La déclaration selon laquelle la matière n'est pas réelle est peut-être une des choses les plus ardues à saisir en Science Chrétienne. Pour arriver à comprendre la Science Chrétienne et à la mettre en pratique, c'est néanmoins un fait essentiel. Mrs. Eddy écrit: « L'Esprit est infini; par conséquent l'Esprit est tout. “Il n'y a pas de matière” est non seulement l'axiome de la vraie Science Chrétienne, mais c'est la seule base sur laquelle cette Science peut être démontrée. » The First Church of Christ, Scientist, and Miscellany, p. 357;
Un axiome est une vérité évidente en soi. Il est évident en soi que la matière est illusoire pour la conscience spirituelle mais non pour la falsification que constitue la conscience matérielle qui s'appuie entièrement sur la matière en tant que substance et réalité. Il incombe aux Scientistes Chrétiens de faire plus que de rendre hommage en paroles à cet axiome de leur religion. Dans notre étude de cette Science, nous lisons chaque jour des textes ayant trait à la réalité et la totalité de l'Esprit ainsi qu'à la nature illusoire de la matière. Nous faisons de grands efforts pour comprendre la vérité que la vie, la substance et l'intelligence sont spirituelles, qu'elles ne sont pas dans la matière ni n'en procèdent. Et pourtant la plupart d'entre nous trouvent que l'évidence de « cette chair par trop épaisse », comme dit Shakespeare, est bien difficile à percer.
Ce n'est pas par simple esprit de contradiction que nous nions l'existence de la matière, mais parce que c'est là un fait qui peut se démontrer au moyen de la guérison et de la régénération. Chaque guérison en Science Chrétienne démontre dans une certaine mesure que la matière et son cortège composé du péché, de la maladie, de la limitation, etc., ne sont nullement des réalités intraitables, mais des inversions de la vérité. A moins de percevoir clairement la totalité absolue de l'Esprit et par conséquent le néant de la matière, nos démonstrations seront vraisemblablement restreintes en proportion.
Nous n'acceptons pas tous la Science Chrétienne de la même façon. Certains acceptent intuitivement la totalité de l'Esprit, Dieu, ainsi que le néant de la matière. D'autres font certaines réserves sur le néant de la matière mais découvrent, en progressant, qu'ils prennent davantage conscience de ce fait. De nos jours, même les savants reconnaissent en un sens le caractère insubstantiel de la matière. De plus en plus, ils voient la matière sous un jour nouveau. Ils ont pour tâche de fouiller la nature et la structure fondamentales de la matière; mais plus ils approfondissent leurs recherches et plus ils perçoivent de la nature mentale de la matière. C'est en somme ce qu'en dit Mrs. Eddy il y a cent ans; mais elle alla bien plus loin et révéla la totalité de l'Esprit, l'Entendement.
Bien que ces scientifiques ne seraient pas nécessairement et consciemment d'accord avec le point de vue de la Science Chrétienne sur la totalité de l'Esprit, il n'en reste pas moins qu'ils suivent une voie parallèle quant à la non-substantialité de la matière. En général, ils s'accordent à déclarer que la matière ne se compose pas de particules matérielles solides et indestructibles mais qu'ils la considèrent comme d'une nature essentiellement électrique. Les théories ondulatoires et corpusculaires conduisent à des interprétations mentales, mathématiques ou métaphysiques. Il reste encore toutefois un énorme fossé entre ce qui est matériellement mental ou électrique, et le royaume spirituellement mental de Dieu, l'Entendement.
