Il y a quelque temps, je faisais de la randonnée pédestre dans les Alpes souabes (une chaîne de montagnes de moyenne altitude, dans le sud de l’Allemagne). Les ruines d’un château brillaient au loin dans la lumière, comme pour m’inviter à venir contempler le coucher de soleil à leur pied.
Ayant un bon entraînement, j’étais certaine d’y arriver à temps. Mais le panneau indicateur m’a d’abord conduite de l’autre côté de la montagne. J’ai marché, marché, et puis, petit à petit, j’ai commencé à me faire du souci. Est-ce que j’étais sur le bon sentier ? Il prenait très graduellement de l’altitude et me menait dans une direction opposée aux ruines du château. Est-ce que je n’avais pas manqué un panneau ? N’était-il pas préférable de faire demi-tour ?
Malgré tout, j’ai continué d’aller de l’avant, en marchant de plus en plus vite. J’ai pensé à un labyrinthe. Je ne parle pas de ceux que l’on voit souvent dans certains champs de maïs, en automne, et qui comportent de nombreuses ouvertures ne menant nulle part. Au sens littéral, le labyrinthe est un symbole ancien que l’on trouve notamment à l’époque du christianisme primitif. Le labyrinthe de la cathédrale de Chartres est l’un des plus connus dans le genre.
Quand vous entrez dans un tel labyrinthe, chaque pas vous conduit immanquablement vers le centre. Le parcours comporte un grand nombre de tournants et d’arcs concentriques. Quand vous croyez être tout près du but, vous vous apercevez, un peu plus loin, que le tracé vous ramène presque à l’entrée. En fait, il progresse tranquillement et sûrement vers le centre. Il est impossible de se perdre en route.
Tandis que je poursuivais mon chemin vers les ruines du château, des images mentales, des souvenirs d’anciennes expériences, ainsi que des passages des écrits de Mary Baker Eddy sur ce sujet me venaient à l’esprit.
Le labyrinthe est un symbole, une illustration de l’existence considérée dans sa totalité. Quel que soit ce qui caractérise ma vie actuelle – le commencement de quelque chose, un nouveau départ, un trajet droit sous un ciel sans nuage, un tournant important, le milieu du parcours, ou une arrivée à bon port longtemps espérée – je suis toujours à l’intérieur d’un cycle complet et parfait.
Mary Baker Eddy écrit dans Unité du Bien : « La Vie est Dieu, ou Esprit, le suprasensible qui est éternel. L’univers et l’homme constituent les phénomènes spirituels de cet unique Entendement infini. Les phénomènes spirituels ne convergent jamais vers autre chose que la Divinité infinie. Leurs gradations sont spirituelles et divines ; ils ne peuvent s’effondrer ou déchoir au point de devenir leurs opposés, car Dieu est leur Principe divin. Ils vivent parce qu’Il vit ; ils sont éternellement parfaits parce qu’Il est parfait et qu’Il les gouverne dans la Vérité de la Science divine, dont Dieu est l’Alpha et l’Oméga, le centre et la circonférence. » (p. 10)
En ayant Dieu pour centre et circonférence, les phénomènes spirituels de l’Entendement divin, autrement dit l’homme et l’univers, n’atteignent pas la perfection en prenant certaines décisions, comme une sorte de condition préalable. En réalité, la perfection est un fait présent, ici même, maintenant même.
Mais n’a-t-on pas bien souvent l’impression du contraire ? L’impression d’être des mortels imparfaits parmi d’autres mortels imparfaits, dans un monde fini tout aussi imparfait ? Comme s’il fallait d’abord se développer à partir d’un mortel imparfait pour devenir ensuite un être spirituel parfait.
Nous avons probablement tous connu des moments où nous nous sommes sentis littéralement forcés à changer quelque chose dans notre vie afin d’aller de l’avant, de progresser – ce qui ne s’est pas toujours fait sans une sorte de pression douloureuse. Pourtant, dans l’infinitude de l’Entendement divin, ce n’est rien d’autre que notre perfection spirituelle qui demande à être vécue et exprimée consciemment. C’est ce que nous sommes réellement en tant qu’expression de l’Entendement divin qui détermine nos progrès, et non les efforts que nous effectuons pour atteindre la perfection.
Mes doutes concernant le sentier que j’avais pris sur cette montagne n’étaient, en fin de compte, qu’une sorte de « coup de pouce » de la Vérité et de l’Amour divins destiné à me faire progresser. Le Principe divin parfait exclut toute possibilité de se perdre en route. Ce Principe est sans cesse à l’œuvre pour corriger, guider, nourrir et créer un équilibre.
Dans son langage, la Bible traduit cela ainsi : « Tes oreilles entendront derrière toi la voix qui dira : Voici le chemin, marchez-y ! Car vous iriez à droite, ou vous iriez à gauche. » (Ésaïe 30:21) Nous ne pouvons nous empêcher d’être l’expression ordonnée du Principe divin infini et parfait, l’Amour, toujours avec un but et une raison d’être, conformément à ce que cet Entendement aimant et intelligent nous révèle maintenant même et à chaque instant.
Dans l’Évangile selon Matthieu, il est également question d’un chemin « resserré »
(7:14), qui semble difficile à trouver, et que Mary Baker Eddy décrit ainsi : « Tout ce qui existe réellement est l’Entendement divin et son idée, et dans cet Entendement l’être intégral est révélé harmonieux et éternel. Le chemin droit et resserré, c’est voir et reconnaître ce fait, céder à cette puissance et suivre les directives de la vérité. » (Science et Santé avec la Clef des Écritures, p. 151)
Là encore, le raisonnement limpide de Mary Baker Eddy part de l’Entendement divin. Dans cette unité indestructible de l’Entendement et de l’idée, l’être intégral n’est jamais autre chose que l’expression ou le déroulement de la perfection éternelle et de l’harmonie infinie. Ce que l’on appelle intuition ou inspiration, les élans qui nous animent, la voix intérieure que nous entendons, ce « coup de pouce » que nous percevons, tout cela ne nous parvient jamais de l’extérieur. C’est la perfection de l’Amour infini, la présence de l’Entendement infini, autrement dit la Vie unique qui se révèle perpétuellement en elle-même en tant qu’idée infinie, toujours complète, jamais fragmentée ni matérielle, bien que nous puissions avoir l’impression de « marcher sur le bon chemin », de « prendre des décisions », de « réfléchir » ou de « poursuivre un but ».
Au cours de ma randonnée, je suis bientôt arrivée à un tournant serré. Le sentier grimpait à présent directement vers le sommet ; il était même très escarpé vers la fin. J’ai atteint ma destination juste à temps pour jouir d’un magnifique coucher de soleil d’un orange flamboyant et du crépuscule. En redescendant, j’ai découvert un raccourci que j’ai pris à grandes foulées. Il m’a ramenée dans la vallée en peu de temps, avant la tombée de la nuit. Quelle expérience riche et inoubliable ! Quelle bénédiction de savoir que Dieu est le centre et la circonférence de tout être !