“Le prophète d'aujourd'hui”

Lorsque nous lisons et sondons les récits bibliques, nous apprenons bien des leçons utiles de la vie des premiers prophètes. Il y a généralement, à chacune des périodes successives de ces premiers temps, une personnalité qui ressort comme une lumière qu'on ne saurait cacher. Ainsi nous voyons Hénoc, Noé, Abraham, Moïse, Élie, Élisée, Daniel et d'autres, chacun à son époque respective, occuper cette position saillante. Dans la vie de chacun d'eux nous voyons un oubli de soi caractéristique, une humilité, une force et une humanité large,— qualités qui ne laissent pas de faire naître en nous l'appréciation et le respect, bien que nous n'en donnions peut-être l'exemple que graduellement. La Science Chrétienne révèle un fait réconfortant, à savoir que ces qualités spirituelles et morales appartiennent à l'homme réel, et que chacun peut les manifester d'une façon démontrable dans la mesure de sa fidélité à l'Amour et à la Vérité. Le moment est venu où l'on voit plus nettement que chacun peut acquérir et manifester l'esprit de prophétie. Il est clair que Moïse s'attendait à ce que l'obéissance à la loi de Dieu assure la jouissance de ce sens spirituel; car il représente Dieu disant: “Si vous obéissez à ma voix ... vous serez pour moi un royaume de sacrificateurs, une nation sainte.”

L'une des caractéristiques saillantes qui mettaient ces prophètes au niveau de leur grande mission, c'était leur désir désintéressé de voir tous les hommes jouir du bien spirituel dans une mesure illimitée. Nous en avons un bel exemple dans un incident qui eut lieu dans l'expérience de Moïse pendant qu'il faisait sortir les enfants d'Israël du pays d'Égypte. Le onzième chapitre des Nombres nous apprend avec quelle sagesse il combattit et vainquit les difficultés qui se manifestèrent lorsque la foule réclama de la viande à grands cris. Moïse prouva qu'une compréhension de la puissance de Dieu est égale en tout cas de besoin urgent. Obéissant au commandement de Dieu il choisit soixante-dix anciens, et cet arrangement le dégagea d'un grand nombre des devoirs les plus simples, tandis que les problèmes qui étaient trop difficiles à résoudre pour les anciens lui furent soumis. Les soixante-dix anciens reçurent l'esprit de Dieu en plus grande abondance et ils commencèrent à prophétiser. Deux hommes, Eldad et Médad, qui n'avaient pas été appelés par Moïse, restèrent dans le camp; et ils prophétisèrent, eux aussi. Josué, qui n'était pas encore mûr en ce qui concerne la compréhension spirituelle, demanda à Moïse de réprimander ces deux; mais au lieu de le faire, Moïse le reprit lui-même avec bienveillance.

Moïse savait qu'en réalité l'esprit de prophétie appartient à chacun. Il s'était lui-même élevé au-dessus de bien des croyances qui semblent obscurcir la perception spirituelle. Son amour pour l'humanité était tel qu'il lui tardait de voir chacun jouir des bienfaits et de la paix qu'assure cet état mental réel. Il n'eût pas voulu supprimer ce sens spirituel; il eût au contraire préféré le voir se manifester davantage. Sa réponse à Josué le montre nettement: “Es-tu jaloux pour moi? Ah! plût à Dieu que tout le peuple de l'Éternel fût prophète, et que l'Éternel mît son esprit sur eux!”