ce utile de comprendre l'œuvre de tout penseur important par rapport à sa vie?
A. K.-H.: Les historiens puisent aux sources, parce qu'en général l'histoire est loin de nous dans le temps. Cela veut dire que nous n'y étions pas, et que si personne n'est là pour nous dire ce qui s'est passé, nous dépendons exclusivement des sources originales. Prenons un exemple que nous connaissons et que nous apprécions tous, la Neuvième symphonie de Beethoven. Quand on la joue, on est soulevé jusqu'au ciel, bien entendu. Or, afin de comprendre réellement ce que Beethoven a sans doute voulu exprimer dans sa musique, il est essentiel de comprendre ce qu'est le classicisme, ce qui se passait à Vienne vers 1820, l'impact de la Révolution française sur la pensée de Beethoven.
C. M.: Je pense que c'est particulièrement vrai de l'étude de la Bible. Par exemple, quand on examine la vie de Paul, on comprend un peu mieux la transformation spectaculaire par laquelle il passa sur le chemin de Damas. Imaginez lire ses lettres sans comprendre cette transformation. La Bible est un merveilleux document qui nous donne suffisamment de détails sur les vies relatées dans le récit pour que nous appréciions la profondeur de ces mots et la manière dont ils découlent d'une expérience donnée.
L. P.: Vous savez, les idées de Mary Baker Eddy découlèrent de ce qu'elle vécut concrètement. Les mots qu'elle écrivit et publia dans Science et Santé naquirent de son expérience, de sa pratique et de ses prières. Et à mesure que nous comprenons sa vie, nous devrions nous attendre à ce que cette Comprehension jette encore davantage de lumière sur ce que nous comprenons de Science et Santé.
A. K.-H.: Vous avez amplement travaillé tous les deux sur les collections des écrits de Mary Baker Eddy et des objets qui lui ont appartenu. Vous êtes par ailleurs des scientistes chrétiens profondément sincères. Est-ce que ce travail avec les collections en question, cette meilleure connaissance de Mary Baker Eddy a changé la façon dont vous lisez Science et Santé?
C. M.: Vous voulez dire qu'elle l'a « révolutionnée ». Je peux affirmer honnêtement qu'avant d'entrer en contact avec cette documentation, je n'avais qu'une vague idée de qui était l'auteur par rapport aux concepts de Science et Santé.
L. P.: Quand j'étais petite, les idées de Mary Baker Eddy étaient importantes pour moi, mais pas sa vie. Étant anglaise, je ne voyais pas pourquoi il me fallait comprendre l'histoire d'une Américaine. Cela a donc été une grande révélation pour moi.
C. M.: Je pense que cette expérience nous a permis, à tous les deux, de voir comment le livre a découlé directement de ce qu'elle vivait. A bien des égards, Science et Santé est une œuvre autobiographique. Quand vous commencez à le lire en en comprenant le contexte et l'histoire, les pages prennent vie.
L. P.: Prenons Science et Santé et nous allons vous expliquer ce que nous voulons dire. Commençons par la Préface. Voici ce que Mary Baker Eddy écrit sur elle-même: « Avant d'écrire cet ouvrage, Science et Santé, l'auteur rédigea de nombreuses notes sur l'Écriture, notes qui n'ont jamais été publiées. C'était pendant les années 1867 et 1868. Ces efforts montrent combien elle était jusqu'à cette époque relativement dans l'ignorance du prodigieux problème de la Vie, et par quels degrés elle arriva finalement à le résoudre; mais elle apprécie ces notes tout comme les parents peuvent chérir les souvenirs des progrès de leurs enfants, et elle ne voudrait pas qu'on les modifiât. » (p. ix) Ces notes sur la Bible se trouvent à présent publiées à la Bibliothèque. Elle écrivit presque 630 pages rien que sur le livre de la Genèse. Et elle les conserva toute sa vie.
