Le matin du jour d’Actions de grâces, mon cousin s’est disputé avec notre grand-mère dans la cuisine et lui a dit d’aller au diable.
Joyeux Thanksgiving, ai-je pensé, pendant qu’il se tenait là, arrogant et moralisateur. Mes pensées au sujet de mon cousin et de sa famille super-religieuse n’étaient pas exactement des pensées de gratitude pour le fait qu’ils se soient joints à nous pour les festivités du jour.
Seule une personne semblait ne pas être perturbée par cette confrontation : celle qui était justement censée aller au diable. Notre grand-mère, qui avait élevé 7 enfants et 22 petits-enfants, regardait mon cousin avec amour. Et, bien que je ne me souvienne pas de la façon dont elle a répondu, voire même si elle a répondu, je me souviens d’une pensée qui a percé ce nuage de colère : voilà une femme qui savait ce qu’était la grâce.
Je ne connaissais pas la grâce, pas vraiment en tout cas, lors de cette journée d’Actions de grâces. Et je n’avais pas envie d’être miséricordieuse. Je voulais faire savoir à mon cousin qu’il se trompait au sujet de notre grand-mère et de ses croyances. Mieux, je voulais qu’il sache pourquoi il avait tort. Pourquoi ? Parce que je pensais que j’étais plus intelligente que lui, et j’étais sûre que je pourrais le réduire au silence lors de notre débat biblique d’après diner.
Mais ce fut une victoire peu satisfaisante. Je suis retournée à l’université avec l’impression d’avoir abandonné quelqu’un. Ma grand-mère peut-être, mais aussi moi-même. Je n’arrêtais pas de penser à son comportement ce matin-là – la miséricorde qu’elle exprimait sans effort, qui avait enveloppé d’amour mon cousin, et qui ne cessait pas.
Pouvais-je faire de même ? Pouvais-je racheter ma journée d’Actions de grâces ? Mieux, pouvais-je prolonger jusqu’à la fin de l’année la bénédiction que j’avais obtenue grâce à l’exemple de ma grand-mère ?
Oui, ai-je pensé. Je le pouvais. Je le devais. J’avais toujours pensé au jour d’Actions de grâces comme à un jour consacré au don – non pas seulement pour rendre grâce, mais aussi pour partager la générosité de la bonté de Dieu avec la famille et les autres. Mais je savais que cette année-là, j’avais été limite. J’avais été charitable avec tout le monde, sauf peut-être avec la personne qui avait le plus besoin de ma gentillesse.
Ce qui m’a sauvée lorsque j’ai entrepris de racheter ma journée d’Actions de grâces, c’est un message tout simple qui m’est venu alors que je luttais avec le ressentiment que j’éprouvais envers mon cousin : la grâce, comme toute qualité, a sa source en Dieu, pas en nous. La Bible le formule ainsi : « Pour nous, nous l’aimons [Dieu], parce qu’il nous a aimés le premier. » (I Jean 4:19) En d’autres termes, je n’avais pas à créer la miséricorde. Je n’avais pas à rassembler l’amour et la charité nécessaires. J’aime parce que Dieu aime tout le monde. J’exprime la grâce à cause de la grâce incroyable que j’ai déjà reçue.
Alors que la grâce emplissait plus pleinement mes pensées au cours des mois qui ont suivi, j’ai cessé de tenter de faire comprendre à mon cousin à quel point il avait eu tort. J’étais trop occupée à continuer de célébrer le jour d’Actions de grâces : l’abondance de la grâce de Dieu qui renouvelle et transforme tous les cœurs. J’ai découvert que j’étais plus douce avec moi-même et plus charitable envers les autres.
Et j’ai découvert quelque chose que je ne connaissais pas. Il y avait de la puissance dans la grâce. J’avais pensé qu’avoir raison – et s’assurer que les autres le savaient – était puissant. Mais ce n’était rien en comparaison du pouvoir que j’ai ressenti lorsque j’ai été capable de pardonner et d’aimer, lorsque j’ai été capable d’abandonner mes propres opinions, fermement ancrées, pour embrasser une perspective divine.
Il s’est avéré que ce sens de grâce a duré toute l’année. J’ai senti que certains aspects tranchants de ma personnalité s’adoucissaient. Je suis devenue moins encline à réagir et plus encline à exprimer de la tendresse, de l’amour. Et j’ai gagné une meilleure compréhension de cet énoncé de Mary Baker Eddy : « Ce dont nous avons le plus besoin, c’est de la prière du désir fervent de croître en grâce, prière exprimée par la patience, l’humilité, l’amour et les bonnes œuvres. » (Science et Santé avec la Clef des Ecritures, p. 4)
C’est une prière qui a marqué mes vacances, et tous les jours depuis lors. Et j’en suis reconnaissante à ma grand-mère, et à mon cousin.