Le silence est l'un des outils les plus utiles de celui qui lit à haute voix. C'est le moyen de mettre en valeur les mots, de les grouper pour en faire ressortir la signification. C'est la signification des mots qui détermine un silence et non la ponctuation écrite.
Le silence est également un des moyens de faire ressortir un fait — une pause après et/ou avant la relation d'un fait met celui-ci en relief. Dans Jean 9:7 par exemple, « Il y alla, se lava, et s'en retourna voyant clair », une pause avant « voyant clair » met en relief la guérison.
Le silence peut indiquer un changement — changement de temps, de lieu, de personnes ou de circonstances; ou passage du style narratif au style direct ou vice versa. Nous lisons dans Luc 15:24, 25: « Il était perdu, et il est retrouvé. Et ils commencèrent à se réjouir. Or, le fils aîné était dans les champs. » Une pause significative après « et il est retrouvé » établit une distinction claire entre le style direct et la narration qui suit. De même, une pause après: « Et ils commencèrent à se réjouir » indique que l'accent est mis, non plus sur le fils cadet, mais sur le fils aîné, et non plus sur la maison mais sur les champs. Lorsqu'une pause signifie l'un de ces changements, elle devient une partie importante de la transition, parce qu'elle permet au lecteur comme à l'auditeur de faire l'ajustement mental nécessaire à un changement de pensée.
Les silences sont aussi importants que les paroles. Ce ne sont pas de simples hésitations mécaniques mais des moments de réflexion durant lesquels la pensée qui vient d'être exprimée éveille un écho et se développe aussi bien chez le lecteur que chez l'auditeur. L'absence de pause peut indiquer un manque de confiance ou peut-être un simple effleurement des mots. Notre travail consiste à nous défaire de la timidité et de la crainte et à apprécier à leur juste valeur les pensées que nous lisons. N'ayez donc pas peur des silences, mais utilisez-les.
Il n'est pas exceptionnel, surtout si vous êtes débutant, qu'un silence vous paraisse beaucoup plus long qu'à vos auditeurs. Afin de l'entendre comme ils l'entendent, entraînez-vous avec un magnétophone.
Quelle doit être la durée d'un silence ? Pour en décider, il importe d'écouter tranquillement et d'avoir une idée claire de ce qui se passe. Si nous nous arrêtons assez longtemps pour apprécier les pensées que révèlent les paroles, nous évaluerons intuitivement le temps de pause nécessaire.
D'ordinaire, plus la pensée précédant la pause est significative et profonde, plus la pause est longue. Un silence assez long, à la suite d'une question qui stimule l'intérêt, par exemple, permet de formuler une réponse mentale. De même, plus la différence est grande entre les pensées précédant la pause et celles qui la suivent, plus la pause est longue. Un changement d'années dans un récit, par exemple, exige un silence plus long qu'un changement de quelques heures. Le passage du style narratif au style direct ou le passage d'une idée à son opposé exige un silence assez long.
Prenez, par exemple, la définition que donne Mrs. Eddy du mot « vin » dans le Glossaire de Science et Santé: « Inspiration; compréhension. Erreur; fornication; tentation; passion. » La pause entre la première partie — « Inspiration; compréhension » — et la seconde partie qui fait contraste: « Erreur... » est naturellement plus longue que les pauses entre les concepts intimement liés dans la première partie du contraste.
Quand faut-il faire une pause ? De toute évidence pour faire ressortir le sens d'une phrase, et jamais, ou presque, simplement pour respirer. Mais nous pouvons aussi profiter de la pause pour respirer.
Quelle que soit la raison de faire une pause — nécessité de faire ressortir le sens d'une phrase, de souligner un fait ou d'indiquer un changement — cette pause, si elle est empreinte de réflexion, de confiance et d'inspiration, rend la lecture naturelle et lui donne le ton de la conversation. Mais il est important de se rappeler que les pauses sont mentales, non mécaniques — elles doivent toujours être riches de signification.
[Extrait du Christian Science Journal de juin 1977]
