Dans Un Éditorial intitulé « Attention à la culture de l'antagonisme », paru dans le numéro du 12 juin 1995, le rédacteur en chef de U.S. News & World Report, Mortimer B. Zuckerman, mettait en garde contre le caractère agressif des débats publics aux États-Unis. Il écrit: « Dans une société aussi vindicative, il est pratiquement impossible d'unifier la nation ou de panser ses plaies. » Puis il conclut: « En ces temps difficiles, il nous faut adoucir notre rhétorique, bien peser nos mots, même lorsque nous dénonçons ou corrigeons les maux actuels. Nous ne pouvons permettre à l'esprit de division et à la colère de remplacer le thème national de l'Amérique, e pluribus unum » (p. 94). E pluribus unum, la devise des États-Unis, qui signifie « un à partir de plusieurs », renvoie à l'idée d'un gouvernement unique résultant de l'union de nombreux États.
Tandis que nous prenons sur nous-mêmes de modérer nos propos et de bien peser nos mots (ce qui est indispensable), il nous est tout aussi utile de « bien peser nos pensées » pour nous assurer qu'elles tendent vers l'harmonie dans les relations humaines: que les efforts de beaucoup s'unissent afin de rendre l'existence sûre, agréable et fructueuse pour tous. Ce que nous approuvons ou désapprouvons mentalement peut changer du tout au tout notre façon de vivre et de travailler ensemble dans l'harmonie, que ce soit à la maison, dans notre quartier, à l'église ou dans le monde en général.
Il me vient ici à la pensée une réflexion de ma mère. Elle a dit un jour: « Si je m'entends si bien, dans la cuisine, avec mes enfants et leurs conjoints, c'est parce que je sais qu'il y a plus d'une manière de faire les choses. » Si elle avait affirmé, de façon préparation qu'il n'existait qu'une seule bonne méthode, la préparation des repas avec elle aurait été sans doute beaucoup moins agréable. Lorsque les différences de points de vue et de méthodes entre les êtres humains ne sont pas admises, quelque chose d'aussi fondamental dans la vie quotidienne que la préparation des repas peut tourner à la dispute, voire à l'opposition systématique: une personne se dressant contre une autre, tandis que les accusations pleuvent. Telle est la nature de cette « culture de l'antagonisme » dans laquelle les personnes, les groupes et les gouvernements cherchent à manipuler d'autres personnes, d'autres groupes et d'autres gouvernements pour faire en sorte qu'ils se conforment à ce qu'ils considèrent être l'unique manière juste de penser et d'agir.
Respecter les différences. Se retenir d'imposer sa volonté. Ces qualités sont essentielles au progrès humain. Sont-elles néanmoins suffisantes pour « dénoncer les maux actuels et les corriger » ? Non, mais elles constituent un bon point de départ. Chacun de nous doit conformer ses pensées et ses actes à la volonté de Dieu, le bien. Ce n'est pas une responsabilité dont quelqu'un puisse nous charger ni nous décharger. Lorsque nous l'acceptons, cependant, nous contribuons, de façon très efficace, à débarrasser notre existence et le monde du péché et de la maladie. Nous conformer à la volonté de Dieu nous donne l'empire sur le mal; cela ne conduit pas à des conflits de personnes.
Christ Jésus nous donne ce conseil intéressant: « Accordetoi promptement avec ton adversaire, pendant que tu es en chemin avec lui. » Matth. 5:25. Et lorsqu'elle explique, dans Science et Santé, comment guérir les malades au moyen de la Science du Christ, Mary Baker Eddy fait cette allusion au conseil de Jésus: « "Accorde-toi promptement avec ton adversaire, pendant que tu es en chemin avec lui." Ne souffrez pas que les prétentions du péché ou de la maladie se développent dans votre pensée. » Puis, un peu plus loin sur la même page, elle écrit: « Faites en sorte de ne pas tomber d'accord avec les symptômes précurseurs d'une maladie chronique ou aiguë, que ce soit un cancer, la tuberculose ou la variole. » Science et Santé, p. 390.
Pour « ne pas tomber d'accord » avec le péché et la maladie, nous nous fondons sur le fait que ces maux n'ont pas été créés par Dieu, et ne sont pas en acord avec Sa volonté. Leur donner notre consentement reviendrait à désapprouver Dieu ainsi que Sa création parfaite. Cela reviendrait à nier la vérité de l'être, à savoir que Dieu, l'Esprit, est le Principe divin qui crée et gouverne tout, et que l'homme et l'univers sont son reflet spirituel, parfait. Il vaut bien mieux nous attacher à prouver que l'homme se conforme à la Vérité et à l'Amour immortels, omnipotents, et ainsi vaincre le véritable adversaire: la croyance mortelle erronée, impuissante. Nous avons toujours la possiblité de suivre ce conseil que nous donne Science et Santé: « Élevezvous dans la force consciente de l'esprit de Vérité pour renverser l'argumentation de l'entendement mortel, autrement dit la matière, dressée contre la suprématie de l'Esprit. Effacez les images de la pensée mortelle ainsi que ses croyances à la maladie et au péché. Alors quand tu seras livré au jugement de la Vérité, Christ, le juge dira: "Tu es guéri !" » Ibid., p. 390–391.
Tout cela s'applique-t-il aux événements de la vie quotidienne et aux problèmes de société ? Étre en accord avec la Vérité et l'Amour et en désaccord avec le péché et la maladie, cela aidet-il les gens à découvrir qu'ils peuvent s'entendre au lieu de s'opposer les uns aux autres ? Oui, parce qu'il ne s'agit pas de l'influence qu'une personne exercerait sur beaucoup d'autres; il s'agit de l'influence divine.
Quelqu'un peut laisser la lumière de la Vérité inonder sa conscience, mais cette lumière n'est pas limitée, et étant donc infinie, elle éclaire non seulement la personne qui la reçoit, mais aussi tous les autres. Si vous n'aimez pas la façon dont agit quelqu'un, et si, au lieu de l'affronter, vous disciplinez vos propres pensées pour qu'elles s'accordent avec l'amour inconditionnel de Dieu, toutes les personnes concernées sentiront la présence de l'Amour divin. L'Amour divin modérera, et corrigera si nécessaire, vos pensées, vos paroles, vos actes et les leurs. C'est ainsi que vous et moi contribuons à établir des relations, des familles, des églises et des sociétés dans lesquelles les gens se rapprochent afin d'agir en parfaite unité pour le bien de tous.
Dans le royaume de Dieu, c'est-à-dire sous l'autorité suprême de Dieu, tous sont en accord avec Lui; tous reflètent Sa nature bonne et aimante. C'est là la vérité de l'être. Nous devrions tendre tous nos efforts vers ce but: prouver que le mal n'a absolument aucun pouvoir et n'est pas dans la nature de l'homme créé par Dieu. Dans la mesure où chacun de nous assume cette responsabilité fondamentale envers Dieu, envers lui-même et envers les autres, nous devenons tous plus tolérants face aux différences d'opinions. C'est exercer de façon désintéressée notre droit divin à la domination spirituelle, que de vivre et travailler avec les autres sans éprouver le besoin de les obliger à penser et à agir comme nous. Nous constatons alors que la volonté de l'Amour divin a pour effet de corriger nos erreurs et de nous unifier. Nous découvrons même qu'il existe de nombreuses façons de faire la volonté de Dieu... y compris dans la cuisine !