C. M.: Imaginez une femme très seule. Elle a eu une guérison majeure. Elle vit dans des pensions de famille, ne cessant de déménager, luttant pour Survivre. Toutefois, elle est éclairée par cette profonde révélation qu'elle a eue. Elle se plonge dans le livre de la Genèse afin de comprendre ce qui l'a guérie. Et elle commence à en donner un énoncé. Quand on lit ses notes, on a presque le sentiment de lire par-dessus son épaule.
Voici un extrait de la page trois pour vous donner une idée de ce qu'elle écrit: « Aux multitudes qui aspirent à connaître Dieu, nous demandons qu'elles examinent ce travail avec patience et sans préjugés, qu'elles explorent avec honnêteté et impartialité les Écritures qui contiennent cette science, afin qu'elles puissent mettre de côté le poids de la croyance qui les assaille si facilement et qu'elles courent avec joie sur le chemin tracé devant elles. » A0900, non daté, idem.
L. P.: J'aime ce travail, parce qu'il nous permet de suivre les traces d'une pionnière dans une science nouvellement découverte. Vous savez, être pionnier, cela génère beaucoup de brouillons. En effet, on voit de nombreuses ratures, là où Mary Baker Eddy réécrivit plusieurs fois la même idée. Elle revient même à maintes reprises au début de la Genèse, parce qu'elle n'aimait visiblement pas ce qu'elle avait écrit au départ. On constate donc une énorme quantité de travail et un grand don de soi à la lecture de ces notes.
C. M.: Des années de travail, c'est clair. Et le fait qu'elle ait conservé ces notes... Vous pouvez l'imaginer en train de les rassembler, de les mettre dans sa malle pour les emporter dans sa prochaine résidence et puis les garder pour le restant de sa vie.
A. K.-H.: Replaçons-nous, une fois encore, dans le contexte du XIXe siècle. N'est-il pas très inhabituel pour une femme d'interpréter les Écritures, et surtout le livre de la Genèse?
L. P.: Tout à fait. Dans l'Amérique du XIXe siècle, on se plaçait derrière l'autorité de la Bible pour restreindre l'activité des femmes dans la société et dans l'église. On se servait souvent de la Genèse, de l'histoire d'Adam et Ève pour définir le rôle de la femme: elle porte les enfants et est une « compagne domestique » pour son mari. Au XIXe siècle, les États-Unis étaient en effet une société essentiellement fondée sur la Bible. Donc, à partir du moment où une certaine interprétation de la Bible impliquait qu'une femme ne pouvait ni prêcher ni parler en public, qu'elle ne pouvait pas avoir les mêmes droits qu'un homme ni être ordonnée pasteur, cette interprétation déterminait la vision qu'avait la société de ce que pouvait faire ou ne pas faire une femme.
A. K.-H.: On se servait aussi des interprétations de la Bible pour justifier l'esclavage, par exemple.
C. M.: C'est vrai. Et l'on s'est appuyé sur des interprétations étriquées de la Bible pour justifier des choses comme l'apartheid en Afrique du Sud. Et même encore aujourd'hui, le débat sur l'ordination des femmes est influencé par la Bible.
L. P.: Nous avons ici une autre lettre de la collection, une lettre que Mary Baker Eddy adressa en 1903, à un ancien ministre du culte. Voici ce qu'elle écrivit: « La Bible me fournit un enseignement et des sujets de recherche pour toujours. Tous les autres livres paraissent et disparaissent, mais celui-ci survit pour tous les temps. » L05722, Mary Baker Eddy au Révérend Jesse L. Fonda, 12 décembre 1903, idem.
Nous possédons aussi une quarantaine des bibles personnelles de Mary Baker Eddy qui sont annotées par elle dans la marge. Elle n'avait pas peur d'écrire dans sa Bible. En lisant ces notes marginales, on se rend compte qu'elle consultait la Bible quotidiennement. Parfois même, elle écrivait la date à côté des versets concernés et décrivait l'événement pour lequel elle s'était tournée vers ce passage. Elle cherchait des directives, des réponses.
