Un dessin dans le célèbre magazine anglais Punch montrait un jeune garçon appelant sa petite sœur: « Viens par ici, j'ai besoin de toi. » A quoi la petite fille répondait: « J'ai besoin de moi-même. »
Les individus dotés d'un sens éclairé des valeurs morales et spirituelles font de bons collègues et de bons compagnons de jeux. Ils sont enclins à manifester ces qualités qui amènent leurs semblables à leur lancer cet appel: « Viens par ici, j'ai besoin de toi. » Mais trop souvent l'acceptation du monde est assortie de conditions de nature à affaiblir leur concept du moi, qu'ils reconnaissent comme spirituel, ce qui est à l'origine de ces qualités pleines d'attraits. Dans leur intérêt et celui des autres ils feront bien alors de répondre, comme la petite fille, qu'ils sont déjà occupés d'eux-mêmes.
Il est important pour chacun de nous de comprendre quel trésor représente le moi spirituel, l'individualité et l'identité spirituelles que, selon les enseignements de la Science Chrétienne [Christian SciencePrononcer ’kristienn ’saïennce.] nous possédons tous, et d'apprendre comment nous pouvons le mieux les défendre et les protéger contre les attaques qu'ils ont à subir du fait des conditions de vie de notre époque.
Voici les trois questions que nous allons considérer: Quelle est la nature exacte des pressions actuellement exercées sur l'individu ? Pourquoi sont-elles particulièrement vives de nos jours ? Quelle est la meilleure méthode d'y résister ?
Voyons d'abord leur nature. Le conformisme, la pression exercée pour faire abandonner à un individu son individualité, portent des masques variés. Ces dernières années, des récits détaillés parus sous forme de livres ou dans des revues, ont exposé comment certaines grandes sociétés se proposent de modeler jusqu'au plus petit aspect de la vie de leurs employés pour qu'ils soient tout à fait conformes à l'image que la firme veut projeter. Certains systèmes largement divulgués prétendent que si Dieu est éternel et Se manifeste en l'homme, Ses manifestations individualisées ne sont que des bulles éphémères, sans identité permanente.
Voilà donc certaines des formes des masques que revêtent ces pressions: des cycles d'activité effrénée dans le monde des affaires, des idéologies intolérantes d'extrême gauche comme d'extrême droite, des enseignements religieux ou philosophiques qui se désintéressent de la permanence de l'individualité, des attitudes déterministes en matière physiologique et psychologique alliées à un automatisme matérialiste, des contraintes d'ordre statistique reposant sur des calculs faits sur des grands nombres, ou tout simplement la contrainte exercée sur l'individu pour le faire s'adapter à la vie en société, la satisfaction à tout prix de l'instinct grégaire, l'idée préconçue que chacun agira exactement comme son voisin, son collègue ou son condisciple.
Grâce à la Science Chrétienne [Christian Science] il est possible d'identifier ces masques, tout en ne se laissant pas tromper par eux au point de croire qu'un seul d'entre eux est la cause réelle des tensions. Nous nous gardons aussi de croire que des personnes, que ce soit individuellement ou en groupe, puissent être à l'origine de ces tensions. Le mot latin persona signifie masque. Celui qui est l'agent d'une de ces formes de tension en est lui-même la victime, car il sert de masque et devra lui aussi être délivré.
C'est seulement lorsqu'ils sont débarrassés de tout masque que le conformisme, la pression exercée sur l'individu pour lui faire abandonner son identité, peuvent être vus pour ce qu'ils sont: la suggestion mesmérique impersonnelle que l'homme peut être séparé du seul Je ou Moi, Dieu, ou cesser de Le manifester dans une éternelle et infinie variété.
Voyons maintenant la réponse à notre seconde question: pourquoi ces pressions sont-elles particulièrement vives de nos jours ? Prenons le cas d'un homme qui voyage à l'étranger; il prend grand soin de son passeport, lequel l'identifie en général au moyen d'une photo et de certains signes particuliers. Le monde accepte le corps physique comme moyen d'identification d'un individu, d'abord pour établir son certificat de naissance, puis au cours des années pour établir son passeport ou des documents administratifs similaires, puis finalement pour rédiger l'acte qui clôt officiellement l'histoire de cet individu. Ainsi on prétend que la matière constitue en premier lieu l'identité d'un individu et que par la suite elle y met fin, la matière représentée par un corps physique composé d'un peu de fer, de glucide, de chaux, d'autres ingrédients en quantité moindre, et de l'équivalent d'un ou deux seaux d'eau !
