Les journaux, les émissions spéciales de télévision, les panneaux devant les églises indiquent nettement, aux États-Unis, que les chrétiens tendent de plus en plus à accepter l’idée d’avoir recours à Dieu pour se guérir, non seulement de troubles émotionnels ou d’angoisse mentale, mais aussi de maux physiques.
De nombreux groupes de prière consacrés à la guérison se réunissent chez des particuliers. Diverses églises ont introduit des rites de guérison dans leurs services du dimanche, tandis que d’autres tiennent régulièrement des services de guérison en semaine. On reconnaît de plus en plus, que, pour trouver la guérison, on ne devrait pas négliger la prière ni les relations avec Dieu.
Dernièrement, notre Église a eu des entretiens avec d’autres chrétiens qui pensent que la prière joue un rôle important dans la guérison. Les personnes interrogées viennent d’horizons religieux très divers: nous avons parlé à des adeptes du courant charismatique, à des aumôniers d’hôpitaux, à une femme de lettres qui ne se rattache à aucune confession en particulier et à un professeur de séminaire. Nous avons pensé que certaines de leurs remarques pourraient vous intéresser.
Nous avons choisi des extraits de conversation qui nous semblent pénétrants et indicateurs de progrès. Vous ne serez peut-être pas entièrement d’accord avec les opinions exprimées, mais vous conviendrez probablement qu’elles incitent à réfléchir et méritent qu’on s’y arrête.
Il n’est pas dans nos habitudes de publier sur plusieurs pages des extraits de déclarations émanant de personnes qui ne sont pas Scientistes Chrétiennes et dont les convictions théologiques diffèrent des nôtres. Afin que ces extraits ne soient pas mal interprétés, il importe de comprendre un certain nombre de faits.
Les personnes interrogées ne sont pas entièrement d’accord entre elles sur la façon d’aborder la guérison, ni même sur son sens et ses implications. Elles ne s’accordent pas non plus avec la Science ChrétienneChristian Science (’kristienn ’saïennce) sur nombre de points fondamentaux. La plupart d’entre elles font preuve d’un certain intérêt pour le rôle joué par la Science Chrétienne. Mais, en même temps, toutes ces personnes ont des positions qui diffèrent fortement de la démarche de la Science Chrétienne en matière de guérison, parfois sur des points importants. En voici des exemples:
• Parmi les personnes interrogées, seulement deux pensaient que la guérison par la prière exige l’abandon, du moins dans une certaine mesure, de l’idée traditionnelle que la réalité est en général enracinée dans la matière et définie par elle.
• Aucune des personnes interrogées ne considérait, comme l’enseigne la Science Chrétienne, que la nécessité de rompre avec les points de vue traditionnels sur la réalité est si forte qu’on ne peut mêler avec bonheur la guérison spirituelle et la médecine matérielle, et que, dans le meilleur intérêt du patient, il faut faire un choix entre les deux.
Comme à l’ordinaire, les autres articles, éditoriaux et témoignages de cette publication expriment les convictions de la Science Chrétienne. Celui qui cherche une explication de la façon dont la Science Chrétienne aborde la guérison peut se référer à ces articles et au livre d’étude de la Science Chrétienne, Science et Santé avec la Clef des Écritures de Mary Baker Eddy, qui a découvert et fondé cette Science.
Il sera utile de noter que les passages qui suivent sont loin de refléter l’ensemble de la pensée d’une personne donnée ou de sa pratique de la guérison. Ce sont seulement des extraits de longues heures de conversations individuelles. Le sens ultime de ces extraits pourra varier selon la méthode de guérison par laquelle on l’amènera à sa conclusion logique.
Pour éviter de donner la fausse impression qu’il existe une grande convergence entre les Scientistes Chrétiens et les autres sur la manière d’aborder la guérison, nous soulignerons donc ici quelques-unes des différences fondamentales. La plupart de ceux que nous avons interrogés pensent que Dieu ne cause pas la maladie ni la souffrance, mais qu’Il les permet afin que l’homme puisse exercer son libre arbitre. La position de la Science Chrétienne sur ce point est radicalement différente. La Science affirme que Dieu, Père tout aimant et tout-puissant, ne cause bien sûr ni maladie ni souffrance, mais qu’à l’instar de tout bon père humain, Il ne les permet pas non plus. Entrevoir ce fait qui, il faut en convenir, va à l’encontre de ce que présentent les sens physiques, et vivre en conséquence, avec les implications spirituelles que ce fait entraîne, cela nous transforme et modifie les circonstances qui étaient si pénibles et si inquiétantes. Bref, c’est cette nouvelle optique spirituelle qui apporte la guérison.
