Qui n’a pensé, certains jours: « Je devrais prier davantage » ?
Consacrer sa vie à la prière... Il nous est peut-être arrivé de penser qu’un jour nous aimerions bien donner à la prière une plus grande place dans notre vie, entretenir des relations plus étroites avec notre Père; nous aimerions que notre vie soit définie davantage par la réalité divine de l’être, qui ne change pas, et moins par les contours anguleux des circonstances humaines.
Mais il semble parfois exister mille et une raisons de ne pas prier davantage, assez, en fait, pour remettre toute sa vie une prière quotidienne régulière à plus tard. Nous avons peut-être pris l’habitude de penser que la prière est à réserver surtout aux moments difficiles. Ou bien nous considérons que la prière est une activité intellectuelle, un peu comme une dissertation qu’on doit rendre et qu'on ne sait pas trop par quel bout commencer. Peut-être encore percevons-nous la prière comme l’occupation naturelle des « religieux »: ministres du culte, moines, ou praticiens de la Science Chrétienne. Il se peut enfin que nous ayons une attitude positive à l’égard de la prière, mais que nous ayons simplement pris l’habitude de ne pas prier beaucoup.
Il nous arrive pourtant de sentir intuitivement que si nous voulons un jour parvenir à faire de réels progrès spirituels, nous serons bien obligés de prier, et ce, de façon plus suivie, plus efficace, plus vivante. Alors dirons-nous peut-être, comme l’un des disciples de Christ Jésus: « Enseigne-nous à prier. »
Dans la prière, comme dans tout ce qui touche à nos progrès, deux phases peuvent sembler difficiles: le démarrage et la persistance !
Mais il arrive que la simple bonne volonté de s’y mettre, de faire un tout petit pas en direction d’une vie consacrée à la prière, nous révèle un fait surprenant: nous ne sommes pas seuls ! Dieu Lui-même est à nos côtés, orientant et affermissant ce pas initial. Puisque la prière, après tout, concerne Dieu, il n’est pas si étonnant que nous sentions la main divine dans la nôtre.
Persister dans la prière n’est pas toujours facile, mais c’est toujours tonifiant. Quand nous nous y mettons, nous nous heurtons parfois à toute une liste de raisons de ne pas poursuivre. Par exemple, la situation pressante qui nous avait catapultés dans la prière s’est stabilisée et nous retombons insensiblement dans d’anciennes façons systématiques de penser comme celle-ci: avoir l’idée que nous devrions prier et ne pas la suivre, ne pas avoir envie de faire l’effort nécessaire pour continuer à prier. Mais le genre humain ne peut éluder la prière, communion sincère avec Dieu, qui change de façon si radicale notre manière de concevoir et de vivre la réalité. Comme l’exprime ce cantique bien connu (Hymnaire de la Science Chrétienne, nº 284): « Prier, c’est l’immortel essor, / Le souffle du chrétien. »
Parvenus à un certain point, nous poursuivons donc, pour découvrir que persister dans la prière apporte sans doute la plus grande joie qui se puisse imaginer.
Plusieurs personnes ont fait part à la rédaction des périodiques de ce que leur a apporté la prière et nous avons pensé que ces récits pourraient aussi inspirer les lecteurs de cette rubrique. Voici donc les remarques d’une dame de l’ouest des États-Unis qui s’est trouvée impliquée dans une poursuite judiciaire lourde de conséquences, qui l’a forcée à « élargir de façon radicale [son] concept de la prière », puis le récit d’un homme, en Suède, qui a tiré une leçon fondamentale d’un incident survenu au passage du rideau de fer et, pour finir, les commentaires d’un praticien qui trouve que l’allusion de Jésus au « grain de blé », dans l’Évangile de Jean, guide de façon merveilleuse sa prière.
« Ma terreur s’atténua »
Pendant de nombreuses années, j’ai concentré mes prières sur moimême et sur mes proches. Le fait de devoir m’occuper d’une famille qui s’agrandissait, ajouté à une conception quelque peu limitée de la prière, empêchait mes pensées de dépasser le cercle familial. Puis vint le choc d’une épreuve, dans laquelle se trouvaient impliqués toutes sortes de personnes, de systèmes et de professions, et qui m’a forcée à élargir de façon radicale mon concept de la prière.
Je me suis trouvée plongée en toute innocence dans une situation juridique au climat hostile qui était lourde de conséquences à long terme. Cette épreuve, au cours de laquelle je plaçai ma confiance en Dieu au jour le jour, dans mes prières, dura de longs mois. J’eus à livrer de nombreux combats avec la crainte, la consternation, l’accablement. Il était impératif que je discipline ma pensée. Chaque matin, au réveil, je devais déclarer pour moi-même que mon seul devoir était de servir mon Dieu, du mieux possible, au moins ce jour-là.
Des ressources spirituelles me permettaient d’avancer et me procuraient repos et réconfort. Par exemple, mon Hymnaire [de la Science Chrétienne] était à côté de moi dans la voiture quand je me rendais, chaque jour, au lieu désigné et je le consultais souvent pendant l’attente aux feux rouges. Je dois admettre que, pendant un certain temps, j’ai eu l’impression de laisser le ciel pour l’enfer en quittant mon foyer chaque matin. Puis vint le jour où je fus capable de choisir mes propres termes de survie et où je résolus d’emmener le ciel avec moi. Je ne tardai pas à me rendre compte qu’aucune apparence de mal et d’injustice ne pouvait me dérober la paix et la joie auxquelles j’avais droit, à moins que je ne l’y autorise. Il ne s’agissait pas de faire un effort de volonté, mais de céder à la réalité de la bonté infinie de Dieu et de Sa justice. Ce que je savais être vrai devenait pour moi un refuge; plus je m’y attachais, plus céleste devenait mon existence quotidienne. Dans la mesure où j’entretenais ces pensées angéliques, j’étais soutenue, heure par heure.
