Nous savons par les Écritures que trois hommes au cœur simple, pleins d'amour envers Dieu, refusèrent de transiger avec certains ordres du roi Nébucadnetsar. Au son d'instruments variés et bruyants, les satrapes, les gouverneurs, les conseillers, les légistes et tout le peuple devaient se prosterner devant une statue d'or et l'adorer — rendre hommage au matérialisme. Mais ces trois vaillants adorateurs de Dieu ne se prosternèrent pas. Se dévouant pour n'obéir qu'à Dieu, ils restèrent spirituellement supérieurs au mesmérisme général.
Furieux de ce qu'ils ne cédaient pas, le roi Nébucadnetsar ordonna que ces trois hommes fussent jetés dans une fournaise ardente, où ils tombèrent tout liés. Ceux qui durent exécuter cet ordre étaient parmi les soldats « les plus forts et les plus vaillants » de l'armée; pourtant les flammes les dévorèrent. Mais lorsque ensuite le roi vint regarder ce qui se passait dans la fournaise, il fut saisi de stupeur. « Voici, » s'écria-t-il, « je vois quatre hommes déliés qui marchent au milieu du feu, et il n'y a en eux aucun dommage, et la forme du quatrième est semblable à un Fils de Dieu. » Puis s'adressant à ceux qu'il appelait avec respect les « serviteurs du Dieu souverain, » il leur dit: « Sortez et venez. »
La vision lumineuse et sainte qui se manifesta dans la fournaise indiquait le triomphe de la spiritualité sur la matérialité. La colère et la rage du magnétisme animal se fondirent devant la vérité, comme l'acier se fond à une chaleur intense. Tous les modes de l'erreur furent renversés. La croyance à la loi matérielle fut annulée. Malgré leur apparence catégorique, fatale, les décrets et les menaces de l'entendement mortel devinrent inopérants. Celui par l'ordre duquel les trois hommes avaient été jetés dans la fournaise les en fit sortir. Quant au peuple, on lui commanda, non plus de rendre hommage à une statue d'or, mais de ne point outrager Dieu. En toute humilité, le roi s'écria: « Béni soit le Dieu de Sadrac, de Mésac et d'Abed-Négo! »
Quand ces trois hommes sortirent indemnes de la fournaise, à la vue de tous, ce fut une admirable victoire sur l'injustice, la disgrâce, la persécution, la mort elle-même. L'autocratie, le despotisme avaient fait place à l'autorité de l'Esprit, et les jeunes gens se virent confier des charges importantes. Ainsi, pour réveiller le roi et lui faire reconnaître la suprématie divine, il suffit de trois hommes aimant Dieu et comptant sur Son pouvoir.
Dans la fournaise ardente, « la forme du quatrième » était si réelle, si tangible qu'elle devint visible au roi lui-même, malgré son incrédulité. Certainement ce qui, au sein des flammes, restait vivant, libre, actif, c'était la vivifiante idée-Christ, incorporelle, couronnée d'amour et puissante dans son humilité. Il s'avérait indestructible le vrai caractère maintenu consciemment par ces trois hommes, en butte aux outrages et à la haine. La Science Chrétienne nous apprend que l'idée spirituelle est toujours présente, qu'elle se manifeste à la conscience humaine de la façon la mieux appropriée. A la lumière de la Science divine, on voit apparaître la puissance et la maîtrise de l'homme spirituel.
Qu'est-ce qui rendit visible dans la fournaise l'idée spirituelle? Pour répondre à ceci, considérons l'attitude et les qualités des trois hommes. Dans une situation qui semblait désespérée, ils n'eurent recours pour leur délivrance qu'aux éléments réels et divins. Clairement d'accord avec le divin Principe, animés d'un saint zèle, ils étaient prêts à sacrifier complètement, s'il le fallait, la croyance humaine à la vie dans la matière. Comme ils s'étaient élevés jusqu'aux cimes de la soumission envers Dieu, aucun faux sens personnel n'obscurcissait leur vision du Christ Aussi la loi de l'Esprit pouvait-elle s'exercer en leur faveur d'une manière souveraine, sans aucune entrave. N'était-il pas divinement naturel que l'image de Dieu fût si nettement perçue par leur conscience qu'elle devint visible aux humains?