Une manière différente de comprendre Dieu amène d’autres divergences encore entre les Scientistes Chrétiens et les autres chrétiens engagés dans la guérison, divergences sur la médecine et la psychologie, sur le rapport entre le corps et l’âme, sur la nature de la vie et ainsi de suite. Il faut reconnaître et respecter ces différences et apprécier les idées et les points de vue partagés.
Nous espérons que ces remarques, ainsi que les courtes biographies qui figurent à la fin de cet article, permettront à la fois de préserver l’intégrité des extraits et d’offrir la perspective qu’on pourrait avoir en lisant ces passages dans le contexte des entretiens complets.
Les questions sont regroupées en trois sections: « Essence de la guérison », « Situation actuelle de la guérison dans les églises chrétiennes » et « Quel avenir pour la guérison ? »
Essence de la guérison
Question: Quelles sont les conditions à remplir, selon vous, pour pouvoir se consacrer à la guérison par la prière ?
Réponse: Ceux qui veulent s’engager dans un ministère de guérison doivent comprendre qu’ils ne sont pas là pour servir leur propre intérêt, mais pour servir les autres. Ce ministère est pour nous un « lavage de pieds ». Il faut se ceindre du linge, se mettre à genoux et laver les pieds de la personne en face de vous.
aumônier protestant et professeur adjoint à l’Institut théologique d’Andover Newton (U.S.A.)
Question: Quelle est l’essence de la guérison ?
Réponse: Dans Every Whit Whole, j’ai dit que la guérison spirituelle n’est pas simplement une autre façon de guérir les maux physiques. C’est un concept entièrement différent de la situation, de la nature de l’être humain, du sens de la vie, de la raison pour laquelle nous sommes ici... Avez-vous déjà vu un enfant apprendre à lire ? Il trébuche sur les syllabes pendant un bon moment et, soudain, la lumière se fait. Et bien, la guérison, c’est un peu comme ça. L’horizon s’élargit.
, auteur de Every Whit Whole: the adventure of spiritual healing [Guéri tout entier: l’aventure de la guérison spirituelle]
Question: Comment expliquez-vous les guérisons de Jésus ?
Réponse: Jésus était totalement ouvert au flot de la grâce. Il est sans doute le seul être humain de toute l’histoire du monde à avoir été absolument transparent. C'est pourquoi, à mon avis, il pouvait dire des choses aussi incongrues, aussi arrogantes que: « Je suis dans le Père, et le Père est en moi. » Ce sont des paroles à se faire crucifier, non ? Si l'on considère Dieu comme la source de Vie, et personnellement, c'est ma définition de Dieu, alors Jésus nous dit: « Je suis dans la source de Vie, et la source de Vie est en moi. Je peux la donner, je peux déverser cette Vie en abondance. » A mon sens, c'est cela qu'il a fait. Ce qui s'est passé dans le Nouveau Testament, pour moi, ce ne sont pas des miracles, c'est naturel. Ce qu'il allait faire un peu partout, c'était normal, c'était ce que pourrait faire n'importe lequel d'entre nous s'il était transparent. L'une des raisons pour lesquelles nous parlons de miracles, c'est que cela nous décharge des responsabilités.
David Yohn
Question: A votre avis, qu'est-ce qui permettait à Jésus de guérir si efficacement ?
Réponse: Je pense qu'il y avait plusieurs choses. Il avait un pouvoir d'amour à un degré bien plus intense que tout ce que nous pourrions imaginer... L'une des choses surprenantes quand on lit les récits des guérisons de Jésus, c'est qu'il savait ce qui se passait dans le cœur des gens, même à distance. Je crois que c'est l'explication fondamentale de sa réussite extraordinaire en matière de guérison.
rédacteur en chef de Sharing [Partager], revue publiée par l'Ordre de Saint Luc (U.S.A.)
Question: Comment peut-on acquérir plus de spiritualité sur le plan individuel et obtenir de meilleurs résultats dans la guérison ?
