Quand les sens matériels voient « l'abomination de la désolation; » quand notre monde paraît crouler; quand les problèmes personnels ou collectifs prennent des proportions gigantesques — c'est le moment de voir ce qui est vraiment établi dans le lieu saint. En outre, il faut s'assurer de ce que signifie au juste cette dernière expression. L'équivalent anglais du mot « saint » se rattache à un autre terme désignant l'intégralité ou la santé. Nous avons donc certainement ici l'idée de la perfection, d'un état complet.
Ainsi, se tenir dans le lieu saint où prétend être « l'abomination de la désolation, » c'est voir l'homme intact, parfait, au double point de vue individuel et collectif. Comprendre que sur le plan divin l'homme est parfait, cela représente l'amour véritable. On remarque avec intérêt que dans la « Traduction Scientifique de l'Entendement Mortel, » aux pages 115 et 116 de Science et Santé avec la Clef des Écritures, par Mary Baker Eddy, le « Troisième Degré: Compréhension » renferme entre autres l'amour, puis la santé, enfin la sainteté. Ceci n'indique-t-il pas que l'amour est un échelon nécessaire pour parvenir à la santé scientifique conduisant à la sainteté? En tout cas, l'on n'arrive au lieu saint que par l'amour, qui « ne soupçonne point le mal. » Il n'est pas facile d'aimer quand « l'abomination de la désolation » prétend s'imposer à nous et menace d'envahir notre conscience; pourtant c'est alors que l'amour est le plus nécessaire. Seul l'amour, dont le pouvoir et l'attirance sont infinis, peut transformer en un champ fertile ce qui répandait la désolation. L'influence de l'amour est irrésistible. Cela fut mis en lumière lorsqu'une certaine nuit, dans le jardin de Gethsémané, Judas le traître s'approcha de Jésus et le baisa. Le Maître savait pourquoi Judas se glissait parmi les sombres oliviers; mais à cette heure suprême, révoquant le témoignage des sens, il annonça le fait divin concernant Judas, auquel il dit: « Mon ami, pourquoi es-tu ici? » Quel fut le résultat de cette attitude? La repentance. Par la suite, Judas alla jeter dans le temple les pièces d'argent qu'il avait reçues et se pendit, croyant s'ôter la vie; mais nous pouvons être sûrs que dès ce moment, la véritable individualité de Judas commença d'apparaître. Peut-être eût-il repoussé tout autre appel, et les reproches n'auraient servi de rien; mais il ne put résister à l'amour qui l'appelait « mon ami. » Nul n'a lieu de craindre qu'on excuse l'erreur lorsqu'on aime en toute circonstance, quelles que soient les difficultés. L'amour fait disparaître le mensonge.
Pour cette raison sans doute, le livre de texte Scientiste Chrétien nous dit (p. 567) que « l'Agneau de l'Amour » démasque et tue les loups déguisés en brebis, et détruit leurs qualités abominables. Nous savons que la principale caractéristique de l'agneau, c'est l'innocence, la conscience de l'irréalité du mal. Muni de cette douce arme, l'agneau s'avance, et devant lui le mal tombe parce qu'il est irréel. Le mal peut combattre ceux qui lui prêtent de la vie en croyant à sa réalité; mais reconnaître qu'il est véritablement irréel, c'est lui porter un coup dont il ne se relève pas. « Il vous faut constater que l'erreur est néant; alors, et seulement alors, vous la maniez en Science, » écrit Mrs. Eddy (Miscellaneous Writings, p. 334). Le sens humain trouve peut-être étrange que l'agneau soit le modèle proposé aux hommes, et plus étrange encore que l'Esprit tout-puissant soit symbolisé par la colombe. Depuis des siècles, cette innocente créature passe pour l'emblème de la paix. La Science divine renverse les concepts mortels de capacité, d'efficacité; en effet, les Écritures nous montrent que lorsque Dieu parle, ce n'est pas le tonnerre, les flammes ou le son des trompettes qui proclament Ses commandements: Sa présence et Ses ordres sont plutôt comme « un son doux et subtil. » Il nous faut faire silence pour entendre cette douce voix. Le tumulte de la pensée mortelle doit s'apaiser, la conscience se calmer, pour que se fasse sentir la sereine influence de la Divinité.
Les méthodes et les gradations humaines sont toujours renversées en Science Chrétienne. L'esprit mortel dit qu'il faut combattre la dureté par la dureté, la ruse par d'autres ruses. Mais dans Science et Santé (p. 567), nous lisons ceci: « La Science divine montre comment l'Agneau tue le loup. » Sous ce rapport, remarquons que dans l'Apocalypse le lion et l'agneau, loin d'être opposés l'un à l'autre, représentent les mêmes éléments. Le chapitre cinq rapporte que Jean pleura beaucoup parce que personne n'était digne d'ouvrir le livre ou de le regarder; alors un des vieillards dit que le lion de la tribu de Juda avait conquis le pouvoir d'ouvrir le livre. Puis Jean vit au milieu du trône un agneau qui prit le livre et en rompit les sceaux. Que signifie cela? La force et le pouvoir sont les caractéristiques du lion; la Bible nous fait voir que ce sont aussi les qualités de l'agneau.
Si vous aspirez à la force, au pouvoir qui vous permettront de vaincre les prétentions du mal, recherchez avant tout la conscience de l'agneau, l'innocence et la pureté, la conscience de l'irréalité du mal; l'erreur ne peut lutter contre ces choses, car elle ne les comprend pas et ne saurait en faire usage. Galahad s'écriait: « Ma force est celle de dix hommes, parce que mon cœur est pur! » Ainsi s'explique le rapprochement entre le lion et l'agneau. C'est l'innocence de l'agneau qui donne la force du lion; c'est elle qui démasque les mauvais desseins, qui peut ouvrir les sept sceaux; c'est elle qui pour finir se tiendra dans le lieu saint, — la montagne de l'Éternel, — où demeurent les nobles aspirations, la joie spirituelle. Là fleurissent les pensées pleines de grâce, là se font toujours entendre les douces mélodies de la louange et de la paix.
    