Ce que nous éprouvons par l'intermédiaire des sens physiques n'est jamais qu'un mode de l'entendement mortel. Ainsi, pour les trois jeunes gens, le problème n'était pas avant tout physique; il fallait vaincre, plutôt que le feu matériel, les flammes mentales de la colère résistant à la spiritualité. Les émotions et les passions brutales devaient être surmontées grâce à l'abrogation des prétendues lois matérielles. S'élevant plus haut que la fausse nature humaine entachée d'amertume et de ressentiment, ces trois hommes atteignirent les sphères spirituellement mentales où le feu ne pouvait entrer; il était donc divinement naturel qu'ils ne fussent pas brûlés. Quelle hauteur, quelle puissance devait avoir leur sentiment d'incorporéité et d'immortalité! Parce que l'homme réel, créé par Dieu, est à jamais uni au Principe divin, les forces du mal ne peuvent l'atteindre. En effet, qu'est-ce qui pourrait détruire les nobles qualités telles que le courage, l'obéissance, la bonté, l'amour? Dans Science et Santé avec la Clef des Écritures, Mary Baker Eddy écrit (p. 161): « L'inspiration sainte a créé des états d'esprit qui ont pu annuler l'action des flammes, comme dans le cas biblique des trois jeunes captifs hébreux, jetés dans la fournaise de Babylone; tandis que l'état mental opposé pourrait produire la combustion spontanée. »
Si ces trois hommes avaient essayé de vaincre le mal par des méthodes humaines, croit-on qu'ils auraient obtenu leur délivrance? S'ils avaient condamné le roi, déploré leur situation; si leur colère s'était enflammée; s'ils avaient simplement offert une résistance stoïque, s'ils avaient compté sur la justice humaine et fait de violents efforts pour l'obtenir, opposant à l'erreur la crainte, l'indignation, le ressentiment — sans doute y aurait-il eu « combustion spontanée, » en d'autres termes, destruction. Les défis, les supplications, les raisonnements humains, l'argumentation, les remontrances n'auraient pas même atteint le roi Nébudcadnetsar; mais dès qu'il entrevit le « Fils de Dieu, » ses dispositions se transformèrent et tout de suite il agit à l'encontre de ses décisions précédentes.
N'avons-nous jamais eu l'impression que nous étions dans une fournaise ardente, que les flammes de l'anxiété devenaient intolérables, que nos biens les plus chers se consumaient, que nos espoirs et nos idéals se changeaient en cendres? Bien qu'on ne nous jette pas dans une fournaise matérielle, sur le plan mental les pires passions humaines vomissent aujourd'hui leurs flammes; les forces souterraines de l'esprit mortel semblent produire des détonations et des bouleversements formidables. Les éléments matériels de la nature humaine prétendent faire rage; pleins de fureur, ils veulent comme autrefois nier et défier l'idée-Christ, forcer les mortels à se prosterner devant les fausses croyances et les images de la matière. Les menaces, les défis, la propagande du magnétisme animal voudraient, dans le bruit et les fanfaronnades, étouffer les idéals, détruire les réputations, exciter l'ambition déréglée, la haine, les rivalités. Par lui-même, l'esprit humain n'a jamais été capable d'éteindre ces brasiers d'erreur.
Ainsi dans des situations apparemment cruelles, c'est de notre état d'âme que dépend notre protection plus ou moins complète. Ceux qui s'approchèrent de la fournaise avec des pensées matérielles périrent dans les flammes, tandis que les trois hommes qui manifestaient la spiritualité ne furent pas atteints. Lorsqu'on croit au mal, on s'expose à ses feux. Si nous répondons à l'erreur par une autre erreur; si nous tâchons détouffer la rage de l'entendement mortel par des éléments personnels inflammables; si nous voulons éteindre les flammes de l'incompréhension en nous justifiant nous-mêmes — alors nos espoirs et nos buts risquent d'être consumés par l'intensité de nos propres réactions. La vision spirituelle n'est-elle pas la seule chose qui puisse nous affranchir?