Réponse: Il faut prier et encore prier, je ne cesse de le répéter. Nous, Américains, nous aimons le bruit. Nous ne pouvons pas supporter de rester assis tranquilles. Nous sommes parfois si occupés « au service de Dieu » que nous ne prenons pas le temps de passer un moment seuls avec Lui. Espérer en Dieu, cela prend du temps. Et cela demande de la discipline. Je pense que c'est le secret pour tout: espérer en Dieu et accepter de réserver le temps nécessaire. Je ne peux pas dire ce qu'un autre doit faire de son temps. Mais je sais ce qu'il me faut faire et je sais que je n'y passe pas assez de temps. Si je ne commence pas par une heure de prière, le reste de ma journée est perdu. Il ne s'agit pas de réciter des choses ou de rester sur sa chaise à lire. Il me semble parfois que c'est une heure pendant laquelle j'essaie de me mettre en harmonie avec Dieu. Mais c'est bien nécessaire. C'est même indispensable pour pouvoir tenir le coup le reste de la journée. Je pense donc qu'il est essentiel de prier et de développer cette capacité de prier.
, auteur de The Charismatic Movement: Is There a New Pentecost? [Le mouvement charismatique: assiste-t-on à une nouvelle Pentecôte ?]
Question: Et la prière ?
Réponse: Quand je me réveille, le matin de bonne heure, c'est le moment où Il [Dieu] semble me parler. Je comprends pourquoi Jésus se levait tôt le matin: c'était pour se ménager davantage de temps pour communier avec Dieu, en tête à tête. C'est une condition importante pour guérir...
Arthur W. Greeley
Question: Qu'est-ce qui ouvre la voie à la guérison ?
Réponse: C'est le désir d'avoir des rapports de plus en plus étroits avec Dieu. Si vous dites bonjour à quelqu'un, une ou deux fois par semaine, vous ne connaissez pas très bien cette personne. De même, si vous récitez une prière une ou deux fois par semaine, vous ne connaissez pas très bien Dieu. Il faut que Dieu soit pour nous une réalité vivante dans l'existence. C'est souvent quand les gens sont à toute extrémité, lorsqu'ils ont atteint une limite mentale, physique ou spirituelle, que Dieu leur devient réel, parce que tout le reste n'est plus là, ou ne marche plus... Ils se voient soudain obligés de compter sur un pouvoir plus élevé, sur une nature plus haute, qui les transcende, parce que tout ce qui est de ce monde, tout ce qui appartient au domaine du concret n'a pas marché et n'est plus là pour les soutenir. Ils ont donc besoin de puiser à une source qui soit au-delà d'eux-mêmes. Cela peut aussi se produire dans des instants de grande joie, ce n'est pas obligatoirement réservé aux moments de crise; mais malheureusement, on y vient en général pendant une crise.
, pasteur adjoint
de l'Église congrégationaliste Bethany,
Église unie du Christ, à Foxboro, Massachusetts, U.S.A.
et aumônier protestant affecté par le Conseil des Églises
de la région d'Attleboro à l'hôpital Sturdy Memorial
d'Attleboro, Massachusetts, U.S.A.
Question: Quels conseils donneriez-vous à ceux qui veulent se mettre à guérir par la prière ?
Réponse: Le plus important, à mon sens, c'est d'arriver au point où on croit que Dieu veut guérir et qu'Il veut faire du bien aux gens. On agit alors en conséquence et la guérison a lieu.
pasteur de l'Église
presbytérienne Westminster,
à Canton, Ohio, U.S.A.
Question: Comment concevez-vous la spiritualité, et quel rôle occupe-t-elle dans le processus de guérison ?
Réponse: La spiritualité, pour moi, c'est l'appropriation de la grâce. C'est la foi qui retourne vers la grâce, et qui non seulement y retourne, mais se tourne aussi vers les autres. Le Divin nous comble de sa grâce et nous devons prendre des décisions. Nous devons savoir si nous voulons nous approprier cette grâce... Guérison et spiritualité sont synonymes. La personne spirituelle est forcément un guérisseur, c'est pourquoi les grands saints de l'Église étaient des gens qui, pour leur plus grand étonnement, parfois, voire même à leur consternation, accomplissaient des guérisons. On ne peut être spirituel et ne pas être un guérisseur. Ce serait une contradiction dans les termes.
David Yohn
Situation actuelle de la guérison dans les églises chrétiennes
[Les remarques qui suivent reflètent la diversité rencontrée chez les chrétiens qui pratiquent la guérison. Parmi tous ceux qui ont été interrogés, les charismatiques ont tendance à être plus optimistes en ce qui concerne la propagation de la guérison que les fidèles des courants plus traditionnels. Mais presque toutes les personnes interrogées s'accordaient à dire que la guérison se trouve à l'heure actuelle dans une meilleure position, au sein des églises, qu'il y a dix ans.]