A. K.-H.: J'aimerais passer à un autre sujet qui est autant au centre de Science et Santé que de la Bible. Il s'agit de la quête de la guérison entreprise par Mary Baker Eddy et de son exploration des systèmes médicaux de son époque.
C. M.: Quand on lit Science et Santé, on y trouve de nombreuses références aux systèmes thérapeutiques du XIXe siècle. En effet, ce livre a été écrit par une femme qui passa la première partie de sa vie à chercher la guérison et qui examina donc les systèmes médicaux de son époque. Quand elle décrit un traitement de façon très détaillée, c'est qu'elle savait en quoi il consistait.
L. P.: Je pense aussi qu'il est utile de retourner dans l'Amérique du XIXe siècle pour repenser aux systèmes thérapeutiques de l'époque. Pour un grand nombre de gens, les maladies graves faisaient partie intégrante de la vie quotidienne, et Mary Baker Eddy n'était donc pas seule dans sa recherche de la guérison. Les malades n'étaient pas cachés dans des cliniques ou des hôpitaux; ils étaient là, devant vous. C'étaient des membres de votre famille, vos voisins, et ils comparaient les traitements et les manières d'aborder la guérison. C'étaient souvent les femmes qui prenaient soin des malades à la maison et qui devaient s'occuper de leur mari, de leurs enfants, de leur mère et de leur père.
Certains traitements utilisés au XIXe siècle, comme les médicaments, les saignées, étaient rudimentaires, et les femmes cherchaient donc à administrer des traitements plus doux à leurs malades. Or, à l'époque, il existait en Amérique une autre alternative bien établie qui était arrivée en 1825.
A. K.-H.: Mary Baker Eddy a dû remercier les Allemands pour cette méthode, parce que c'est Samuel Hahnemann, de Saxe, en Allemagne, qui élabora, vers la fin du XVIIIe siècle, un système qu'il appela l'homéopathie. Cette méthode abordait le traitement d'une façon différente. Vous connaissez ce proverbe: « Qui peut le plus peut le moins ». Appliqué à l'homéopathie, il pourrait se traduire par la devise suivante: « Ne comptez pas sur plus de médicaments, mais sur moins. » Selon cette théorie, plus vous diluez un médicament homéopathique, plus il devient puissant.
C. M.: C'est le deuxième mari de Mary Baker Eddy, Daniel Patterson, qui lui permit de connaître ce système de guérison. Elle étudia l'homéopathie pendant de nombreuses années. Et elle affirme que ce qu'elle apprit grâce à cette méthode constituait une étape extrêmement importante de son parcours, car elle en avait tiré des concepts essentiels sur la nature mentale de la maladie. A. K.-H.: De ce point de vue, on pourrait appeler Mary Baker Eddy une pionnière dans ce qu'on appelle aujourd'hui la médecine corps/esprit. Mais, bien entendu, Mary Baker Eddy alla plus loin en découvrant que c'est l'Entendement divin, Dieu, qui seul guérit.
L. P.: J'apprécie beaucoup cependant qu'elle reconnaisse l'importance de ses premières recherches et qu'elle ne les ait pas omises dans Science et Santé. Elle y parle en effet de ces années passées à explorer la médecine et de ce qu'elle en a retiré.
Je vais vous lire un passage de Science et Santé: « Lorsque je découvris que l'entendement mortel et erroné, nommé à tort entendement, produit tout l'organisme et toute l'action du corps mortel, mes pensées s'orientèrent dans de nouveaux canaux et m'amenèrent à la démonstration de la proposition que l'Entendement est Tout et que la matière n'est rien, proposition qui est le facteur principal dans la Science de l'Entendement. » (p. 408)
A. K.-H.: Aujourd'hui, les gens qui prennent Science et Santé désirent tout naturellement savoir qui était l'auteur.
L. P.: Je pense que oui. Au cours des dix dernières années, Science et Santé a été plus largement distribué et a eu de nombreux nouveaux lecteurs qui veulent en savoir davantage sur la vie de l'auteur et sur ses idées. A la fin de sa vie, en 1910, Mary Baker Eddy était l'une des femmes les plus célèbres des États-Unis. Ce n'est certes plus le cas aujourd'hui, mais elle suscite toutefois de plus en plus d'intérêt.