A propos de la théorie ondulatoire de la matière, Arthur Koestler dit dans son livre intitulé Les somnambules: « Certains savants interprètent les ondes constituant apparemment la matière comme des “ondes de probabilité” absolument immatérielles traçant “des zones de perturbation” où un électron peut vraisemblablement “survenir”. » Et il cite J.W.N. Sullivan, qui dit à propos de ces ondes: « Elles sont tout aussi immatérielles que des vagues de dépression, de loyauté, de suicides, etc., déferlant à travers une nation. Et de là, ajoute-t-il, il n'y a qu'un pas à franchir pour les désigner, sans ironiser, comme les ondes abstraites, mentales ou dérivées du cerveau, de l'Entendement Universel. » The Sleepwalkers, p. 531;
Dans un article traitant de la théorie corpusculaire intitulé: « Un scientifique peut-il croire en Dieu ? » son auteur, le Dr Warren Weaver, dit: « Aucun savant n'a jamais vu un électron... Et pourtant, pour un scientifique, il n'y a rien de plus “réel” qu'un électron. Pour lui, s'il y pense profondément, chaises, tables, rocs, tout cela n'est en fait pas très “réel”. Le savant atomiste, avec ses outils de précision, ne voit dans une table qu'un vague tourbillon de charges électriques, charges qui sont à leur tour tout à fait floues et insaisissables. Dans cette optique, la table est complètement dépourvue de l'illusion grandeur nature de son caractère solide. »
Et plus loin: « ...minutieusement examinées, toutes ces idées grandeur nature ne font tout simplement pas le poids. Lorsqu'il [le scientifique] s'astreint à ramener sa pensée aux niveaux fondamentaux, un ensemble d'idées entièrement nouveau et étrangement abstrait entre en jeu. Les corps solides ne sont pas réellement solides. “Les objets réels” ne se composent même pas, comme le croyaient les physiciens d'il y a cinquante ans, d'atomes sous-microscopiques pareils à des billes de billard. » Bref, fait remarquer le Dr Weaver: « ...le savant sait que la réalité quotidienne que revêtent la table et le roc, est une illusion, et qu'en fait la réalité est quelque chose de très subtil, d'insaisissable et de quelque peu abstrait. » Religions in America, de Leo Rosten, p. 207–209;
En discutant sous l'angle philosophique, Bertrand Russell écrit dans L'analyse de la matière: « En ce qui concerne le monde en général, le monde physique aussi bien que le monde mental, c'est du côté mental que nous parvient tout ce que nous savons quant à son caractère intrinsèque; et presque tout ce que nous savons sur ses lois causales, du côté physique. Mais la distinction entre le physique et le mental est, du point de vue philosophique, superficielle et irréelle. » The Analysis of Matter, p. 402;
Aux yeux des scientifiques et des philosophes, la matière a déjà perdu sa base de solidité. On ne considère plus ses atomes comme les cubes qui forment l'univers. Même les tourbillons de l'énergie électrique considérés aujourd'hui comme composant l'atome, et non ces particules solides auxquelles on croyait autrefois, sont séparés par des espaces relativement vastes. En effet la matière apparemment la plus solide n'est virtuellement qu'espace vide. Le noyau constitue la partie massive de l'atome. Si l'on comprimait au maximum tous les noyaux atomiques dans le corps humain, ils tiendraient sur la pointe d'une épingle. Voilà bien qui donne une idée du genre de « substance » que comporte le corps humain ! Toutefois, si l'on voulait enfler à nouveau cette poussière sur la pointe de l'épingle jusqu'à ce qu'elle atteigne encore une fois le volume d'un corps humain, celui-ci ne contiendrait encore qu'une quantité infinitésimale de « matière ». Avec cet exemple devant eux, physiciens et autres devraient être mieux capables d'apprécier la manière dont Mrs. Eddy décrit la matière comme illusoire.