Question: D'après vous, comment le mouvement de la guérison a-t-il progressé au sein des églises chrétiennes ces dernières années ?
Réponse: Par à-coups. A mon avis, les gens ont eu tendance à percevoir la guérison comme une mission supplémentaire de l'Église, plutôt que part intégrante de cette Église ou une vie de prière. Ils l'ont vue comme une forme d'action supplémentaire, comme une sorte de comité rajouté après coup. On effectue des approches discrètes, mais on ne pénètre pas vraiment les théologies établies.
Question: Mais pensez-vous qu'il se soit manifesté des progrès ?
Réponse: Certainement. Je pense que la situation est meilleure même qu'il y a dix ans. Pour preuve, il y a le fait que je peux maintenant m'entretenir avec quelqu'un sans qu'on me regarde comme si j'avais deux têtes lorsque je parle de guérison. Il y a des gens, ici et là, qui ne vous regardent pas de travers. Je vous donne là une observation subjective, fondée sur une expérience personnelle. Mais il existe des preuves plus objectives: des livres de culte et des publications récentes d'origines diverses prêtent une plus grande attention aux rites liturgiques ou autres moyens liés à la guérison. Qu'on s'attende ou non à ce que ces moyens soient un jour utilisés, ces idées sont du moins publiées par les sociétés d'édition de ces églises, ce qui leur confère quelque authenticité. Cela sous-entend qu'une personne en position d'autorité s'est penchée sur la question de la guérison. De plus, on se sent plus libre d'en parler maintenant... Je pense que la guérison est dans une meilleure situation qu'avant, je ne pense pas qu'elle soit sur son déclin. Quelle direction les choses vont prendre maintenant, je l'ignore.
Linnea Prefontaine
Question: A quoi voyez-vous que les gens ont de plus en plus recours à Dieu pour se guérir ?
Réponse: L'acceptation du message de guérison a pris une ampleur phénoménale. En 1959, quand j'ai commencé à célébrer des services publics de guérison, cela ne se faisait dans aucune église presbytérienne, méthodiste ou autre. Et même si certaines l'avaient fait, je n'aurais pas su où les trouver. Mais, de nos jours, il y a des centaines d'églises qui célèbrent ce genre de services. De nombreuses autres, sans le faire elles-mêmes, sont toutes prêtes à accepter l'idée que la guérison est possible à notre époque. On insiste beaucoup sur les dons de l'Esprit, y compris celui de la guérison contemporaine. Cela devient de plus en plus fréquent, et je crois que cette idée va continuer à se répandre.
Question: Pensez-vous que la guérison va continuer à se développer dans les églises ?
Réponse: Je pense qu’elle va continuer lentement à faire son chemin. J’espère d’ailleurs qu’elle le fera lentement. Ce serait tragique si elle prenait comme un feu de broussailles dans toutes les églises.
Question: Parce qu’elle perdrait, à cette allure, toute sa substance ?
Réponse: Exactement. Elle n’a guère de substance à l’heure actuelle. C’est pourquoi vous la voyez s’estomper ou se perdre au profit de l’égocentrisme... Il se passe donc deux choses de nos jours: il y a la résistance normale des églises, mais on perçoit aussi des chemins de pénétration qui s’introduisent doucement dans ces églises et les font s’ouvrir, comme par exemple le fait que ces services sont publiés dans les livres de services.
David Yohn
Question: Quelles leçons devons-nous tirer, d’après vous, de la guérison pratiquée dans l’Église primitive et de son extinction progressive ?
Réponse: J’ai l’impression que l’une des raisons pour lesquelles non seulement la guérison, mais aussi la vitalité et un grand enthousiasme ont disparu de l’Église primitive, c’est que le christianisme est devenu la religion d’État et qu’on y a fait entrer, d’un simple geste de la main, des masses de gens du nord de l’Europe: « Vous êtes chrétiens, maintenant, c’est l’empereur qui l’a dit. » Il est évident qu’il n’y avait là aucun vrai christianisme, mais ceux qui étaient les plus malins pour faire leur chemin en politique ont commencé à exhiber un vernis, à dire les paroles et faire les gestes conventionnels; alors, certains de ceux qui les suivaient ont commencé aussi à se mettre le vernis et à faire les gestes.
Arthur W. Greeley
Question: Pourquoi s’intéresse-t-on maintenant davantage à la guérison, en particulier depuis ces trente dernières années ?