La délivrance s'accomplit lorsque le moi humain fait place à l'élément divin. Pour rester indemne au milieu de la haine et des invectives, il faut une abnégation complète, un renoncement à tout ce qui, dans notre penser, pourrait fournir un aliment aux flammes. Bien qu'à vues humaines notre situation paraisse peut-être désespérée, notre pensée s'unit au pouvoir divin dès que nous sommes prêts à recevoir l'aide spirituelle en nous abandonnant à Dieu. En vérité, toutes les fois que la pensée s'élève jusqu'à l'amour désintéressé, on trouve la présence vivifiante du Christ et son pouvoir libérateur.
Lorsqu'on renonce aux tendances égoïstes, à l'instinct de la conservation, le mécanisme de l'esprit humain cède à l'admirable fonctionnement de la loi divine. Qui pourrait décrire la paix, la joie, la profonde tendresse de la nature divine et de ses bienfaisantes qualités? La gloire céleste jette ses doux rayons sur le cœur qui s'épanouit. Le voile se lève et les choses spirituellement belles, réelles, immortelles se reflètent dans la pensée docile à l'inspiration. Les impressions de l'Ame ont un vif éclat. Elle devient graduellement plus distincte et plus réelle la réflexion de la Vérité, l'image vivante de l'Amour parfait. Nous avons entrevu « le Fils de Dieu; » nous sommes arrivés à comprendre quelque peu la Science divine. Il n'est plus vague le concept de l'homme parfait, car nous voyons qu'il s'agit de notre vrai moi, ignorant la souffrance ou les mauvais procédés. Ainsi, lorsque apparaît l'idée-Christ, il est divinement naturel que les tisons de l'amertume ou du désespoir tombent en cendres et que se reflètent dans notre cœur l'humilité chrétienne, l'amour désintéressé, la tendresse indicible, nous apportant l'harmonie et le pouvoir spirituels. A la page 278 de Miscellaneous Writings, Mrs. Eddy déclare: « Seuls les hommes qui supportent l'épreuve de la fournaise reflètent l'image de leur Père. » Elle est donc d'une très grande portée la récompense de l'affliction, si la gloire de l'être divin en est le résultat.
Combien de temps nous sommes entourés de flammes, quelle est l'ardeur apparente du feu, jusqu'à quel point l'affliction semble imméritée — ce n'est pas là le point capital. Afin de résoudre le problème, il faut que chaque épreuve devienne pour nous une occasion de refléter le caractère divin et de développer le pouvoir spirituel qui permet la démonstration. Demeurons fermes jusqu'à ce que la Vérité remporte la victoire et que la démonstration nous affranchisse; alors nous serons libres, actifs, même au sein de la fournaise, et nous n'attendrons pas d'en sortir pour louer Dieu. Pierre s'en rendait compte lorsqu'il écrivait ces paroles rassurantes: « Mes bien-aimés, ne trouvez pas étrange d'être dans la fournaise de l'épreuve, comme s'il vous arrivait quelque chose d'extraordinaire. Mais réjouissez-vous dans la mesure même où vous avez part aux souffrances du Christ, afin que, le jour où sa gloire sera manifestée, vous soyez aussi dans la joie et l'allégresse. »
Quelqu'un qui se rattachait à une église Scientiste Chrétienne prit tellement à cœur certains discords qu'il résolut de quitter cette église. En vain d'autres membres s'efforcèrent-ils de dissiper les malentendus et de guérir la situation. Finalement, un ami lui demanda: « Dans ce problème, avez-vous tâché de voir le “Fils de Dieu”? » Méditant cette question, le Scientiste comprit que s'il se retirait sans avoir gagné d'abord la vision spirituelle du Christ, non seulement il se priverait lui-même, mais il priverait l'église de ce qu'apporte une victoire spirituelle — progrès qui nous élève et nous purifie. Revenant sur sa décision, il remplaça son point de vue personnel par la grâce rédemptrice de l'idée divine; il réduisit l'erreur à l'irréalité et parvint ainsi à démontrer une solution chrétienne. Dans Miscellany (p. 303), Mrs. Eddy déclare: « Il nous faut beaucoup d'humilité, de sagesse et d'amour si nous voulons préfigurer et goûter par avance le ciel au-dedans de nous. Cette gloire s'épure dans la fournaise de l'affliction. »
