Ce qu'on appelle communément la parabole de l'enfant prodigue est une des leçons les mieux connues que Jésus ait laissées. On pourrait bien l'intituler la parabole du père au cœur fidèle. Celui-ci, apercevant au loin son fils prodigue qui revient, court à sa rencontre. Il n'attend pas sur le seuil de la maison ni ne délègue un de ses serviteurs; il s'élance afin de l'accueillir de tout son cœur.
En chargeant ses douze disciples les plus proches de prêcher et de guérir, Christ Jésus leur dit entre autres: « Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement. Matth. 10:8; En donnant ils ne devaient rien retenir, ils devaient donner sans mesure. Et Jésus lui-même donna l'exemple. Maintes et maintes fois les Évangiles dépeignent sa profonde compassion — à l'égard des humains, des multitudes égarées et des habitants de Jérusalem.
Quand quelque chose de très bon intervient dans notre existence, nous souhaitons généralement en faire bénéficier les autres. Cela est particulièrement vrai de ceux que la Science du Christ a touchés et guéris; nous voulons en faire part autour de nous. Pour ce faire nous sommes peut-être tout disposés à donner temps, talents, argent. Que ce don offert en partage soit fait d'un individu à un autre ou par une activité collective, il exige davantage de nous; nous devons donner de nous-mêmes. Une des étudiantes de Mrs. Eddy, parlant de la généreuse hospitalité dont le Leader de la Science Chrétienne faisait preuve à l'égard de ceux qui lui rendaient visite, écrit ceci: « Par-dessus tout, elle donnait d'elle-même sans compter. »We Knew Mary Baker Eddy, First Series (Boston: The Christian Science Publishing Society, 1943), p. 30; Ce don de soi-même est une part essentielle du don librement consenti.
Le don de soi-même: que faut-il entendre par cela ? Assurément davantage qu'un simple engagement, une simple empathie, pour utiliser deux termes actuellement en vogue. A moins que ces conditions ne soient placées sous une discipline plus haute, elles nous enfonceront peut-être dans les difficultés mêmes que connaît celui que nous essayons d'aider. Bien que notre existence se déroule ici-bas, nos regards ne doivent pas quitter les cimes.
Dans Science et Santé, dès les premières pages du chapitre intitulé « Pratique de la Science Chrétienne,» dans un passage remarquable, Mrs. Eddy nous offre ses directives à ce propos: « Le médecin qui manque de sympathie à l'égard de son semblable est dépourvu d'affection humaine, et nous avons l'autorité apostolique pour demander: “Celui qui n'aime pas son frère qu'il voit, peut-il aimer Dieu qu'il ne voit pas ?” N'ayant pas cette affection spirituelle, le médecin manque de foi en l'Entendement divin et il n'a pas cette reconnaissance de l'Amour infini qui seule confère le pouvoir guérisseur. » Science et Santé, p. 366;
La sympathie, l'affection humaine, l'affection spirituelle, la reconnaissance de l'Amour infini. Les trois premières parmi ces qualités sont des éléments nécessaires au libre don de soi; toutefois pour qu'elles atteignent à cette compassion qui permettait à Jésus d'effectuer des guérisons et au libre don de soi qu'il exigeait de ses disciples, elles doivent trouver leur conditionnement final et leur direction auprès de la quatrième qualité, savoir la reconnaissance de l'Amour infini. Sans ce quatrième élément, l'engagement et l'empathie ne produiront vraisemblablement que des résultats limités. Avec cet élément, l'action de donner atteint sa pleine puissance.
Mais quel rapport y a-t-il entre le don de soi et la reconnaissance de l'Amour infini ? Simplement ceci: nous sommes nous-mêmes de la façon la plus vraie et la plus efficace et nous donnons de nous-mêmes de la façon la plus vraie et la plus efficace quand nous nous reconnaissons comme les expressions individuelles de l'Amour infini, Dieu, et que nous laissons cette reconnaissance inspirer notre don. Comme l'écrit Mrs. Eddy: « L'amour spirituel rend l'homme conscient du fait que Dieu est son Père et la conscience de Dieu en tant qu'Amour donne à l'homme un pouvoir dont l'étendue ne peut s'exprimer par des mots. » Message to The Mother Church for 1902, p. 8;
Pour donner généreusement de soi-même peut-être faut-il d'abord se dépouiller des concepts erronés que l'on entretient de soi- même, concepts qui obscurciraient notre expression de l'Amour infini. Nous trouvons dans la Bible un grand nombre d'hommes et de femmes qui ont appris à faire cela. Jacob aussi bien que Joseph ont dû se dépouiller des faux concepts qu'ils entretenaient d'eux- mêmes; Jacob, avant de manifester son amour à Ésaii lorsqu'il le retrouva, et Joseph avant de rendre aux siens le bien pour le mal. Et cependant, quelle grande générosité de caractère ces deux hommes n'exprimèrent-ils pas finalement !
Parfois les faux concepts de soi qu'il faut abandonner comprennent certains éléments qui semblent désirables et cela nous fait reculer devant cette nécessité. Par exemple, la croyance à de bons héritages matériels; ou des talents, des capacités et des succès humains qui, en leur temps, remplissaient peut- être un but mais dont l'utilité, pour nous, est à présent dépassée du point de vue spirituel. Tout cela doit disparaître, mais avec cette disparition, nous ne perdons rien. Nous voyons au contraire de plus en plus clairement qui nous sommes en réalité, l'expression individuelle de l'Amour infini, et comment nous pouvons, dans notre ministère de guérison, faire don de ce moi le plus généreusement.
Reste encore un fait important qui rend inéluctable cet impératif du don de soi. Nous y conformer implique bien davantage que de faire don d'un moi humain. Nous nous apercevons que notre don est plutôt une transparence du Moi ou Ego divin lui-même; nous révélons le fait que l'identité finale de toute réalité est présente et active ici même.
Mrs. Eddy résume cela brièvement: « L 'Ego-homme est le reflet de l 'Ego-Dieu. » Science et Santé, p. 281. Le mot Ego dans ces deux vocables commence par une majuscule. Le seul Ego est Dieu, l'Amour infini. Lorsque nous donnons vraiment de nous-mêmes, l'Amour infini lui-même est à l'œuvre et on le voit agir.