Réponse: Je pense que la conjoncture sociologique et théologique est favorable. L’un des éléments majeurs, c’est le siècle terrifiant dans lequel nous vivons. Notre génération est la seule à vivre au bord du désastre total. Genghis Khan a ravagé toute l’Europe. La peste noire fut dévastatrice. Mais ni l’un ni l’autre ne risquait de faire disparaître tout le genre humain. Maintenant, l’homme a entre les mains des armes bactériologiques et nucléaires qui ont le pouvoir d’annihiler absolument toute civilisation sur la planète... Tout cela est aggravé par l’arrivée du matérialisme et la perte de la foi, ainsi que par l’humanisme, c'est-à-dire l'idée que l'homme est une fin en soi et qu'il peut pratiquement résoudre tous ses problèmes par lui-même. Mais l'homme semble bien loin de pouvoir résoudre tous ses problèmes ! Pour pouvoir faire face à tout cela, il nous faut davantage qu'une heure de culte placide et paisible le dimanche matin. Les gens ont besoin d'un contact réel avec un Dieu réel.
Donald Bartow
Question: Pensez-vous que les événements récents aient éveillé un intérêt pour la guérison ?
Réponse: Personnellement, je me souviens d'un incident, vers la fin des années soixante, qui a contribué à éveiller mon intérêt pour la spiritualité et la guérison. C'était au cours de ma première année de séminaire. Je descendais, avec une amie, vers la place de Harvard. Apparemment, la police venait de fermer la sortie du métro, bloquant les gens à l'intérieur, à cause d'un début d'émeute. Passé le coin de la rue, nous avons vu le cordon de la brigade anti-émeute. J'ai eu un coup au cœur, parce qu'ils avaient l'air de sortir d'un autre monde. Ils avaient le visage complètement dissimulé par une visière. Des gants leur recouvraient les mains. On ne percevait rien d'humain en eux. Ils étaient munis d'engins à bombes lacrymogènes et ils étaient prêts à tirer. A cet instant, j'ai senti que toute vérité s'éclairait. J'ai compris pleinement la fragilité de la vie humaine, l'importance des veilles de prière, de l'esprit de mutualité, et le besoin de rencontres entre des personnes qui présentent de grandes différences. C'est cet incident qui, à coup sûr, a orienté ma spiritualité et mon intérêt pour la guérison.
, aumônier du chapitre
de la Cathédrale Saint Paul à Boston, U.S.A.
Quel avenir pour la guérison ?
Question: Pouvez-vous citer certains grands obstacles à la guérison par la prière de nos jours ?
Réponse: Dans les églises, beaucoup de gens disent que la guérison était un don accordé par Dieu pour prouver que le royaume de Dieu était venu sur terre et pour prouver que Jésus était le Fils de Dieu. C'est la théorie d'un don dispensé uniquement à cette époque-là. Jésus pouvait guérir et les disciples aussi, mais nous ne sommes pas censés en être capables de nos jours. C'est une bonne excuse pour esquiver ses responsabilités. Beaucoup de gens diraient que mes idées sont hérétiques, mais je trouve au contraire que c'est cette théorie-là qui est hérétique, parce qu'elle permet de se dérober à sa tâche.
David Yohn
Question: Pourquoi cette théorie a-t-elle tant prédominé ?
Réponse: En partie, je suppose, parce que si on apprend quelque chose dès l'enfance et qu'on n'a aucune occasion réelle de le remettre en question, on continue simplement à l'accepter et cela s'enracine en soi...
Arthur W. Greeley
Question: Comment se fait-il que la guérison par la prière prenne tant de temps pour se propager ?
Réponse: Oh, la plupart des gens croient en une vérité limitée. Ce que je veux dire, c'est que la plupart des gens ont l'impression qu'ils ne sont pas capables d'aborder ce qui dépasse leur perception actuelle, et ils n'en ont pas le désir. Ils font preuve à ce sujet d'esprit pratique. Ils veulent que cela soit payant et tout de suite. Ils veulent qu'on fasse quelque chose, et il leur semble que, dans la guérison spirituelle, on ne fait rien. Je pense que la discipline que cela exige n'attire pas les gens... Permettez-moi de vous dire une chose: la guérison spirituelle représente un drôle de travail, et je ne crois pas que les gens aient envie de le faire.
Question: La guérison spirituelle vaut-elle la discipline, le travail qu'on y consacre ?