C'est pourquoi nous nous sommes dit que nous pourrions vous donner quelques exemples montrant à quel point la réputation de Mary Baker Eddy a grandi lors de cette dernière décennie. J'aimerais d'abord mentionner le fait qu'elle est entrée dans le National Women's Hall of Fame [sorte de panthéon sans sépulture pour les femmes célèbres aux États-Unis] pour « l'empreinte indélébile qu'elle a laissée sur la société, la religion et le journalisme ». Et ce fut très important, parce qu'elle a été ainsi reconnue sur le plan national, dans son pays. Ce qui n'avait pas toujours été le cas.
C. M.: Lors d'une émission hebdomadaire intitulée Religion and Ethics Newsweekly, et diffusée sur une chaîne de télévision nationale américaine. Il y était question, à un moment donné, des leaders religieux qui avaient exercé la plus grande influence au XXe siècle. Mary Baker Eddy y fut élue parmi les vingt-cinq figures religieuses les plus importantes du XXe siècle. Et cette liste comprenait des personnes aussi connues que Martin Luther King, le pape Jean-Paul II, le Dalaï Lama et pour tous ceux qui le connaissent ici, à Berlin, Dietrich Bonhôffer.
L. P.: A l'automne dernier, le Congrès américain a adopté une résolution commune soutenue par le sénateur Edward Kennedy qui reconnaît et loue l'œuvre de Mary Baker Eddy et la fondation de la nouvelle bibliothèque. En octobre dernier, lors d'une conférence sur la paix qui réunissait des femmes leaders religieux à Genève, en Suisse, deux discours ont fait allusion à Mary Baker Eddy, ses idées et sa vie.
C. M.: Cette reconnaissance publique et le besoin d'en savoir davantage sur elle constituent des aspects essentiels de la raison d’être de la Bibliothèque. Cela dit, d'autres facteurs sont tout aussi importants: en premier lieu la nécessité de préserver ces documents pour les générations à venir, de les conserver dans un lieu apte à faire face à l'intérêt grandissant qu'ils suscitent et de les garder dans le meilleur état possible. Ensuite, il était aussi nécessaire de protéger et d'étendre le copyright sur ces documents. Étant donné qu'ils ont été placés dans une institution ouverte au public avant le 1er janvier 2003, ils seront en effet protégés par le copyright pendant quarante-cinq années supplémentaires.
A. K.-H.: Certaines personnes remettent encore en question le fait de rendre publiques toutes les notes et lettres de Mary Baker Eddy, et se demandent si celle-ci en avait vraiment émis le désir. Que leur répondez-vous ?
L. P.: Il me semble que Mary Baker Eddy avait conscience de l'intérêt de son histoire. Quand on lit ses lettres et ses écrits, on se rend compte qu'elle savait qu'un jour on raconterait son histoire. Vers la fin de sa vie, elle dicta ce court texte à son secrétaire: « Quant à écrire mon histoire, cela ne doit pas être fait tant que je demeure ici, sur cette terre.» L15492, non daté, idem.
Elle avait une énorme correspondance que ses secrétaires se chargaient de classer et de conserver. Par ailleurs, Mary Baker Eddy demandait aux gens auxquels elle avait écrit de lui renvoyer ses lettres. Elle eut amplement l'occasion de les jeter ou de laisser des directives à leur sujet, mais elle n'en fit rien.
Mary Baker Eddy laissa des instructions à la fois dans son testament concernant sa propriété intellectuelle et ses notes et, dans des clauses précises du Manuel de l'Église où elle donne la responsabilité de ses écrits et de son legs au Conseil des directeurs de la Christian Science. Cette disposition n'a pas été prise à la légère au cours de ces dernières années. Je peux l'attester. Avant qu'on décide de le publier, chaque document, chaque lettre, chaque bout de papier a été lu attentivement et discuté. On a aussi beaucoup prié à son sujet, quelquefois pendant des semaines et des mois.