Pourtant, il m'est arrivé d'entendre un ami avec qui je discutais de la question dire ceci: « Ah, mais tu n'élimines pas la matière simplement en la comprimant ! Qu'est-ce que tu fais de cette poussière sur la pointe de l'épingle ? N'est-elle pas toujours matérielle et réelle ? » A cela le professeur Heisenberg, lauréat du prix Nobel de physique, donne la réponse suivante: « Ces unités les plus infimes de matière ne constituent pas en fait des objets physiques dans le sens ordinaire; ce sont des formes, des idées que seul le langage mathématique peut expliquer sans équivoque. » Frontiers of Modern Scientific Philosophy, p. 37;
Erwin Schrödinger, autre physicien lauréat du prix Nobel, a déclaré que les éléments permanents de la matière sont forme et organisation. Citons ici son ouvrage La science et l'humanisme: « Les voies habituelles du langage ordinaire nous induisent en erreur et elles semblent exiger que chaque fois que nous entendons les mots “forme” ou “conformation”, il doit s'agir de la forme ou conformation de quelque chose, qu'il doit exister un substratum matériel pour adopter une forme... Mais quand on en arrive aux ultimes éléments constituant la matière, il semble alors inutile d'y repenser en tant qu'un composé de quelque élément constituant. Ils sont pour ainsi dire forme pure, rien que forme; ce que l'on observe successivement par la suite et de façon répétée, c'est cette forme et non quelque grain particulier de matière. » Science and Humanism, p. 21; En outre, le fait de simplement observer des « particules » sousatomiques influence leur comportement, ce qui indique bien la nature subjective de la matière.
Ces vues nouvelles de la nature de la matière sont intéressantes, car elles indiquent que le monde s'apprête à accepter la thèse mise en avant par la Science Chrétienne selon laquelle la matière est la pensée mortelle manifestée ou projetée. Nous savons que grâce à la nouvelle découverte technologique de l'holographie on peut représenter, projeter des images dans l'espace. C'est là un procédé analogue à celui par lequel l'entendement mortel représente ses pensées en tant que le corps matériel et son environnement. Ces images sont retenues dans la mentalité consciente ou inconsciente, ou bien dans l'atmosphère générale de la pensée mortelle. La maladie, la difformité, la sénilité, les accidents, le péché, la limitation, la mort, les guerres et ainsi de suite, ne sont que les images que projette le faux entendement mortel. Comme les scientifiques l'ont découvert, cet entendement matériel, de même que la matière, son substratum, est, par essence, électrique. Toutefois, pour le Scientiste Chrétien, tout ce domaine de la matière, de l'entendement mortel et de l'électricité, n'est que la contrefaçon mesmérique du royaume de Dieu, l'Esprit, l'Entendement divin, la contrefaçon des identités pures et saintes que crée l'Ame.
La matière semble être dotée de forme et d'organisation parce qu'elle est l'image profilée, la concrétisation de l'entendement charnel. La Science Chrétienne vient nous montrer la réalité pure, parfaite et spirituelle dont les illusions du matérialisme constituent la contrefaçon ou l'inversion. Au lieu d'être formé et gouverné par la matière, le sens matériel et l'électricité, l'homme réel que Dieu a créé est spirituel, soumis à l'intelligence divine et à jamais gouverné par l'Entendement divin dont les pensées-anges sont toujours présentes.
Le travail accompli par la Science Chrétienne consiste à échanger les croyances erronées, inharmonieuses, limitatives et matérielles du sens matériel, contre les idées véritables, substantielles, harmonieuses, illimitées et parfaites de l'Esprit, Entendement, telles que les révèle le sens spirituel. Tout, dans l'univers de Dieu, se compose d'idées pures et parfaites. Lorsque, dans un esprit de prière, nous discernons ces idées spirituelles et que nous nous y tenons, elles supplantent dans la conscience les croyances erronées et, déroulant à nos yeux la réalité spirituelle, elles apportent la guérison.
Ce qui permit à Jésus d'accomplir ses œuvres merveilleuses et de démontrer sa maîtrise absolue sur toutes croyances matérielles, ce fut sa claire vision de la totalité et de la perfection caractérisant la création de Dieu, spirituelle et unique. Il dit: « C'est l'esprit qui vivifie; la chair ne sert de rien. » Jean 6:63. A cette époque qui est la nôtre, nous avons la bénédiction de cette révélation de la Science du Christ; elle nous permet de suivre son exemple en nous élevant au-dessus du royaume trompeur de la matière et du mal jusqu'au royaume de l'Esprit, de la réalité harmonieuse et divine.