Réponse: Certainement, et pour deux raisons: non seulement on se rétablit, mais on apprend des choses: on apprend à mieux se connaître, à mieux dominer sa vie, le bon et la mauvais, et à être plus tendre envers soi-même (la plupart des gens sont très durs avec eux-mêmes). On entend beaucoup parler de traitements médicaux dans lesquels le patient prend une part active à son rétablissement, mais autant que je sache, les méthodes spirituelles sont les seules à le permettre vraiment.
Michael Drury
Question: Pouvez-vous donner un exemple de la façon dont une mauvaise connaissance de Dieu a mis obstacle à la guérison ?
Réponse: A mon avis, pour beaucoup, Dieu est assis là-haut sur Son trône et Il a Son amour dans un gigantesque compte-gouttes. De temps à autre, quand Il est bien disposé, Il presse et la goutte tombe. Si vous avez de la chance, si c'est votre bon jour, la goutte peut tomber sur vous. On Le considère comme un Dieu capricieux qui, de temps en temps, exerce une petite pression, et l'amour tombe. Beaucoup de gens ont cette idée-là. Pour moi, au contraire, Dieu est un océan d'amour dans lequel on peut se baigner, s'immerger complètement. Dieu souhaite tellement que je plonge dans cet océan d'amour, qu'Il a envoyé son Fils unique pour me préparer la plage.
Donald Bartow
Question: Qu'est-ce qui peut empêcher la guérison ?
Réponse: Refuser de pardonner, c'est un obstacle. Il peut y avoir des moments où c'est le frein principal. Je me rappelle un membre de notre église qui a souffert d'une longue maladie et qui est mort. Je suis sûr que ce qui empêchait sa guérison, c'est qu'il ne voulait pas pardonner et, en plus, je suis certain qu'il le savait. Il n'y avait rien à faire pour qu'il pardonne. Il en a donc accepté les conséquences et il est mort.
Question: Vous dites donc que c'est nous qui faisons souvent obstacle ?
Réponse: Absolument. Dieu souhaiterait déverser sur vous et moi ce matin tout ce qu'Il a, toute la plénitude divine qu'Il voudrait nous voir posséder. Mais Il sait que nous ne pouvons en accepter qu'une petite partie, sinon cela nous brûlerait. Une des choses qu'Il fait tout le temps, c'est d'essayer de nous faire vivre des événements et des circonstances susceptibles d'élargir notre capacité de recevoir ce qu'Il nous réserve.
Arthur W. Greeley
Question: N'est-ce pas nous-mêmes, parfois, qui empêchons la guérison ?
Réponse: Mais oui. Tout être humain a en lui l'Esprit Saint, c'est-à-dire le Christ vivant. Une bonne partie de notre vie se passe habituellement à essayer de l'étouffer. J'ai cette vision de la source de Vie [Dieu] qui a sans doute de la peine, d'une certaine façon, à cause de nous tous et qui dit: « Tout est là. Vous avez tout ce qu'il vous faut. Vous pouvez être en bonne santé, parfaits, vous pouvez être guéris, vous pouvez aider les autres. Tout est là; tout ce qui vous reste à faire, c'est de vous l'approprier. Servez-vous-en ! » Et nous passons la plupart de notre temps à essayer de nous débarrasser du Saint Esprit de toutes sortes de manières.
David Yohn
Question: Quelle direction devrait prendre la guérison dans les églises ?
Réponse: Généralement parlant, je pense que, dans le ministère de guérison, on a eu tendance, jusqu'à maintenant, à éviter les cas vraiment difficiles, les cas de lupus, de SIDA, les stades avancés du cancer. Je pense donc qu'il y a une chose que nous devons faire si nous sommes engagés dans le ministère de guérison et si nous nous y intéressons, c'est d'avoir le courage de croire et de prier pour que la guérison touche aussi ces cas difficiles.
Arthur W. Greeley
Question: La pratique de la guérison chrétienne peut-elle s'étendre à d'autres domaines que celui de notre corps et de notre vie personnelle ?