C. M.: Il est clair que Mary Baker Eddy désirait qu'on raconte son histoire, et elle voulait qu'elle soit relatée avec exactitude. C'était une femme pratique. Elle savait que cela ne profiterait ni à la postérité, ni à l'histoire, ni à la société de garder ces documents cachés, comme s'ils contenaient un secret que personne ne devait connaître. Cela n'aurait conduit qu'à créer la suspicion autour de sa vie.
A. K.-H.: Il est évident qu'elle conservait beaucoup de choses, et il est intéressant de remarquer qu'elle a gardé ses notes sur la Genèse ainsi que son exemplaire du New Manual of Homeopathic Practice [Nouveau manuel de pratique homéopathique] de Jahr. Elle ne l'a pas jeté en se disant: « A présent, je suis une autre voie. Je n'en ai plus besoin. »
C. M.: Et ce que nous vous avons montré aujourd'hui n'est qu'un tout petit échantillon de la collection. Elle avait conservé plus de trente-deux albums remplis d'articles de journaux sur une variété de sujets, indiquant ainsi le grand intérêt qu'elle portait aux nouvelles, à la société et au progrès de la pensée. Elle gardait ses sermons et leurs notes, ses rapports de publication qui montrent que Science et Santé voyait sa diffusion augmenter. On peut probablement dire que Mary Baker Eddy était l'archiviste de sa propre collection.
L. P.: C'est en fait pour fournir et favoriser une compréhension de sa vie et de ses œuvres replacées dans leur contexte qu'a été fondée la Bibliothèque Mary Baker Eddy. C'est également pour encourager les spécialistes à consulter les collections.
Et nous avons beaucoup de chercheurs qui viennent à la Bibliothèque.
C. M.: Plus de 70 000 visiteurs rien que pendant les six premiers mois.
A. K.-H.: J'ai fait partie de ces 70 000 visiteurs. Et ce qui m'a le plus impressionnée, c'est que la Bibliothèque est vraiment ouverte à chacun: à l'expert, au simple visiteur, au scientiste chrétien et aussi peut-être à la personne qui a juste besoin d'un endroit magnifique prêtant à la réflexion.
Quand je faisais des recherches pour mes propres livres, j'ai fréquenté de nombreuses bibliothèques et de nombreuses archives aux États-Unis, en Grande-Bretagne et en Allemagne. Et je dois dire que la Bibliothèque Mary Baker Eddy est vraiment ce qu'on fait de mieux dans ce domaine. Je suis très impressionnée par son niveau de professionalisme et le soin avec lequel les documents sont conservés.
Il y en a 28 000. On peut les consulter sur ordinateur en effectuant une recherche à partie d'un mot. Cela veut dire que, quel que soit le sujet qui vous intéresse, vous pouvez vous asseoir devant un ordinateur, taper le mot que vous cherchez et avoir devant les yeux, sur l'écran, tous les documents concernés.
L. P.: Il est parfois très difficile de lire les manuscrits originaux. Donc ces 28 000 documents ont été retranscrits, et vous pouvez maintenant les lire plus facilement. Mais vous avez aussi la possibilité de comparer sur l'écran l'image du document original avec sa transcription.
A. K.-H.: Je pense que nous devrions nous attendre à ce que, grâce à la Bibliothèque, Mary Baker Eddy prenne sa place de découvreuse parmi d'autres découvreurs célèbres dans le monde tels que Copernic ou Sir Isaac Newton ou même Albert Einstein. Mary Baker Eddy, celle qui a découvert la Science divine doit prendre la place qui lui revient dans l'histoire.
Après cet échange, Lesley Pitts et Chet Manchester ont présenté une vidéo, au cours de laquelle quatre historiens expriment leur point de vue. En voici des extraits.
Des historiens parlent de Mary Baker Eddy
n. d. r.: Les idées avancées par les intervenants suivants ne reflètent pas nécessairement les vues de la rédaction.