Si nous voulons prouver qu'elles sont irréelles les erreurs attisant les feux de la haine ou de la crainte, nous devons abandonner les abstractions pour arriver dans les sphères de la réalisation spirituelle. Prenons conscience de notre individualité réelle, de sa majesté, de son empire; alors, même si l'erreur arrogante veut nous faire courber la tête devant son prétendu pouvoir, nous serons maîtres de la situation. Fixant nos regards sur « le Fils de Dieu, » nous maintiendrons, avec le pouvoir de la démonstration, la vision triomphante de l'Amour; nous résisterons aux flammes des persécutions et de l'opposition par la douce essence de la grâce divine. Les pseudo-forces de l'erreur ne peuvent nuire à ceux qui par la vertu divine surmontent les erreurs humaines. Pourquoi ne suivrions-nous pas l'exemple des trois hommes dont nous parle la Bible, cessant de consentir aux croyances agressives de l'entendement mortel pour nous mettre d'accord avec le divin Principe? Ainsi nous prouverons que notre vie et nos entreprises ne sont point dominées par un Nébucadnetsar — une personne, une circonstance, l'opinion commune ou les influences personnelles.
Ce sont des conquérants à la fois humbles et forts ceux qui, par la Science divine, trouvent dans les catastrophes et les défaites des occasions de démontrer la suprématie de l'Esprit. Les victoires concernant la vision, la révélation, l'amour et la prière, s'obtiennent par des luttes silencieuses dans le cœur humain; leur gloire divine élève à tel point la conscience que le monde incrédule ne peut manquer d'en reconnaître les effets. Les éternelles victoires de la Vie, de l'Amour, remportées grâce à la compréhension de notre filialité divine, ont une immense portée, même s'il s'agit de petits problèmes ou de succès que nul ne proclame. Dans ces triomphes du christianisme scientifique, on vainc non pas les personnes, mais les fausses croyances et les forces hypothétiques de la matière. Les conquêtes de l'Ame impliquent non point la spoliation ou le cruel assujettissement des humains, mais l'amour, la miséricorde, la fraternité. Ayant passé par le creuset des tribulations, le disciple sera peut-être appelé à quelque poste responsable, où il pourra rendre de grands services en utilisant le pouvoir spirituel dont il eut des preuves; toutefois la vaine gloire, l'adulation personnelle, l'enthousiasme délirant n'interviendront pas. Quand on triomphe dans la fournaise ardente, on en sort sans tristes souvenirs ou vains regrets, mais avec des chants de louange et de gratitude.
Aujourd'hui, bien des peuples semblent être dans la fournaise des grandes afflictions. Mais l'humanité sort de sa torpeur; elle demande qu'on ouvre les portes de la fournaise, que le christianisme agisse et manifeste son pouvoir. Pourquoi les forces de la divinité n'élimineraient-elles pas les prétendues forces de la matérialité? Déjà, grâce aux enseignements de la Science Chrétienne, l'idée-Christ transforme la pensée du monde, les faux concepts des peuples et des gouvernements. Elle marche au milieu des flammes purificatrices que représentent les épreuves humaines; elle prouve ce que Dieu peut faire pour l'humanité. Rappelons-nous la fidélité qui jadis refoula les vagues du matérialisme; comme Scientistes Chrétiens, prions avec ferveur pour démontrer que le pouvoir par lequel Dieu nous sauve est divinement naturel et ne doit pas être tenu pour miraculeux. Alors nous verrons rapidement approcher le jour où tous les peuples, élevés et purifiés, contempleront « le Fils de Dieu. » Ils sortiront de la fournaise du matérialisme pour entrer dans la Science de l'être, transformés par la vision de l'œuvre divine — de l'homme spirituel et parfait.