Réponse: J'ai passé toute une période à prier pour la guérison de nos rapports avec les autres pays. Si nous avons de mauvaises relations avec un pays et que ce pays a de mauvaises relations avec le nôtre, qui s'en occupe ? Je l'ignore, mais l'Éternel m'a dit de prier. J'ai donc prié pour bien des choses de ce genre. Je n'avais jamais prêté beaucoup d'attention à l'idée du péché au niveau national et du besoin d'être pardonné. Et pourtant, l'idée de péché national et du besoin d'expiation de ce péché se trouve dans l'Ancien Testament, noir sur blanc... Je dois admettre que j'ai dû me débattre avec la question: « Qui suis-je pour faire cela ? » « Comment puis-je supposer, comment puis-je avoir l'audace, moi, Arthur, de penser que c'est quelque chose que je puisse faire ? » Oui, mais qui d'autre le fait, qui s'en occupe ?
Arthur W. Greeley
Question: Qu'est-ce qui devra se produire pour que la guérison chrétienne se répande ?
Réponse: Tout dépend de ce que vous entendez par guérison chrétienne, tout dépend si vous parlez d'une dépendance totale à l'égard de la prière ou d'une prière associée à des processus médicaux et psychologiques... De toute façon, je pense que cela viendra de la base. Je ne pense pas que ce sera quelque chose qui nous viendra du sommet, pour la bonne raison que les hiérarchies ne bougent que très lentement... Il faudra tout d'abord accepter l'idée que l'état émotionnel, spirituel a bien quelque chose à voir avec la santé physique... On commence à admettre qu'il existe des liens entre la vie intérieure et la vie extérieure. C'est un début. J'aimerais voir les gens établir des liens plus forts avec Dieu. J'aimerais voir les églises mieux capables de travailler entre elles. Si je pouvais faire un vœu, ce serait que les gens puissent connaître Dieu de façon intime, car c'est grâce à ces relations intimes avec Dieu que se produira la guérison.
Linnea Prefontaine
Question: Que l'Église chrétienne primitive peut-elle nous aprendre sur les progrès de la guérison ?
Réponse: Ce n'est pas l'éloquence qui faisait avancer l'Église primitive, c'est l'expérience. Et l'expérience, c'étaient les miracles. Lorsque Philippe s'est rendu en Samarie, il aurait pu y prendre la parole et tenir une conférence sur la paix de sept semaines, cela n'aurait pas rassemblé tous ces gens. Ils ne l'auraient jamais écouté. Mais les miracles, voilà ce qui a rassemblé les gens, et c'est bien ce qui se passe dans l'église de nos jours.
Donald Bartow
Question: Y a-t-il danger, à votre avis, que les églises fassent simplement de la guérison un rituel supplémentaire, un nouveau rite, qu'il ne nous reste de la guérison que le nom, et que l'engagement réel se perde ?
Réponse: C'est une question très pertinente. Effectivement, je pense que cette possibilité existe. Je pense en fait qu'à certains endroits, c'est déjà probablement le cas. C'est à rapprocher de la question plus générale: « Comment faire pour que la religion reste vivante en vous et en moi ? » Si nous dépendons de quelque chose qui s'est produit il y a vingt ans, cet événement va nous faire de moins en moins d'effet. Mais si cela continue à se produire et que des guérisons aient eu lieu non seulement il y a vingt ans, mais aussi la semaine dernière, alors la religion sera vraiment vivante et elle m'enthousiasmera... Il ne s'agit pas tant de gonfler les cœurs en permanence que de garder la foi vivante.
Arthur W. Greeley
Question: Quels conseils donneriez-vous à ceux qui pratiquent la guérison ?
Réponse: J'ignore ce que je dirais à tout un groupe de gens qui désireraient vivement en persuader d'autres des joies et des simples avantages physiques que procure la guérison spirituelle. Il y a bien sûr un temps pour parler et un temps pour garder le silence. Je suis pour ma part convaincue que si vous et tous les autres qui pratiquez la guérison spirituelle, vous la vivez intensément, vous n'aurez pas à ouvrir la bouche; ce sont les gens qui vous interrogeront, parce qu'ils voudront avoir un peu de ce trésor que vous possédez.
Michael Drury
Question: Que doit-on faire si l'on veut guérir par la prière ?
Réponse: Je pense que ce qu'il faut pour guérir les autres, c'est simplement être obéissant à ce qu'enseignent les Écritures. A mon avis, il n'est pas nécessaire d'avoir une éducation théologique... Ce qu'il faut, c'est obéir à Dieu et comprendre que Dieu veut guérir, comprendre que vous pouvez être un canal pour cette santé parfaite et que les gens ont droit à la santé... Vous qui êtes Scientiste Chrétien, vous êtes dans un mouvement qui croit que Dieu veut guérir et qu'Il veut Se servir de vous pour Son intégralité... Mais si vous n'y prenez garde, vous allez courir dans tous les sens en parlant du mouvement, passer votre temps à lire des choses sur le mouvement, à suivre le culte dans votre église et à tout faire dans l'église, sauf la guérison. Vous serez un praticien qui n'a jamais aucune pratique. Le tout n'est pas d'en parler, il faut le faire !