Ann Braude, directrice de l'Unité de recherche sur les femmes dans la religion, à la Faculté de théologie d'Harvard, U.S.A., David Hufford, professeur et président par intérim du département des sciences humaines à la Faculté de médecine de l'Université de Pennsylvanie, U.S.A., Judith A. Wellman, professeur d'histoire à l'Université de New York, Oswego, U.S.A. et Gillian Gill, titulaire d'un doctorat, qui a enseigné à Wellesley College et dans les Universités d'Harvard et de Yale,U.S.A. Elle est l'auteur d'une biographie de Mary Baker Eddy.
: Je pense que les meilleurs historiens sont ceux qui traitent de questions ayant un rapport avec notre situation actuelle. Nous devons nous demander ce que cette question signifiait pour les gens du passé. Quelle importance leur existence revêt-elle pour nous aujourd'hui? A de nombreux égards, les idées de Mary Baker Eddy et l'exposé de la Christian Science semblent avoir été écrits exprès pour nous. Et dans une certaine mesure, c;est le cas.
Avant de commencer ce travail, je n'avais qu'une vague idée de qui était Mary Baker Eddy, de ses œuvres et de ce qu'elle avait accompli; je ne connaissais d'elle que ce que pourrait en savoir un Américain moyen instruit. J'avais aussi étudié l'histoire des femmes. Dans ce domaine, les historiens ont joué avec ce qu'ils appellent les sphères distinctes des femmes et des hommes. Au XIXe siècle, la place de la femme était à la maison et peut-être à l'église, celle de l'homme était à l'extérieur pour gagner de l'argent au sein d'une économie capitaliste concurentielle et en pleine expansion.
Jusqu'en 1860, l'existence de Mary Baker Eddy correspond très bien à ce modèle. Elle écrivit de nombreux essais et poèmes, mais ils étaient tous sur le mode de la « vraire femme », où le foyer, le soin apporté aux orphelins et la religion constituaient ce que devaient être les activités d'une femme. Puis, de façon spectaculaire, après sa chute de Lynn, elle se met à écrire Science et Santé. Non seulement son style change mais on commence à voir la façon dont elle construit sur ces idéaux de la « vraie femme ». Elle passe d'une sphère domestique, religieuse, cantonnée à la maison, à un monde plus large. Elle adopte les valeurs de la religion et de la solidarité, qui étaient considérées comme des valeurs féminines, et elle déclare que, non, Dieu n'a pas de sexe.
: A la fin du XIXe siècle, quand Mary Baker Eddy écrivait et révisait Science et Santé, etqu'elle façonnait sa compréhension de la pratique de la Christian Science, elle y parlait de la réalité de l'Esprit dans le monde en tant que cause, quelque chose qui produit des effets réels, et d'ailleurs la plus fondamentale et la plus réelle des causes. Or même si la pratique de la religion était répandue au XIXe siècle, la plupart des religions occidentales majeures avaient séparé les causes spirituelles de l'état actuel de l'existence ici-bas. On comprenait qu'elles opéraient dans un passé apostolique éloigné et dans un paradis transcendant lointain. Mary Baker Eddy, elle, déclara avec force, clarté et insistance que l'Esprit est réel; il est là où nous sommes; il est présent; le monde est spirituel. Et si vous comprenez les choses spirituelles, cette compréhension produit des effets dans le monde, des effets importants.
