L'idée d'indépendance est sans contredit chère à tout homme, si bien que chacun est désireux de réclamer tout ce qu'elle implique, sans même prendre en considération que nécessairement il sera forcé de prouver qu'il y a droit. La définition que Webster donne du mot indépendance est en partie comme suit: “état où l'on ne dépend de personne et où l'on n'est régi par personne.” Dans la Déclaration de l'Indépendance Américaine, adoptée en 1776, nous trouvons cet énoncé: que tous les hommes “sont doués par leur Créateur de certains droits inaliénables; que parmi ceux-ci on compte: la vie, la liberté et la recherche du bonheur.” Ces énoncés valent assurément la peine d'être pris en considération, mais l'étudiant de la Science Chrétienne consulte instinctivement son livre de texte pour avoir la vraie signification de toute chose, et lorsqu'il l'a acquise il a fait un pas en avant. A la page 200 de “Science et Santé avec la Clef des Écritures” Mrs. Eddy dit: “La Vie est, a toujours été, et sera toujours indépendante de la matière; car la Vie est Dieu, et l'homme est l'idée de Dieu; il n'est pas formé matériellement mais spirituellement, et il n'est pas sujet à la décomposition et à la poussière.”
On suppose souvent avant d'avoir bien réfléchi que le riche est plus indépendant que son frère qui est pauvre, mais on verra facilement au premier coup d'œil la fausseté d'une telle croyance. Supposons que deux hommes, l'un riche et l'autre pauvre, se trouvent en quelque île déserte ou en quelque endroit éloigné des avantages de la civilisation. Admettons que l'homme sans fortune ait appris à se servir de sa tête et de ses mains, mais que l'autre n'ait pas appris à le faire, lequel des deux, pensez-vous, serait le plus dans le cas de prouver son indépendance? Même au point de vue matériel on ne saurait nier que l'homme réellement indépendant est celui qui s'est rendu maître des difficultés de tous genres et qui est devenu, par exemple, un ingénieur expert, ou un mécanicien adroit. Cela va sans dire qu'en sus de ses connaissances techniques il devrait avoir un caractère bien équilibré, car non seulement il mettrait alors à profit les opportunités qui se présenteraient à lui personnellement, mais encore il aiderait à d'autres à réaliser tout ce dont ils sont capables individuellement.
Ces vers tirés d'une chanson des Idylles de Tennyson ont une signification profonde:—
O Fortune, fais tourner ta roue et abaisse les orgueilleux;
Fais tourner ta roue effrénée, au soleil comme par la tempête et les nuages;
Nous ne t'aimons ni ne te haïssons, ni toi ni ta roue.
Souris et nous sourirons, nous, les seigneurs de maints pays;
Ne nous souris pas et nous sourirons quand même, nous, les seigneurs de nos pouvoirs;
Car l'homme est homme et maître de sa destinée.
Le Scientiste Chrétien ne tarde pas à s'apercevoir qu'il gagne son indépendance des conditions matérielles à mesure qu'il acquiert une compréhension du Principe divin et des possibilités infinies de l'homme en tant qu'idée de Dieu. Toutes les fois que, humainement parlant, il se trouve en proie à des difficultés ou à des dangers, il se rappelle aussitôt, ainsi que nous le dit notre Guide, que la vie est toujours indépendante de la matière, et que l'homme en tant qu'idée de Dieu a la domination sur toutes choses. Ceci n'implique nullement qu'il suffit d'affirmer l'indépendance spirituelle de l'homme pour résoudre aussitôt tout notre problème; car comme le travailleur bien dressé sur le plan physique, l'étudiant de la Science Chrétienne doit être bien pourvu de la connaissance nécessaire, être pratique et énergique, et il doit l'être comme résultat de son application constante de la vérité autant qu'il la comprend.
Il va sans dire que le vrai Scientiste Chrétien devra être symétrique,— devra posséder un caractère bien équilibré,— et comprendre en tous temps la relation de l'homme à l'unique et parfait Entendement, il devra s'attacher fermement à son droit d'aînesse qui est la santé et l'harmonie, quels que soient les dangers qui puissent le menacer. De plus, il reflétera l'intelligence à tel point qu'il pourra vaincre toute difficulté bien mieux que ne le peuvent ceux auxquels la croyance à la matérialité et la crainte de la mort posent des limites. Inutile d'ajouter que l'étudiant de la Science Chrétienne, en prouvant qu'il ne dépend nullement de la matérialité ni du mal, porte ses regards vers notre grand Exemplaire, et voit qu'il était l'homme le plus indépendant qui ait jamais vécu, par la raison, ainsi que l'explique Mrs. Eddy à la page 313 de Science et Santé, qu' “il pénétrait sous la surface matérielle des choses et trouvait la cause spirituelle.” Pendant ses quarante jours d'épreuve dans le désert il prouva qu'il était au-dessus des prétendus besoins de l'existence mortelle en ce qu'il vécut sans nourriture matérielle. En deux autres circonstances, il nourrit, par sa compréhension de la totalité de l'Entendement, des milliers d'hommes, de femmes et d'enfants, qui tombaient presque d'inanition. Il enseigna aussi à ses disciples à mettre leur entière confiance en Dieu, pour avoir la santé, la force, l'intelligence, et le pain quotidien.
L'indépendance de Paul fut merveilleusement prouvée en tout temps, et ne le fut jamais plus qu'au moment du naufrage dont nous lisons le récit au vingt-septième chapitre des Actes. Nous apprenons que lui et ses compagnons avaient jeûné pendant quatorze jours, mais il leur donna l'assurance de la protection divine, et rompit le pain et se mit à le manger avec eux en rendant grâces à Dieu. Ayant un nouveau sens d'indépendance, ils prirent tous courage, et parvinrent à terre sains et saufs. A mesure que nous saisirons la signification de l'indépendance dans la Science Chrétienne, nous aussi nous serons dans l'allégresse tout le long du chemin.
    