Donald Bartow
Notice biographique des personnes interrogées, par ordre de publication
David Yohn: aumônier et professeur adjoint à l'Institut théologique Andover Newton, à Newton, dans le Massachusetts, U.S.A. Il donne, avec sa femme, Craig Millett, un cours intitulé Histoire, théologie et pratique de la guérison dans l'Église. Il s'attache particulièrement à encourager ceux qui passent par une maladie mortelle, ou qui ont surmonté une telle maladie, à aider les gens qui sont atteints du même mal. Entre autres choses, il nous a parlé de sa conviction que la guérison comporte un « transfert d'énergie »; il nous a parlé de la prière qui facilite le traitement médical et de la valeur de la « nouvelle physique » et de la « nouvelle médecine ».
Michael Drury: auteur d'un certain nombre de livres et d'articles. Elle a écrit un livre sur la guérison intitulé Every Whit Whole: the adventure of spiritual healing [Guéri tout entier: l'aventure de la guérison spirituelle], dans lequel elle se sert largement de ses observations et de son expérience. A l'inverse de nombreuses autres personnes qui s'occupent de guérison, elle soutient qu'il existe une différence fondamentale entre le traitement médical et la guérison par la prière, ce qui mène inévitablement dans des directions différentes. Elle se considère résolument chrétienne, mais, pour l'instant, elle ne s'est associée à aucune église.
Arthur W. Greeley: rédacteur en chef de la revue Sharing [Partager], publiée par l'Ordre de Saint Luc (U.S.A.), organisation œcuménique qui soutient la guérison. Il a passé de nombreuses années dans le Service des eaux et forêts américains, avant de devenir pasteur méthodiste. Comme de nombreux chrétiens qui s'occupent de guérison, il croit que Jésus intervient personnellement pour guérir les gens de nos jours.
Margaret Poloma: auteur de The Charismatic Movement: Is There a New Pentecost? [Le mouvement charismatique: assiste-t-on à une nouvelle Pentecôte ?] et professeur de sociologie à l'université d'Akron [dans l'Ohio, U.S.A.]. Elle est catholique charismatique. Bien que la guérison ne soit pas son premier centre d'intérêt, elle la considère cependant comme l'un des dons essentiels du culte charismatique.
Linnea Prefontaine: pasteur adjoint de l'Église congrégationaliste Bethany, Église unie du Christ, à Foxboro, dans le Massachusetts, et aumônier protestant affecté par le Conseil des Églises de la région d'Attleboro à l'hôpital Sturdy Memorial d'Attleboro, dans le Massachusetts, U.S.A. En tant qu'aumônier de l'hôpital, elle apporte aux patients la prière, associée à des processus médicaux et psychologiques. Comme beaucoup, elle croit que les éléments terrestres et corporels font partie de la réalité divine. Même la mort, avance-t-elle, peut être conçue comme « faisant partie de l'ordre divin ».
Donald Bartow: pasteur de l'Église presbytérienne Westminster à Canton, dans l'Ohio, U.S.A. Il a écrit des livres sur la guérison et il exerce un ministère de guérison depuis 1959. Ses services de guérison sont de style charismatique: les gens s'avancent pour recevoir l'imposition des mains, ils sont souvent « frappés en l'Esprit » et il leur arrive de parler ou de chanter en langues. Il est passé à la télévision dans certaines émissions évangéliques.
M. Jeanne Sproat: première femme ordonnée dans le diocèse épiscopal du Massachusetts. Elle est aumônier du chapitre de la Cathédrale Saint Paul à Boston, Massachusetts, U.S.A., et conduit des services de guérison hebdomadaires. L'intérêt qu'elle porte à la guérison a été en partie suscité par l'œuvre du Dr Granger Westberg, qui a aidé à établir des centres de santé au sein des églises.
Voici les miracles qui accompagneront ceux qui auront cru:
En mon nom, ils chasseront les démons ;
ils parleront de nouvelles langues ;
ils saisiront des serpents ;
s'ils boivent quelque breuvage mortel,
il ne leur fera point de mal ;
ils imposeront les mains aux malades,
et les malades seront guéris.
Marc 16:17, 18
