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Un emploi pour l’été

Tiré du Héraut de la Science Chrétienne de juillet 1973


Le navire a accosté à Sandusky, dans l’Ohio; huit heures viennent de sonner, il fait encore jour en ce beau soir de juillet, et, abandonnant l’échelle de corde, Paul met pied à terre. Il aurait le temps d’aller en ville et de voir un bon film, un western avec John Wayne lui conviendrait parfaitement. Et puis il rentrerait à bord, on appareillait un peu avant minuit.

Se dirigeant vers la barrière, il ne cesse de se retourner pour contempler le bateau: il aime le voir ainsi à l’ancre, immense, majestueux et il aime pouvoir se dire que c’est son bateau, ce Fougueux, puisque aussi bien il fait partie de l’équipage. Matelot à bord d’un des grands cargos qui sillonnent les Grands Lacs, c’est bien une occupation peu ordinaire pour l’été d’un jeune gars qui va encore au lycée !

En général on les appelle les « minéraliers ». Celui-ci transporte toutefois trois sortes de chargements: du minerai de fer, du grain et du charbon. On était justement en train de charger du charbon avant de voguer vers Two Harbors, Minnesota, à l’autre bout du lac Supérieur. Là, on ferait du grain pour Buffalo, État de New York.

C’était grâce à un ami de son père, employé à Cleveland dans une compagnie de navigation, que Paul avait décroché ce job ; il aurait préféré l’obtenir lui-même, sans son père, mais il n’avait rien trouvé. Enfin, trouver le job était une chose: le conserver était une autre paire de manches. C’était bien le plus dur travail qu’il eût jamais fait.

Le travail en cale, quand on déchargeait, c’était pénible. Il fallait enfourner le minerai dans une énorme benne qui pénétrait par la descente avec un horrible bruit de chaînes et qui parfois, se heurtant aux cloisons, faisait trembler tout le navire. Paul aussi avait tremblé, quand il l’avait une fois échappé de justesse. Il avait eu si peur qu’il était immédiatement retombé sur certaines des vérités que la Science Chrétienne lui avait enseignées.

Et il y avait encore bien d’autres choses à faire. Chaque fois qu’on levait l’ancre, dûment chargé, il fallait dérouler de lourdes bâches, puis en couvrir les vingt-quatre panneaux de descente à l’aide de grandes barres d’acier, de coins en bois — et marteler tout cela en bonne place. Il fallait peindre, vérifier le matériel, laver le pont, écailler la rouille et repeindre encore. Pour trouver son second souffle, Paul se répétait parfois un verset de la Bible qu’il avait appris: « Je puis tout par celui qui me fortifie. » Phil. 4:13; Et cela lui rappelait que la capacité et l’endurance viennent de Dieu.

Au fond, c’était ce qu’il avait toujours voulu: faire ses preuves, être un indépendant, un solitaire même, si c’était là ce qu’il fallait pour se trouver, pour découvrir ce qui comptait. Au lycée, une des filles — Pat Adams — lui avait dit qu’il était « romanesque », et ajouté: « Mais pas exactement comme Omar Sharif. » Et autour d’eux, les autres avaient ri.

Eh bien qu’ils rient ! Il découvrait maintenant des choses sur les gens, comme il ne l’aurait jamais pu s’il était resté chez lui avec les copains, continuant à faire comme tout le monde.

Maintenant, il était tombé sur le cinéma qu’il cherchait — et justement on donnait un western avec John Wayne, ce bon vieux John ! Il prend son ticket, s’assied dans la pénombre et il est bientôt perdu au milieu des coups de feu retentissants et des galopades effrénées.

A la sortie, les rues lui semblent vides et calmes comme dans un western et il se sent tout drôle. Au fond, quelle heure était-il donc ? Se rappelant qu’on allait bientôt lever l’ancre, il presse le pas.

Scrutant de loin le quai, il est pris de panique en poussant la barrière: plus de bateau ! Le Fougueux est parti sans lui ! Il n’en croit pas ses yeux: « Mais à quelle heure sont-ils donc partis ? » interroge-t-il le gardien.

