Lorsque le Psalmiste s'écriait: « Éternel, mets une garde à ma bouche, veille sur la porte de mes lèvres! » il prononçait une prière dont tous ceux qui étudient la Science Chrétienne feraient bien d'adopter l'esprit. Dans un autre passage, le Psalmiste déclarait: « Je veillerai sur mes voies, de peur de pécher par ma langue. » Qu'est-ce que pécher par la langue? Voilà une question qui doit nous faire réfléchir. La parole est certes un agent qui permet d'introduire beaucoup de bien ou de mal dans les circonstances humaines. Nul ne peut calculer l'influence ou les suites des discours que tiennent les hommes. En d'innombrables cas, une seule phrase dite avec conviction a modifié les opinions des hommes et l'état des choses, ou changé les tendances de la pensée individuelle.
Il importe donc beaucoup que nos lèvres soient gardées par la sagesse et l'amour. Peut-être nous rappelons-nous des circonstances où il eût suffi d'élever un instant nos pensées vers Dieu pour que notre réponse à quelque remarque se modifiât ou pour que nous ne fissions pas tel commentaire sur notre prochain. Nous aurions dû attendre que la Vérité modelât notre pensée et conduisît nos discours; dans ce cas il n'y aurait eu que de bons effets pour toutes les personnes en cause.
A première vue les paroles vaines, les racontars, les commentaires superflus touchant la conduite du prochain, ses habitudes ou ses problèmes, ne semblent pas rentrer dans la catégorie de ce que les Écritures nomment le péché des lèvres. Mais les linguistes nous informent qu'un mot grec traduit dans le Nouveau Testament par le terme « péché » signifie littéralement « ce qui manque le but. » Donc si notre conversation est loin d'être utile ou constructive, est-il juste de dire que nous n'avons point péché par la langue? Si nos discours appuient sur le mal, le personnalisent ou attirent l'attention sur lui, pouvons-nous dire qu'ils sont inoffensifs?
Supposons par exemple que tel Scientiste Chrétien se trouve tout à coup dans l'obligation de résoudre certain problème, physique ou autre. Si nous apprenons la chose, quelle est notre réaction? Nous précipitons-nous sur le téléphone pour répandre cette fausseté? La mentionnons-nous dès que nous rencontrons un ami qui connaisse également la personne en cause? Ou bien nous retirons-nous dans le secret de notre chambre et là, seul avec Dieu, nions-nous cette prétention du mal? Cherchons-nous à l'effacer de notre propre pensée, demandant avec prière la sagesse et la prudence afin que si nous devons parler de la chose, nous puissions le faire dans un esprit d'amour et d'entraide? Comme cette attitude aiderait tous les intéressés — le praticien, le patient, et surtout nous-mêmes! Le Maître a dit: « On se servira pour vous de la mesure avec laquelle vous mesurez; » et ceci s'applique à nos paroles ou à nos pensées aussi bien qu'à nos actes.
Si le disciple apprend à veiller sur la porte de ses lèvres pour ne pas en laisser sortir ce qui pourrait donner au mal du relief ou de l'importance, il verra croître sa propre maîtrise sur tout ce qui est dissemblable au bien; car il ne sera plus l'avocat, l'agent ou l'embassadeur des suggestions mesmériques. Celui qui pense conformément à la vérité refuse son appui aux propos inconséquents; il n'exploite pas des choses dont il sait qu'elles n'ont aucune base dans la réalité. Il ne se laisse pas entraîner dans des discussions oiseuses touchant ce qui est irréel, éphémère. Il sait qu'une situation inharmonieuse — la sienne ou celle d'autrui — ne constitue pas une « nouvelle, » de même qu'en mathématiques un faux calcul n'est pas une nouvelle. Ces choses n'ont donc par elles-mêmes aucun intérêt, rien qui doive être transmis de bouche en bouche pour l'instruction du prochain. L'homme créé par Dieu n'est jamais désolé, affligé, compromis ou harcelé; et il n'existe réellement pas d'autre homme dont il faille s'entretenir.
A la page 146 de The First Church of Christ, Scientist, and Miscellany, Mrs. Eddy déclare: « Le Scientiste Chrétien exprime les choses harmonieuses, éternelles, et rien d'autre. Il met tout le poids de sa pensée, de sa parole et de sa plume dans la balance divine de l'être — pour la santé et la sainteté. » Avant de prononcer certaines paroles qui se présentent à nous, posons-nous donc cette question: Vais-je mettre tout le poids de ma pensée, de ma parole et de ma plume « dans la balance divine de l'être »? Si ce n'est pas le cas, il vaudrait beaucoup mieux dire quelques simples mots de Vérité, ou même garder le silence.
Le Christ Jésus disait: « Celui qui n'amasse pas avec moi disperse. » Cette déclaration du Maître n'a rien d'équivoque; elle est au contraire directe et frappante. Nous ne nous rendons pas toujours compte de ce que peut apparemment disperser une langue indomptée. A chaque instant, nous sommes en train soit d'amasser avec le Christ, grâce à des pensées, des paroles et des actes constructifs, soit de disperser par étourderie ou par indiscrétion.
Il est certain qu'en dernière analyse, l'empire sur la langue implique l'empire sur la pensée. Au vrai, « c'est de l'abondance du cœur que la bouche parle; » et si son cœur — son penser intime — désire avant tout voir le royaume des cieux s'établir sur la terre, le disciple constatera de plus en plus que la sagesse divine dirige et règle ses paroles. Alors, comme le prophète Jérémie, il pourra dire avec joie: « Ce qui est sorti de mes lèvres a été devant toi. »