Quelle différence avec le témoignage que l'on trouve dans la Bible au sujet de l'identité ! Dans l'Ancien Testament Moïse a connu Dieu comme Je Suis. Dans le Nouveau Testament, Christ Jésus, qui ne manqua jamais de reconnaître le Père céleste pour Dieu, dit (Jean 10:30): « Moi et le Père, nous sommes un. » Non seulement Jésus l'enseignait, mais il donna l'exemple le plus achevé du divin Ego dans son existence quotidienne qui soit concevable; il montra que la véritable individualité de l'homme est spirituelle, qu'elle n'est ni caractérisée par la matière ni limitée par ses conditions.
De nos jours la révélation totale et définitive de ce qui constitue l'individualité est fournie dans la Science impersonnelle du Christ, offerte au monde par Mary Baker Eddy, la Découvreuse et Fondatrice de la Science Chrétienne [Christian Science]. Dans la Science pure, tout comme dans un mode de vie chrétien, Dieu, l'Esprit, est révélé comme l'unique Ego infini, qui crée et conserve définies, spécifiques, parfaites et indestructibles, dans Sa divine infinitude, toute individualité et identité.
Mrs. Eddy écrit dans Science et Santé avec la Clef des Écritures (p. 70): « L'Entendement divin maintient toutes les identités, depuis celle d'un brin d'herbe jusqu'à celle d'une étoile, comme étant distinctes et éternelles. » Elle écrit par ailleurs (p. 513): « L'Esprit diversifie, classifie et individualise toutes les pensées, et elles sont aussi éternelles que l'Entendement qui les conçoit; mais l'intelligence, l'existence et la continuité de toute individualité demeurent en Dieu qui en est le divin Principe créateur. »
La pression exercée de nos jours par le conformisme tient à la résistance apparente de l'inertie matérielle opposée à la démonstration de cette révélation complète et définitive de l'Ego divin, que l'homme reflète.
Nous en venons maintenant à notre dernière question: quelle est la meilleure méthode pour résister à ces pressions ?
Un proverbe dit que celui qui fuit le combat aura à le reprendre un autre jour. L'auteur de cet article en a entendu une autre version qui est encore plus conforme à la réalité: « Celui qui fuit le combat sera encore mis en fuite un autre jour. » Quiconque se laisse pousser ou entraîner par des pressions extérieures à quelque forme de conformisme, court le risque de voir se répéter dans la suite de son existence le même processus dans des cas de plus en plus nombreux.
Apprendre à se former seul une opinion est la meilleure préparation à une véritable coopération constructive. Un livre de John Perkins paru récemment, Plain Talk from a Campus (Un universitaire vous parle avec franchise) fait un parallèle entre Benjamin Franklin et le conformiste moderne. Il constate: « Franklin ne sacrifiait pas son individualité à la dynamique du groupe. Au lieu d'adapter son point de vue à celui de la foule, il manœuvrait les hommes pour faire finalement prévaloir le point de vue impopulaire. »
Le Scientiste Chrétien s'efforcera de placer toute manœuvre similaire à laquelle il pourrait avoir recours sur le plan divin, et non humain. Une telle façon d'agir, en reflétant la nature divine, devrait lui permettre d'amener le monde, sans exercer aucune pression sur l'individualité de quiconque, à reconnaître qu'il aurait avantage à l'accepter, dans le travail comme dans le jeu, à des conditions qui respectent son individualité et son sens d'une identité uniquement spirituelle.
Archimède, ce grand ingénieur de l'Antiquité, a dit: « Donnez-moi un point d'appui et je soulèverai l'univers. » Toute action méritoire requiert une base ferme de laquelle on peut opérer. Nous ne saurions trouver de base aussi inébranlable pour construire un véritable esprit de coopération, que la compréhension que Dieu est l'Ego reflété par tous, nous-mêmes comme autrui.
En conclusion, le divin Ego n'admet rien de vague en matière de conduite journalière. Dieu qui S'est révélé à Moïse comme Je Suis, lui a également donné les Dix Commandements. Le Père céleste avec lequel Jésus identifia l'identité véritable, a aussi inspiré les Béatitudes.
Les commandements et les Béatitudes, étant dérivés de l'unique Ego, ne constituent point des codes de conduite qui nous soient imposés de l'extérieur. Mrs. Eddy écrit dans Non et Oui (p. 11): « L'homme a une individualité perpétuelle; et les lois de Dieu, ainsi que leur action intelligente et harmonieuse, constituent son individualité dans la Science de l'Ame. » Les lois de Dieu, non un corps physique composé de fer, de sucre, de chaux, et d'eau, sont les composants réels de notre identité. Il est normal et naturel d'obéir aux lois de Dieu, parce qu'en leur obéissant nous sommes vraiment nous-mêmes.
Quiconque s'aligne sur les commandements et les Béatitudes dans sa vie quotidienne, et sur la ferme reconnaissance que l'homme est toujours un avec l'Ego divin dans son raisonnement métaphysique, a un moyen de défense sûr comme un roc contre toute pression extérieure sur son individualité ou son identité, et une base pour accomplir des œuvres salutaires, susceptibles de bénir l'humanité.