Il existe des influences actuelles et d'autres propres au XIXe siècle qui prennent fortement position en faveur d'une causalité spirituelle. C'est sur le renouveau pentecôtiste du XIXe siècle, par exemple, que, plus tard, se sont appuyés le néo-pentecôtisme et le renouveau charismatique de la fin du XXe siècle. Ils affirment que oui, l'Esprit est réel et qu'il génère des causes, et qu'il se produit des guérisons. Or, l'une des différences cruciales qui rend uniques les enseignements de Mary Baker Eddy, c'est que la plupart de ces autres influences sont plutôt non intellectuelles ou presque anti-intellectuelles. Elles s'immergent totalement dans les sentiments, mais s'écartent de l'argument rationnel, de la déduction, etc. Considérez ensuite la guérison par la Christian Science qui est réfléchie, intellectuelle; elle se base sur l'argument, elle a ses racines dans les paroles des Écritures. Il est évident que c'est en partie la raison pour laquelle Mary Baker Eddy appela ce qu'elle enseignait, la Christian Science. Tout cela fait partie de ce qui est réellement unique et de ce qui est à notre portée, au moment, où à la fin du XXe siècle, nous sommes revenus à la spiritualité. En effet, je pense que l'une des conséquences les plus problématiques du Siècle des Lumières et de la façon dont la science, en Occident, a essayé de se bâtir, c'est la division de l'existence humaine entre la raison, qui appartiendrait à la science, et le sentiment dont l'art, la religion et quiconque le désirait, pouvait disposer. Et c'est l'insistance de Mary Baker Eddy à dire que non, ces choses vont ensemble, qui rend sa découverte si unique.
: Pour les femmes qui désirent occuper une place de leader dans le monde moderne, l'une des plus grandes difficultés qu'elles rencontrent, c'est cette idée que les femmes n'ont jamais dirigé. Les hommes ont mené le monde pendant des millénaires. Pourquoi cela devrait-il changer? Qu'est-ce qui est différent aujourd'hui?
En réalité, quand on étudie l'histoire, on s'aperçoit que, dans les faits, les femmes ont été des leaders par le passé, mais aucun document ne l'indique. On s'aperçoit que les gens qui géraient les documents, ceux qui décidaient quels écrits conserver, quels écrits méritaient d'être abrités dans des établissements afin que les futures générations puissent les consulter, ces gens étaient des hommes. Et les documents jugés précieux à cet égard, c'étaient les écrits des hommes. Il est donc très difficile de savoir ce qu'accomplissaient les femmes.
Cette décision de faire des écrits de Mary Baker Eddy le point central de cette bibliothèque constitue, comme nous le voyons là, un immense pas en avant où le point de vue d'une femme, ses écrits, ses actes, ses idées, son inspiration, est placé au centre même de la documentation historique. Pour me part, je ne vois aucune autre réalisation susceptible de revêtir une telle importance pour nous en ce qui concerne l'avenir du leadership des femmes et l'éducation des générations futures sur le rôle des femmes dans le monde.
Mary Baker Eddy est tout simplement un exemple incroyable: une femme à qui l'Esprit a donné le pouvoir de dépasser ce que la société affirmait devoir être leur rôle très limité. Elle ne prit pas au sérieux les restrictions que la société imposait à la féminité. Elle n'était tout simplement pas limitée par les attentes sociales de son époque.
Je trouve absolument stupéfiant le nombre de controverses qu'elle suscita de son temps, controverses provoquées notamment par ceux qui trouvaient ses idées profondément troublantes. On avait vraiment l'impression que si ces idées prenaient, alors, oh là là, les choses allaient changer! Et cela perturbait beaucoup certaines autorités religieuses, des journalistes et toutes sortes de personnages publics de son époque.
Je suis très impressionnée par le courage dont fait preuve l'Église de la Christian Science en désirant partager des informations sur Mary Baker Eddy avec des personnes en dehors de l'Église. Je vois en cela qu'il a été compris qu'elle n'est la propriété d'aucun groupe, qu'elle appartient, non seulement à ceux qui sont membres de l'Église, mais aussi au monde entier. Sa pensée est d'une grande importance pour le monde entier justement.
: Il existe une différence entre Mary Baker Eddy et certaines de ses contemporaines, je pense à Clara Barton, Catherine Beecher, Harriet Beecher Stowe, Elizabeth Cady Stanton, différence qui réside dans le fait que ses idées vivent dans le présent. Elle a fondé un mouvement qui existe encore aujourd'hui. Elle a écrit un livre qui est toujours lu, non pas simplement par intérêt historique ou comme une fiction: il est lu parce que les gens pensent toujours qu'il va leur parler, qu'il va, d'une certaine façon, changer leur vie tout comme des existences ont été transformées au XIXe siècle par sa simple lecture.