Un après-midi en particulier, comme mon regard survolait cette arène où régnaient le conflit et l’opposition, je pris conscience de la fragilité de ma vie humaine maintenant. En voyant les visages de ceux que j’aurais pu haïr, j’ai soudain ressenti un amour débordant pour chacun d’eux. C’était comme si nous étions des voyageurs réunis dans un petit bateau balloté par une tempête terrible, chacun dépendant des autres pour amener le fragile esquif à la sécurité du port. En cet instant précis, je me suis sentie plus heureuse que jamais. Il n’y avait aucun dilemme, aucune division, aucun ennemi. Cette présence de l’amour devint une prière de compassion pour chacun de nous. Il s’ensuivit une certaine harmonie, de l’apaisement, et ma terreur s’atténua.
Maintenant que cette épreuve est terminée, je comprends et j’apprécie davantage la façon dont a réagi Christ Jésus, lorsqu’il s’est trouvé face à la foule (Matth. 9:36): « Il fut ému de compassion pour elle. » Son amour n’excluait personne. Sa prière, que nous appelons la Prière du Seigneur, ne commence pas par « mon Père » mais par « notre Père », et elle se poursuit jusqu'au bout au pluriel. Cette prière chrétienne, qui nous est si chère, nous fait comprendre que nous sommes membres de la famille de l’homme, que nous devons avoir de la considération et prier les uns pour les autres, « car nous sommes frères » (Gen. 13:8).
Ma façon de prier
[Comme l’auteur de la lettre de Suède, ce praticien évoque la nécessité d’une prière détachée de soi-même.]
Quand je prie, j’essaie de me rappeler le « grain de blé » mentionné par Christ Jésus dans le douzième chapitre de l’Évangile de Jean.
Jésus dit (verset 24): « En vérité, en vérité, je vous le dis, si le grain de blé qui est tombé en terre ne meurt, il reste seul; mais, s’il meurt, il porte beaucoup de fruit. » Jésus, bien sûr, parlait de son crucifiement et de sa résurrection. Mais j’ai constaté que ses paroles s’appliquent particulièrement bien à l’activité de la prière.
J’aime beaucoup ces paroles de Jésus, parce que c’est l’essentiel, à mon avis, dans la prière. Cela lui donne sa juste place: la prière appartient à Dieu, non à moi, elle exige la seule participation de ma nature spirituelle détachée de moi-même, à l’exclusion de tout sentiment de la contrefaçon mortelle, si désintéressé soit-il. Mary Baker Eddy écrit (Science et Santé, p. 1): « La prière qui réforme les pécheurs et guérit les malades est une foi absolue dans le fait que tout est possible à Dieu — une compréhension spirituelle de Dieu, un amour détaché de soi-même. »
Pour moi, ce « grain de blé » qui meurt ne peut se comparer à la prière que si celle-ci émane de la nature spirituelle détachée de soi-même. Je n’affirme pas parvenir à ce détachement à chaque fois que je prie, mais j’y travaille de tout mon cœur.
Il est vrai qu’une contrefaçon mortelle semble toujours essayer de mettre son grain de sel et de prier. C’est comme un Monsieur je-sais-tout qui ne cesse d’intervenir et qui soit se jette sans réfléchir dans la bataille, soit se dérobe, saisi de crainte. Cette contrefaçon mortelle croit avoir de bons mobiles, pense que le sort des gens l’« émeut », mais comme elle part de la prémisse qu’il existe un mortel distinct de Dieu, elle ne prie pas comme il faut.
Dès que la « nature détachée de soi-même », qui est la nature spirituelle véritable de l’homme, prend la place, la prière peut avancer comme il se doit. Alors, quand nous prions, nous écoutons la parole de Dieu, au lieu de permettre à des opinions et à des sentiments personnels d’embrouiller les choses. Même la sympathie humaine la plus profonde ou la perspicacité personnelle la plus fine peuvent égarer la prière. Car si la prière commence par Dieu, pourquoi ne pas Lui laisser tout diriger ?
Cela permet de ne pas mêler la volonté humaine au travail. Alors, au lieu de prier en ces termes (peut-être avec une certaine exaspération): « Cela va forcément s’arranger ! », je suis amené à savoir vraiment ce qui « est » et ce qui « n’est pas ». Les vérités que je suis en train de percevoir restent alors au présent et à la voix active. Maintenant même, quelle que soit l’apparence de la fausse croyance, l’homme existe dans l’amour parfait d'un Père-Mère Dieu parfait.
Suivant la nature détachée de soi-même, comme l’a dit Mary Baker Eddy, Jésus « ne s’abaissa pas au niveau de la conscience humaine ni du témoignage des sens. Il ne tint pas compte de la remarque sarcastique: “Cette main paraît réellement désséchée, tant à la vue qu’au toucher”, mais il coupa court à cette vaine prétention, et détruisit l’orgueil humain en supprimant l’évidence matérielle » (Unité du Bien, p. 11).
Jésus nous ayant assuré que, si nous prions comme il faut, nos prières seront exaucées, que ce soit pour nous-mêmes, pour quelqu’un d’autre ou pour le monde (et les trois sont importants), nos prières peuvent avoir un poids énorme !