« Ben, ça fait plus d’une heure. »

Paul s’effondre sur un rocher: « Adieu mon job », se dit-il à haute voix.

« C’est vraiment dommage », dit l’autre pour le réconforter.

Priant, cherchant, s’interrogeant, Paul reste là un long moment, la tête entre les mains. Mais pourquoi ? Qu’ai-je donc fait pour que cela m’arrive ? Et finissant par se calmer, il se met à prier silencieusement: « Ce n’est pas de ma faute, se dit-il, je ne suis pas négligent. Je suis l’enfant de Dieu, parfait à Ses yeux, complet en Lui. Je suis spirituel et Dieu ne voudrait pas me reléguer, me rejeter comme une vieille savate. »

Il rit même un peu de ce qu’il vient de penser et se sent mieux du coup. Et puis il songe à cet énoncé de Mary Baker Eddy: « Dieu est à la fois le centre et la circonférence de l’être. » Science et Santé, p. 203. Il se sent alors encore beaucoup mieux, car s’il ne peut jamais échapper, être hors de la portée de Dieu, alors rien de bon ne peut venir à lui manquer. Croire autre chose, ce serait croire à une contre-vérité.

Et tout à coup il lui vient une idée qui paraît formidable. Est-ce qu’elle va marcher ? Entre le lac Érié et le lac Huron, voyage qu’ils ont déjà fait plusieurs fois cet été, le cargo doit traverser la rivière de Detroit. Il y a là, à Detroit, un petit caboteur postal qui sort du port et se met en rapport avec les bâtiments de passage. Paul va-t-il pouvoir atteindre ce petit bateau avant qu’il n’aille à la rencontre du Fougueux ?

Et là-dessus, il se précipite et retourne en ville à toute vitesse. Il n’y a pas de cars pour Detroit mais il y a un train, très tôt le matin. En s’y installant, il ne se sent pas fatigué le moins du monde. Avec le rythme du rail, il se répète constamment: « Je puis tout [faire] par celui qui me fortifie... »

A la gare, en arrivant, le chauffeur du taxi savait exactement à quel quai se trouvait le petit bateau postal. Il fait jour à présent. Si le Fougueux était déjà passé, Paul se sent prêt à faire face au désappointement, mais le pilote du petit caboteur n’est que trop heureux de lui annoncer qu’il n’en est rien et ils accostent ensemble trois autres navires avant d’apercevoir la familière cheminée bleue et grise remontant la rivière: C’est bien lui ! Sur la proue, en belles lettres blanches, le nom du Fougueux dansait au soleil.

En approchant l’immense coque noire sur ces eaux bouillonnantes qui les séparent, Paul prend un air très dégagé. Des copains au bastingage éclatent de rire en le revoyant et lui lancent l’échelle de corde. Il grimpe avec toute un brassée de courrier.

« Le courrier ! » lance-t-il à la ronde, tout en prenant pied sur le pont le plus naturellement du monde.

« Bienvenue à bord » fait Bill, un des pilotes, « on avait cru que ça te suffisait pour c’t été ! »

« Et comment s’appelle cette fille de Sandusky ? » raille Sam.

Paul s’amuse beaucoup, il rit de bon cœur, mais dans le fond il est un peu inquiet et se demande s’il va être puni ou réprimandé ou peut-être même licencié ?

Mais bientôt Olson, le second, s’approche la main tendue avec un sourire amusé: « Alors, dit-il, on a décidé de s’y coller et de rester à bord ? Ben, tu es exempt toute la matinée, ça vaut bien ça ! »

Joe Harrigan, l’un des matelots, vient lui raconter ce qui est arrivé à Sandusky.

« On est parti une heure et demie plus tôt que prévu, dit-il, le capitaine a pensé que tout le monde était là. »

Mais Paul ne s’endort pas tout de suite, une fois sur sa couchette: il veut dire quelque chose à Dieu à propos de l’inspiration qu’il a ressentie à Sandusky, quand il s’est laissé choir sur ce rocher et qu’il a cru que tout était fichu.

« Merci, mon Père, pour l’aide que tu m’as apportée, murmure-t-il, merci pour ce job. »

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