La nécessité d'être longanime est probablement plus grande aujourd'hui que dans toute autre période de l'histoire. L'entendement mortel paraît quelquefois déchaîné; il insiste à l'extrême pour qu'on reconnaisse ses fausses prétentions matérielles. Souvent la volonté humaine semble usurper la première place, et son pouvoir apparent s'oppose sans merci aux paisibles désirs des hommes. Il en résulte une anxiété constante pour le monde, qui craint que le mal ne prévale et n'entraîne un cataclysme funeste à notre civilisation moderne, une catastrophe plongeant dans l'angoisse des foules innombrables.
Partout où la volonté humaine se fait remarquer, partout où elle s'affirme et cherche à dominer, elle est suivie, si l'on n'est pas sur ses gardes, de cette conséquence: un amer sentiment de haine. En général, le genre humain ne prend pas le parti des malfaiteurs; il est instinctivement choqué des tentatives faites pour empiéter sur le domaine du bien. De longs siècles l'ont habitué à tenir en estime la justice, et d'innombrables personnes s'opposent naturellement au mal soit en pensées soit en actions. Mais comme beaucoup ignorent la vérité que révèle la Science Chrétienne, à savoir, l'irréalité du mal, elles ne refrènent pas leurs sentiments; elles en arrivent donc à haïr ceux qui font le mal, et souffrent en conséquence. Parmi les cas de maladies qui se présentent aujourd'hui, bon nombre sont dus sans aucun doute à l'indignation suscitée par la tyrannie et à la haine pour les méchants.
On peut dire sans la moindre hésitation que les problèmes du monde ne se résoudront pas si le genre humain persiste à tenir le mal pour réel. Or c'est ainsi que le considère aujourd'hui la grande majorité des hommes. En outre, ils associent le mal avec les personnes, dont ils le croient inséparable. Aussi trouvent-ils parfaitement légitime de marquer leur désapprobation en haïssant ceux qui font le mal. Tant qu'ils croient à la réalité du mal, les mortels continueront à haïr les malfaiteurs.
La Science Chrétienne est venue pour donner aux humains une nouvelle vision — une vision spirituelle qui leur permettra de voir le mal sous son vrai jour, et même d'en discerner l'irréalité totale. Comment la Science Chrétienne obtient-elle ce résultat? Elle révèle la grande vérité d'un Dieu infini et toujours bon. « Tu as été témoin de tout cela, afin que tu en viennes à reconnaître que c'est l'Éternel qui est Dieu et qu'il n'y en a point d'autre que lui » (Deut. 4:35). Puisque Dieu est le bien sans limite, Sa création, qui Le reflète, est entièrement bonne. Dans ce cas, d'où vient le mal? Il ne vient de nulle part; il n'a point d'origine; il n'existe simplement pas. Le mal, c'est l'illusion, la fausse croyance. Il n'a donc ni présence ni pouvoir réels.
Cela étant, quelle devrait être l'attitude mentale de ceux qui par la Science Chrétienne perçoivent la totalité de Dieu et le néant du mal? Devraient-ils contempler avec stupeur les prétentions du mal qui voudrait dominer le monde? Peuvent-ils se permettre de craindre sa jactance? Les Scientistes Chrétiens doivent s'armer de résolution pour résister mentalement à toutes les tentatives du mal qui cherche à paraître réel; ils doivent affirmer en pensée et en paroles le fait que Dieu est Tout; ils doivent nier les prétentions du mal. Cette activité juste ne laisse aucune place à la haine. A la page 444 de Science et Santé avec la Clef des Écritures, Mrs. Eddy écrit: « “Si quelqu'un te frappe à la joue droite, présente-lui aussi l'autre.” C'est-à-dire, ne crains pas qu'il te frappe une seconde fois pour ta longanimité. » Les termes de cette dernière phrase sont bien significatifs. Ils montrent que si nous comprenons l'irréalité du mal, si nous ne le craignons pas, nous n'avons pas lieu d'en redouter les attaques. C'est là pour le courage et la longanimité des chrétiens une base scientifique inébranlable.
Le Christ Jésus n'a-t-il pas dit: « Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent; faites du bien à ceux qui vous haïssent, et priez pour ceux qui vous outragent et qui vous persécutent » ? Deux choses lui permettaient de parler ainsi: il comprenait d'une part l'omnipotence de Dieu, du bien, et d'autre part l'irréalité du mal — précisément les deux faits que peuvent comprendre aujourd'hui ceux qui étudient la Science Chrétienne. Le Maître savait aussi que puisque Dieu, le bien infini, est Amour, seul l'Amour possède la réalité et le pouvoir.
Faut-il donc traiter le mal comme une quantité négligeable — l'excuser et honorer ceux qui le commettent? Non certes: rien n'est plus éloigné des enseignements de la Science Chrétienne. Il arrive parfois au contraire que nous devions démasquer le mal et celui qui s'y adonne. Pourtant même alors il ne faut jamais en faire une réalité. Tandis que nous démasquons l'erreur pour obéir à la loi de la Vérité, l'amour doit régner dans notre cœur. En outre, comprenant que l'homme réel est l'image ou la réflexion de Dieu, nous devrions déclarer que l'homme ne connaît que le bien. Songeons à ce que représente ce penser spirituel pour un monde qui selon la croyance limite grièvement le bien et souffre de l'illusion que le mal est réel! Songeons à la manière dont ce penser scientifique tient en échec la pensée criminelle, frustre les plans du malfaiteur et l'aide à se tourner vers le bien!
A la page 567 de Science et Santé, nous trouvons ce beau passage: « Pour le Gabriel de Sa présence il n'est point de conflit. Pour l'Amour infini, toujours présent, tout est Amour, et il n'y a pas d'erreur, il n'y a ni péché, ni maladie, ni mort. Contre l'Amour, le dragon ne lutte pas longtemps, car il est tué par le Principe divin. » Ces lignes sont riches en inspiration, et le monde d'aujourd'hui a grand besoin de saisir la vérité qu'elles contiennent; elles nient en effet la réalité du mal — du dragon — et insistent pour que les hommes reflètent l'Amour, et l'Amour seul. Graduellement les vérités spirituelles révélées par la Science Chrétienne arrivent aux oreilles des hommes, qui se les assimilent. Ainsi de progrès en progrès, le monde sera libéré de l'esclavage qu'impose la croyance au mal.
Pendant que se poursuit l'œuvre transformatrice due à la Vérité, à l'Amour, la longanimité jointe à la patience est bien nécessaire. Souvenonsnous que toute tendance à limiter le pouvoir du bien dans notre penser, à tenir le mal pour réel, à permettre que dans notre conscience il soit détrôné par la fausse croyance matérielle, semblera combattre l'activité de la loi divine opérant le salut du genre humain. Comme le dit si bien notre Leader (ibid., p. 445): « Vous rendez la loi divine de la guérison obscure et sans effet, si vous essayez de peser l'humain dans la balance avec le divin, ou si, en aucune façon, vous limitez dans votre pensée l'omniprésence et l'omnipotence de Dieu. »