Cela ne veut pas dire que les gens qui vivent dans d'autres cultures, dans d'autres traditions religieuses, ne peuvent rien trouver dans Science et Santé. Je pense, au contraire, que Science et Santé est l'un des livres chrétiens susceptible d'être lu dans des cultures extrêmement différentes et d'être considéré d'une remarquable pertinence.
Fin de la vidéo
Une Bibliothèque ouverte sur le monde
C. M.: Nous aimerions inviter chacun de vous à rester en contact avec la Bibliothèque. Vous pouvez visiter son site Web, www.Marybakereddylibrary.org qui comprend la liste des manifestations organisées par la Bibliothèque, certaines ayant lieu en ligne, ainsi que certaines pièces tirées des collections.
L. P.: Nous continuons d'ailleurs à en ajouter et nous allons y insérer très prochainement une description complète de notre fonds.
C. M.: Nous avons aussi une revue qui est uniquement envoyée aux Amis de la Bibliothèque, ce que nous vous invitons à devenir. Ce magazine leur parvient quatre fois par an. Il comprend des études et des débats comme celui que nous avons eu aujourd'hui. Il vous donne un aperçu du contenu des collections. Et il vous replonge dans le contexte du XIXe siècle.
Achim Trapp: Quand j'ai visité La Bibliothèque Mary Baker Eddy pour le progrès du genre humain il y a trois semaines, j'ai été sincèrement ému en pensant à tous ces gens qui l'ont rendue possible, qui ont eu cette vision les conduisant à bâtir, à développer ces grandes idées et qui étaient si reconnaissants à Mary Baker Eddy pour ses idées qu'ils les ont mises à la disposition du public. Dans les années à venir, c'est donc par des expositions, son site Internet et grâce à des travaux de recherche que la Bibliothèque présentera à des millions de personnes, et dans le monde entier, la vie, les idées et les accomplissements de cette femme remarquable.
Propos recueillis parmi les participants à Berlin...
J'AI DIX-NEUF ANS et je n'ai pas encore lu Science et Santé en entier (juste quelques parties). Il y a quelques années, j'avais des difficultés à m'apprécier physiquement. J'ai donc demandé de l'aide à une amie praticienne de la Christian Science afin de trouver le réconfort. J'ai compris que j'étais l'enfant parfaite de Dieu, que Dieu m'a créée parfaite. J'ai trouvé les solutions dont j'avais besoin. Aujourd'hui j'essaie de lire Science et Santé et d'en parler à des amis, ce qui n'est pas tant facile pour moi. Je pense que chacun peut trouver les réponses dont il a besoin au moment où il en a besoin, grâce à ce livre.
Genève, Suisse
MA GRAND-MÈRE paternelle a entendu parler de la Christian Science avant la Deuxième Guerre mondiale à Paris. Mon père n'aurait pas survécu si une praticienne de la Christian Science n'avait pas prié pour lui. Pendant et après la guerre, ma famille a été protégée. Je connais la Christian Science depuis l'enfance. Je n'aimais pas beaucoup la lecture, mais avec la Bible et Science et Santé, c'était différent. Ils faisaient partie de la famille et je trouvais les réponses à mes questions en les ouvrant (au hasard !), après avoir prié.
Maintenant, mère de quatre garçons, je me tourne souvent vers la Bible et Science et Santé, pour trouver l'inspiration qui m'aidera, à mon tour, à montrer à mes enfants comment chercher et trouver de l'aide et des réponses dans ces livres merveilleux. L'inspiration que j'ai trouvée à l'Assemblée annuelle et symposium 2003 m'a donné envie de partager encore plus Science et Santé avec mon entourage. Quelle joie et quelle harmonie cela apporte!
Constance, Allemagne
